Glossaire

SA

Une société anonyme peut être organisée de deux manières différentes :

- Sa à conseil d'administration qui schématiquement a deux organes essentiels :

* les assemblées d’actionnaires

* le conseil d'administration qui désigne choisi parmi les administrateurs un Président.
Le Président est celui qui gère la société sauf le cas où le conseil d’administration décide de désigner un directeur général.-

- Sa à Directoire qui scindent le pouvoir dévolu au conseil d’administration entre :

* Le Conseil de Surveillance qui a vocation à exercer un rôle de contrôle et qui désigne parmi ses membres un Président et un Vice Président.
* le Directoire qui est l'organe de gestion, et dont les membres, désignés par le conseil de surveillance. C’est le président du Directoire qui exerce une mission de direction équivalente au « Directeur général »
Evidement les membres du conseil de surveillance ne peuvent être membres du directoire

Ainsi, clairement, la SA à directoire dispose d’un niveau de contrôle de plus que la SA à conseil d’administration.


SAFER et préemption

Généralités

Les Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) ont pour but de permettre à des candidats à des projets - qu'il soit agricole, artisanal, de service, résidentiel ou environnemental - de s'installer en milieu rural. Les projets doivent être en cohérence avec les politiques locales et répondre à l'intérêt général.

Les SAFER peuvent également se porter acquéreur de terres, parfois pour les regrouper et constituer des ensembles cohérents qui seront ensuite cédés.

Dans cette perspective les SAFER bénéficie d'un droit de préemption dans certaines conditions.

La préemption de la SAFER en procédure collective

Comme toujours, le télescopage de deux droits est complexe.

En l'espèce, une procédure collective peut conduire à deux types de cession : une cession d'entreprise d'une part, à une cession d'actif d'autre part. Pour le détail sur ces notions voir les cessions.

L'une des différences entre ces deux processus est que la cession d'entreprise consiste pour le tribunal à retenir un projet d'entreprise, et pour cette raison les préemptions sont écartées. La cession d'actif ne répond pas au même objectif et les préemptions sont applicables 

Plus précisément les textes du droit des procédures collectives ont toujours écarté la préemption de la SAFER en cession d'entreprise ( par exemple l'article L143-4 du code rural qui fait toujours référence à la loi de 1985 maintenant abrogée).

C'est le code de commerce qui a pris le relais du code rural dans les nouvelles dispositions: l'article L626-1 écarte expressément les préemptions découlant du code rural en cession d'activité en période d'observation de sauvegarde, ce texte est rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L631-19 aux cessions d'une branche d'activité en complément du plan de redressement, et l'article L642-5 applicable à la cession d'entreprise (en redressement ou liquidation) écarte les préemptions du code rural et du code de l'urbanisme.

Il n'y a donc pas lieu à préemption en sauvegarde, ni en redressement judiciaire.

Ce n'est donc qu'en cas de cession d'actif - et donc en liquidation judiciaire uniquement, et restrictivement dans ce mode de réalisation d'actif uniquement ( puisque ce n'est pas le seul posssible en liquidation judiciaire) - que les préemptions peuvent s'appliquer. 


Saisie administrative à tiers détenteur (SATD)

La saisie administrative à tiers détenteur remplace l'ATD (avis à tiers détenteur) à partir du 1er janvier 2019

Ce mode de recouvrement des créances fiscales découle de l'article L262 du livre des procédures fiscales tel que modifié par de la loi 2017-1775 du 28 décembre 2017.

L'interprétation du texte et la doctrine fiscale considèrent que la créance saisie par SATD peut être une créance conditionnelle (même sous condition suspensive), une créance à terme ou une créance non encore liquide mais que les créances future, éventuelle ou hypothétique ne peuvent en revanche pas être saisies (BOI-REC-FORCE-20-10-10) ... ce qui entretient une distinction mal définie entre créance à naissance successive et créance à exécution successive par exemple pour une rente de retraite.

Les notifications des saisies auprès des établissements de crédit sont dématérialisées (en deux temps 2019 et 2021 suivant le chiffre d'affaires de la banque) (article 73 de la loi)

Plusieurs décrets sont venus procéder aux modifications de mise en place de ce dispositif :

Décret 2018-967 du 8 novembre 2018

Décret 2018-968 du 8 novembre 2018 relatif notamment à la notification par voie électronique

Décret 2018-969 du 8 novembre 2018

Décret 2018-970 du 8 novembre 2018

Décret 2018-1118 du 10 décembre 2018

Décret 2018-1353 du 28 décembre 2018

Concernant les sommes dues à un salarié, les somme susceptibles d'être appréhendées sont différentes de la saisie sur salaires et notamment l'indemnité de licenciement est intégralement appréhendée, ce qui n'est pas le cas en saisie sur salaires.


Saisie immobilière

Quelques points de la définition

En droit commun

En procédure collective

Généralités et procédure de saisie

Sort des saisies en cours au jour du jugement d'ouverture

Reprise d'une saisie en cours par le liquidateur (subrogation)

Nouvelle saisie initiée en principe par le liquidateur

L'emprise de la saisie et ses limites

La limite de l'intérêt des créanciers

Le délaissement du bien par le liquidateur

L'insaisissabilité

Les biens reçus par succession

Calendrier de la saisie initiée par le liquidateur

Ordonnance du juge commissaire et voies de recours

Formalités préparatrices de la vente

L'adjudication et ses suites

Le cas particulier du recours contre l'ordonnance du juge commissaire et les conséquences sur le calendrier

Enoncé du problème de calendrier

Solutions proposées pour le respect du calendrier

Différences avec la procédure de droit commun

L'ordonnance du juge commissaire se substitue au commandement de saisie

Le juge de l'exécution ne peut faire droit à une demande de vente amiable

Il n'y a pas d'audience d'orientation

Effet du dessaisissement du débiteur en liquidation

Voir notre étude détaillée

En droit commun:

C'est la procédure de vente aux enchères "à la barre" du tribunal, d'un actif immobilier sur poursuite d'un créancier (en un ou plusieurs lots, éventuellement avec clause d'allotissement)

Plus précisément en droit commun, c'est à dire hors procédure collective, la saisie immobilière relève de la compétence du juge de l'exécution (JEX).

La procédure commence par un commandement délivré par le créancier poursuivant. Ce commandement est l'amorce d'un enchainement de formalités : dépot du cahier des conditions de la vente qui comporte le descriptif précis de l'immeuble, audience dite d'orientation à laquelle le juge de l'exécution va statuer sur toutes les contestations, et peu le cas échéant autoriser une vente amiable proposée par le débiteur.

Les ventes sont annoncées dans des journaux d'annonces légales, par des affiches (dénommées placards apposés au tribunal) et divers sites internet. En principe des visites sont organisées avant la vente, ce qui permet aux candidats de se faire une idée plus précise du bien.

L'audience d'adjudication proprement dite est une procédure d'enchères à l'issue de laquelle le meilleur enchérisseur est retenu.

Les enchères ne peuvent être faites que par l'intermédiaire d'un avocat inscrit au barreau près le Tribunal judiciaire ex TGI devant lequel la vente est poursuivie.

Avant toute enchère, l'avocat se fait remettre par son mandant (ou dit un pouvoir) pour une somme déterminée, et contre récépissé une caution bancaire irrévocable (ou un chèque de banque dans les conditions du cahier des conditions de la vente) d'un montant représentant 10 % du montant de la mise à prix, et au minimum 3 000 €. C'est une condition pour participer aux enchères, ce qui permet d'éviter des enchères fantaisistes.

L'avocat doit également disposer de l'état civil et de la situation matrimoniale correspondante au mandat, ou s'il s'agit d'une personne morale d'un justificatif de constitution et des pouvoirs de son représentant légal pour l'adjudication.

L'avocat ne peut être porteur que d'un mandat pour éviter des conflits d'intérêt entre deux enchérisseurs.

Enfin, dans le cadre des dispositions de l'article 1594 du code civil,  l'article R322-39 du code des procédures civiles d'exécution dispose " Ne peuvent se porter enchérisseurs, ni par eux-mêmes, ni par personnes interposées :
1° Le débiteur saisi ;
2° Les auxiliaires de justice qui sont intervenus à un titre quelconque dans la procédure ;
3° Les magistrats de la juridiction devant laquelle la vente est poursuivie." 

Par exemple annulation d’une adjudication au profit de la gérante de la SCI saisie, car cette dernière « ne démontrait pas, comme elle le soutenait, qu'elle entendait faire acquisition du lot n° 1 pour son compte personnel et le financer de ses deniers propres », et, partant il est considéré que la SCI a porté les enchères par personne interposée (Cass Civ 2ème 10 novembre 2016 n°15-25460).  Etant précisé que « l'incapacité résultant de l'article R 322-39 du Code des procédures civiles d'exécution n'est pas un obstacle à la concrétisation de la vente amiable. » CA VERSAILLES 19 mai 2022 n°21-07390.

En pratique et sous cette réserve, le bien est adjugé au meilleur enchérisseur et après expiration d'un délai de 90 secondes après l'enchère sans nouvelle enchère (un chronomètre décompte cette durée et est affiché dans la salle d'audience)

Une fois les enchères terminées, et le montant de la meilleure enchère connue, les créanciers inscrits sur l'immeuble (hypothécaires) peuvent, suivant une procédure spécifique (par avocat et dans un délai de 10 jours de l'adjudication), et s'ils estiment que le prix est insuffisant, faire "surenchère" c'est à dire demander une nouvelle vente avec une mise à prix majorée (de 10%), étant précisé qu'à défaut d'enchères supérieures, ils sont réputés adjudicataires.

Si l'adjudicataire ne peut payer le prix, l'immeuble est remis en vente suivant une procédure dite de réitération d'enchère (dénommée anciennement "folle enchère").

A l'issue de l'adjudication le prix doit être libéré dans les 2 mois, est consigné et réparti suivant une procédure particulière qui prend en considération les "déclarations de créance" que les créanciers ont versé à la procédure (le terme de déclaration de créance ne décrit pas la même procédure qu'en procédure collective).

Le jugement d'adjudication confère à l'adjudicataire un titre d'expulsion du saisi. L322-13 du code des procédures civiles d'exécution

En procédure collective:

Généralités et procédure de saisie

En procédure collective, la saisie ne se déroule qu'en liquidation judiciaire qui est la seule des procédures collectives organisant la vente forcée des actifs du débiteur. En effet en sauvegarde la vente forcée des actifs n'existe pas et en redressement judiciaire c'est le cas échéant la vente de l'entreprise qui sera ordonnée mais a priori pas la vente d'un actif isolé.

Le sort des saisies en cours au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective:

Que ce soit en sauvegarde, en redressement judiciaire ou en liquidation judiciaire, les saisies en cours à l'initiative des créanciers sont interrompues par le seul effet du jugement d'ouverture de la procédure, en application de la règle de suspension des poursuites qui prive les créanciers de leurs droits d'action. Concrètement la vente ne peut avoir lieu.

La notion de saisie "en cours" est applicable tant que l'adjudication définitive de l'immeuble n'est pas survenue (Cass com 4 mars 2014 n°13.17216 et n°13-10534): le clivage se produira en fonction d'une question: la propriété de l'immeuble est-elle définitivement transférée ou pas au jour du jugement d'ouverture de a procédure collective: dans la négative, la saisie immobilière est interrompue.

Cette solution s'applique y compris dans des cas où l'adjudication a bien eu lieu, mais où une déclaration de surenchère produit un effet résolutoire sur le transfert de propriété au premier adjudicataire

Ainsi du premier acte, c’est-à-dire la délivrance du commandement, jusqu’au dernier, c’est-à-dire l’adjudication « définitive », c’est-à-dire le cas échéant après surenchère (Cass com 4 mars 2014 n°13-10534), la saisie en cours est interrompue par le jugement d’ouverture de la procédure collective.

Par contre s'il est jugé qu'une adjudication définitive mais non encore publiée au jour du jugement est "inopposable" au liquidateur, reste que seule la distribution du prix échappera au droit commun pour être dévolue au liquidateur (Cass com 11 février 2014 n°12-19722) puisque le bien est sorti du patrimoine du saisi (Cass com 22 janvier 2002 n°97-17430). Cependant l'article L622-30 du code de commerce, qui organise l'arrêt des inscriptions après l'ouverture de la procédure collective ménage une exception pour les actes translatifs et décisions judiciaires translatives ayant date certaine, ce qui est évidemment le cas du jugement d'adjudication, et offre donc une porte de sortie pour régulariser la situation puisque le jugement d'adjudication pourra être publié après le jugement d'ouverture (alinéa 1)

En tout état relativement à la distribution du prix l’article L. 622-21 dispose que « le jugement d’ouverture de la procédure collective arrête et interdit toute procédure de distribution n’ayant pas produit un effet attributif ».

Par la suite, dès lors que la saisie en cours ne peut être poursuivie, a priori que ce soit en sauvegarde ou en redressement judiciaire, l'immeuble ne sera pas vendu (tout au moins dans les formes de la saisie, il pourra cependant être vendu avec "l'entreprise" ou en cession d'actif en période d'observation) si l'entreprise peut proposer un plan et n'est pas par la suite l'objet d'une liquidation judiciaire

Par contre en liquidation judiciaire il est assez rare que la vente de l'immeuble pour lequel la saisie immobilière a été arrêtée, puisse être évitée, sauf évidement si le liquidateur dispose par ailleurs des sommes nécessaires au règlement du passif, c'est à dire de tous les créanciers.

Parfois les débiteurs se hâtent de demander le prononcé d'une liquidation judiciaire en pensant faire échec à une saisie immobilière : si la liquidation judiciaire est justifiée et est prononcée, ils parviennent effectivement à ce résultat. Pour autant le même bien est généralement vendu quelques mois plus tard par le liquidateur.

S'il advient que le liquidateur doive vendre l'immeuble, il aura plusieurs possibilités: la reprise de la saisie qui a été interrompue par le jugement de liquidation, ou initier lui même depuis le début un nouveau processus de vente, par une nouvelle saisie ou de gré à gré (c'est à dire une vente à un candidat qui présente une offre et pour lequel le juge commissaire a rendu une ordonnance autorisant la vente)

La reprise d'une saisie en cours (improprement subrogation)

La Cour de Cassation juge que la saisie en cours au jour du jugement d'ouverture est "suspendue", de sorte que les actes effectués antérieurement restent valable Cass com 8 mars 2023 n°21-18722 

Il en découle que la saisie pourra éventuellement par la suite être reprise a minima (en liquidation seulement, voir ci dessus) par le liquidateur (le texte emploie improprement le terme de subrogation). 

Dans ce cas, le liquidateur sera autorisé par le juge commissaire à reprendre la saisie là où elle s'était arrêtée. Ce processus, organisé par les articles L642-18 alinéa 2 et R 642-24 permet au liquidateur de bénéficier des actes déjà effectués (mais curieusement l'article R642-24 précise que le juge commissaire fixe la mise à prix et les modalités de publicité et de visite, ce qui est parfois incompatible avec l'avancement de la saisie .. mais la Cour de Cassation confirme cette exigence, et précise même que si le juge commissaire a omis ces précisions et n'a fait qu'autoriser le liquidateur à reprendre la saisie en cours, la Cour, saisie d'un appel, doit, par l'effet dévolutif, statuer sur ces mentions Cass com 11 avril 2018 n°16-23607

Concrètement le liquidateur, autorisé par le juge-commissaire (il faut toujours une ordonnance) après convocation du liquidateur, du débiteur (et de son conjoint en cas de bien commun) et avis des contrôleurs, , va reprendre la saisie là où elle était interrompue, et la mener à bien selon les règles applicables à la saisie en liquidation judiciaire.

  • L’article R. 642-24-alinéa 1er prévoit que les frais engagés sont privilégiés.
  • Le commandement peut être prorogé par décision du Juge de l'exécution le temps que le juge- commissaire donne son autorisation de « subrogation ».

En réalité l’intérêt de cette « subrogation » va dépendre de l’état d’avancement de la saisie interrompue et des conditions de la saisie.

Le liquidateur a une option qu’il exerce discrétionnairement :

  • il peut préférer ne pas poursuivre la saisie et en recommencer une nouvelle dont il maîtrisera la mise à prix (ou tout au moins dont il proposera la mise à prix qu’il estime adaptée au juge commissaire) et les conditions de la vente, particulièrement si la saisie est à peine commencée ;
  • il trouvera en revanche avantage à poursuivre la saisie si on est à la veille de l’audience d’adjudication et si les conditions lui semblent correctes (dans ce cas les  frais du poursuivant seront privilégiés).

Une nouvelle saisie initiée (en principe) par le liquidateur

La "subrogation" n'est qu'une faculté, et le liquidateur peut préférer initier une nouvelle saisie dont le juge commissaire fixera toutes les conditions.

Les textes de référence sont les articles L642-18 et suivants et R642-22 et suivants.

En liquidation judiciaire, si la vente de l'immeuble est nécessaire au paiement des créanciers, à défaut de proposition d'acquisition "de gré à gré" à un prix et dans des conditions acceptées par le juge commissaire, la loi dispose que par principe les biens immobiliers du débiteur sont vendus dans les formes de la saisie immobilière (ou sur adjudication amiable, c'est à dire enchères par devant notaire, ce qui est peu pratiqué).

Evidemment l'interférence entre la procédure de saisie immobilière de droit commun et le droit des procédures collectives va entraîner quelques particularités, et notamment:

- la suspension des poursuites qui affecte les droits des créanciers et le fait qu'ils sont représentés par le liquidateur donne à ce dernier qualité pour agir. C'est donc en principe le liquidateur qui va engager la procédure, et en principe les créanciers ne le peuvent pas (on ne parle pas ici de l'insaisissabilité qui complique considérablement les choses)

Les créanciers ne peuvent plus poursuivre des voies d'exécution, ni en engager de nouvelles (dans certaines conditions extrêmes cependant les créanciers inscrits sur l'immeuble (ou titulaires d'un privilège spécial, ce qui, selon certains peut inclure le syndicat de copropriété) pourront engager la saisie mais au bénéfice de la liquidation et pas à leur seul bénéfice, les autres créanciers ne pouvant saisir l'immeuble L643-2 du code de commerce)

- le liquidateur devra obtenir une ordonnance du juge commissaire, après audience à laquelle sera appelé le débiteur - et le cas échéant son conjoint commun en biens - (pour plus de précisions voir la cession des biens).

L'ordonnance du juge commissaire décidera des conditions de la vente, de la mise à prix, des publicités à effectuer. L'article R642-22 dispose en effet :

Le juge-commissaire qui ordonne, en application de l'article L. 642-18, la vente des immeubles par voie d'adjudication judiciaire ou amiable détermine :

1° La mise à prix de chacun des biens à vendre et les conditions essentielles de la vente ;

2° Les modalités de la publicité compte tenu de la valeur, de la nature et de la situation des biens ;

3° Les modalités de visite des biens.

Lorsque la vente est poursuivie par un créancier, en application de l'article L. 643-2, la mise à prix est déterminée en accord avec le créancier poursuivant.

Le juge-commissaire peut préciser qu'à défaut d'enchères atteignant cette mise à prix la vente pourra se faire sur une mise à prix inférieure qu'il fixe.

L'ordonnance du juge commissaire se substitue ainsi au commandement du droit commun, doit contenir les mêmes mentions et être transcrite à la conservation des hypothèques de la même manière.

- Durant la procédure de saisie, la demande de vente amiable n'est pas possible par différence au droit commun : la loi évite ainsi que le juge de l'exécution puisse modifier en quoi que ce soit l'ordonnance du juge commissaire devenue définitive.

Le liquidateur fait donc rédiger le cahier des conditions de la vente conforme à l'ordonnance du juge commissaire, le dépose et avise les créanciers inscrits et le cas échéant le conjoint commun en biens de ce dépôt et de la date de l'audience d'adjudication (c'est à dire de vente aux enchères).

- ce qu'on appelle en droit commun l'audience d'orientation, n'existe donc pas en liquidation judiciaire

- Le prix devra être payé au liquidateur qui assurera sa répartition conformément à l'état des créances et l'état de collocation qu'il dressera.

A priori tous les biens ont vocation à être vendus, dans la limite de ce qui sera nécessaire pour régler l'intégralité du passif, à l'exception des biens faisant l'objet d'une clause d'insaisissabilité pour lesquels un débat existe en droit, mais qui, par principe ne peuvent être vendus par le liquidateur (voir le mot clause d'insaisissabilité)

L'emprise de la saisie

La limite de l'intérêt des créanciers

Le liquidateur trouve son intérêt à agir dans l’incarnation de l’intérêt des créanciers.

Le principe est posé par l’article L. 622-20 du Code de commerce « le mandataire judiciaire a seul qualité pour agir au nom et dans l’intérêt collectif des créanciers » auquel renvoie, pour la liquidation judiciaire, l’article L. 641-4 du Code de commerce.

Le liquidateur serait mal fondé à mener une action sans intérêt pour les créanciers, et ne peut donc, en droit, réaliser plus d’actif que nécessaire pour solder le passif.

Concrètement le liquidateur n’a pas intérêt, au sens de l’article 31 du Code de procédure civile, c’est-à-dire intérêt légitime et juridiquement protégé, à rechercher la vente d’un actif du débiteur si par ailleurs il a pu payer intégralement les créanciers ou s’il dispose des fonds nécessaires. Informé de cette circonstance, le juge-commissaire ne doit pas autoriser le liquidateur à rechercher une vente inutile.

D’ailleurs l’article L. 643-9 alinéa 2 du Code de commerce dispose que la procédure doit être clôturée lorsque le liquidateur détient de sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers.

Pour autant, encore faut-il que le juge-commissaire soit valablement saisi de ce moyen de droit au moment où il est amené à statuer sur une demande de vente d’immeuble.

En effet, si le juge-commissaire ordonne la vente d’un actif sans objection du débiteur, et si son ordonnance devient définitive, le liquidateur devra — et non pas pourra — l’exécuter, même si la vente est inutile au paiement des créanciers.

Il existe ici sans doute une infime place pour envisager la recherche de la responsabilité du liquidateur qui aurait présenté requête pour être autorisé à procéder à une réalisation superflue, mais la recherche de la responsabilité de celui qui exécute  une décision de justice est pour le moins malaisée, outre le fait que le débiteur lui- même, sans doute demandeur à l’action en responsabilité, serait l’auteur de son propre préjudice en ne s’étant pas opposé à la demande en temps utile. En bref, on voit mal que l’action aboutisse.

En tout état, la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser que le juge- commissaire ne commet pas d’excès de pouvoir en ordonnant une vente « inutile », dès lors que la procédure collective n’est pas clôturée Cass com 3 novembre 2009 n°07-14993

Cette décision est parfaitement logique dès lors que le débat a été porté par les parties sur la question du « pouvoir » du juge-commissaire : tant qu’il est en fonction, il est de son pouvoir d’ordonner une vente.

Il est en revanche probable qu’en l’espèce le recours aurait pu prospérer si au lieu  de l’excès de pouvoir, c’est la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir du liquidateur, manifeste en l’espèce, qui avait été invoqué (article 122 du CPC). Et sans doute la vente aurait été évitée.

Et en tout état, correctement invoqué, ce défaut d’intérêt doit paralyser une saisie inutile aux créanciers, et le liquidateur ne peut vendre un bien s’il dispose déjà des fonds nécessaires au règlement des créanciers.

Le "délaissement" du bien par le liquidateur

Le liquidateur a vocation à réaliser l’entier patrimoine du débiteur jusqu’à complet désintéressement des créanciers. Cependant les textes ne lui impartissent pas de délai.

Pour autant la liquidation judiciaire doit prendre fin quand elle ne se justifie plus et le liquidateur ne peut valablement maintenir les opérations par exemple dans la perspective de recueillir des biens à venir. Voir le mot liquidation judiciaire durée sur cette question.

Pour autant et tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée le liquidateur est en fonction et fondé à agir.  

Cependant la Cour de cassation vient d’ouvrir une brèche, certes à propos d’une liquidation des biens régie par la loi du 13 juillet 1967, mais la solution semble parfaitement transposable au texte actuel.

En l’espèce le débiteur fait l’objet d’une liquidation en 1985, il vend seul un immeuble en 1995 et est assigné en inopposabilité de la vente en 2008 par le syndic. Le débiteur soutient devant la cour d’appel que l’absence de diligence du syndic pendant 23 ans est révélatrice d’une « tacite renonciation » à poursuivre la vente de l’immeuble. La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel qui n’a pas répondu à ce moyen, sans doute sur fond de raccourcissement des délais de prescription, la loi du 18 juin 2008 entrant « complètement » en puissance quelques jours plus tard. Cass com 4 juin 2013 n°11-23647

Tout en étant attentif à l’arrêt de renvoi à intervenir (cour d’appel de Nîmes) on ne peut qu’être très circonspect sur la question : en première analyse envisager que le délaissement par le liquidateur donne droit au débiteur de réaliser le bien ne semble  pas acceptable, et en pareille situation on pourrait, sous l’empire des textes actuels, renvoyer le débiteur à solliciter la clôture de la procédure, laquelle sera prononcé si le Tribunal estime que les conditions sont réunies.

Mais, le fait est que l’existence d’un bien, même s’il est de très faible valeur (Cass com 5 mars 2002 n°98-22646) (tout  au moins jusqu’à l’entrée en vigueur de l’ordonnance 2014-326 du 12 mars 2014 qui a modifié, par un texte d’application immédiate, l’article L. 643-9), est un obstacle à la clôture, et en outre, comme indiqué ci-dessus, le débiteur a précisément agi en croyant que la clôture était rendue.

L’arrêt du 4 juin 2013 ouvre peut-être la porte à la validité de l’acte, et reportera  sans doute alors la question sur le sort du prix et la responsabilité du notaire.

En présence de créancier inscrit sur l’immeuble venant en premier rang sur le prix, on peut penser que, mis à part les frais de justice (honoraires du liquidateur notamment), le liquidateur et le notaire auraient effectué la même répartition : le préjudice est inexistant pour la liquidation judiciaire puisque le même créancier aurait été payé de la même manière.

À l’inverse, la situation serait différente dans deux situations :

  • en l’absence de créancier inscrit sur l’immeuble : le notaire aura remis le prix au débiteur, en méconnaissance des droits des autres créanciers ;
  • en présence de créancier inscrit sur l’immeuble, primé par le superprivilège des salaires et le privilège des salaires : le notaire aura payé le créancier inscrit alors que le liquidateur aurait payé l’AGS subrogée dans les droits des salariés. Le superprivilège et le privilège des salaires présentent en effet la particularité « piégeuse » d’être parmi les rares privilèges généraux, portant à ce titre sur les immeubles. Plus « dangereux » encore : ces privilèges sont « occultes » puisque non publiés.
 

Dans ces deux cas, à l’évidence, l’entorse faite au droit de la liquidation est préjudiciable aux créanciers et les responsabilités des intervenants seront à examiner.

Ainsi suivant comment la Cour de renvoi et la jurisprudence en général aborderont la question, le délaissement prolongé du bien par les organes de la liquidation pourrait justifier la « sortie » du bien de l’emprise de la procédure collective.

 
   

 

 
   

Une telle solution, a priori éloignée de la règle de droit, serait hélas parfaitement compréhensibles en équité, dans une situation il est vrai extrême.

   

L'insaisissabilité

Voir le mot insaisissabilité

Les biens reçus en succession

Voir le mot succession

Le calendrier de la saisie en liquidation

Comme en droit commun, la publication de l’ordonnance du juge-commissaire déclenche l’enchaînement des formalités :

- deux mois pour le dépôt du cahier des conditions de la vente ;

- 5 jours ouvrables après ce dépôt pour l’avis de la date de l’audience d’adjudication donné aux créanciers inscrits et au conjoint du débiteur.

Ce délai de 5 jours doit être respecté sous peine de voir le juge de l’exécution déclarer non avenue l’ordonnance du juge-commissaire, sauf motif légitime (R642-29-1)

On ne sait pas trop quel motif peut être légitime à ce stade, mais on ne sait pas trop non plus ce qui s’opposerait au respect de ce délai.

- L’audience d’adjudication est fixée entre 2 et 4 mois de l’avis aux créanciers  inscrits et au conjoint du débiteur.

Tout cela semble bien s’enchaîner. Pourtant un souci peut provenir de la double nécessité

- de publier l’ordonnance du juge-commissaire dans les mêmes délais que le commandement, soit dans les deux mois de sa date ;

- et de fixer l’audience d’adjudication entre 2 et 4 mois de l’avis aux créanciers inscrits c’est-à-dire concrètement 2 mois et 5 jours après la publication de  l’ordonnance du juge-commissaire.

L’audience d’adjudication doit donc intervenir au maximum 6 mois et 5 jours après la publication de l’ordonnance du juge-commissaire.

Ces deux délais doivent eux aussi être respectés sous peine de voir l’ordonnance du juge-commissaire non avenue, et là encore sauf motif légitime (R642-29-1).

Ordonnance du juge commissaire et voies de recours

Le premier acte qui conduira à la saisie de l'immeuble est l'ordonnance du juge commissaire.

La loi (article R642-36-1 du code de commerce) dispose que le juge commissaire statue après avoir entendu ou appelé (le juge statue même s'ils ne se déplacent pas) le débiteur, son conjoint commun en bien (c'est à dire marié sous un régime communautaire) si l'immeuble est commun, et le liquidateur.

Le juge commissaire peut le cas échéant écarter une proposition de vente dite de gré à gré, c'est à dire à un candidat qui aurait adressé une offre.

L'ordonnance du juge commissaire fixe les conditions dans lesquelles se déroulera la saisie, c'est à dire la vente aux enchères de l'immeuble: mise à prix et éventuelle faculté de baisse de mise à prix, conditions de publicité de la vente, conditions de visite ...

L'ordonnance du juge commissaire est notifiée par le greffe, par courrier recommandé avec accusé de réception, au débiteur et aux créanciers inscrits sur l'immeuble (créancier hypothécaires).

L'ordonnance peut faire l'objet d'un appel (article R642-37-1 du code de commerce) dans les 10 jours de cette notification. Pour plus de précisions voir voies de recours

Le terme "'appel" permet de penser que seules les parties - ici le débiteur - peut exercer un recours (et le débiteur qui n'aura pas exercé ce recours ne pourra soulever un incident de saisie immobilière comme il l'aurait fait en droit commun Cass com 11 octobre 2016 n°14-22796) , mais la Cour de Cassation entend manifestement plus largement la possibilité de recours, et admet "l'appel" des tiers intéressés (voir le mot voies de recours qui détaille les arguments contre cette solution et les arrêts rendus qui la retiennent)

L'ordonnance devenue définitive se substitue au commandement de droit commun (l'article R321-20 du code des procédures civiles d'exécution dispose que le commandement cesse de produire ses effets si dans les deux ans de sa publication il n'est pas mentionné en marge de cette publication un jugement constatant la saisie - c'est à dire un jugement d'adjudication - et la Cour de Cassation est d'avis que la péremption s'applique de la même manière à l'ordonnance du juge commissaire qui n'aurait pas donné lieu, dans les deux ans, à la même mention en marge, ce délai pouvant être prorogé par le juge de l'exécution Cass avis 15009 du 18 avril 2018 sur Q 18-70005

Formalités préparatrices de la vente:

L'ordonnance du juge commissaire doit être publiée à la conservation des hypothèques dans les 2 mois de sa date.

A partir de cette formalités, la saisie quitte la compétence du juge commissaire pour entrer dans celle du juge naturel de la saisie immobilière: le juge de l'exécution (JEX)

Le liquidateur rédige le "cahier des conditions de la vente" qui comporte toutes les indications qui seront nécessaires pour renseigner les enchérisseurs éventuels sur l'immeuble acquis et les particularités de la procédure.

Ce document doit être déposé au greffe du juge de l'exécution dans les 2 mois de la publication de l'ordonnance du juge commissaire.

Dans les 5 jours ouvrables qui suivent ce dépôt, le liquidateur fait aviser par huissier le conjoint commun en biens du débiteur (en cas d'immeuble commun) et les créanciers inscrits. L'avis contient d'une part l'information du dépôt au greffe du cahier des conditions de la vente et d'autre part la date de l'audience d'adjudication ( à laquelle l'immeuble sera vendu).

Les éventuelles contestations des créanciers inscrits ou du conjoint, qui ne peuvent concerner que des actes postérieurs à l'ordonnance du juge commissaire, sont formées par avocat, et déposées au greffe du juge de l'exécution dans les 15 jours de l'avis d'huissier.

Le juge de l'exécution tiendra alors une audience pour statuer sur ces contestations, sa décision pouvant faire l'objet d'un appel, sans que cela soit suspensif (la saisie peut être poursuivie)

L'audience d'adjudication doit se tenir entre 2 et 4 mois de l'avis, c'est à dire si on met bout à bout les formalités, au maximum 6 mois et 5 jours après la publication de l'ordonnance du juge commissaire (la Cour de Cassation a eu l'occasion de préciser en outre que l'ordonnance du juge commissaire était caduque si un jugement constatant la vente n'était pas transcrit en marge de la publication de l'ordonnance dans les deux ans (délai de l'article R321-20 du code des procédures civiles d'exécution), l'ordonnance suivant exactement le sort du commandement de saisie Cass avis 18 avril 2018 n°18-70005

L'adjudication et ses suites:

La phase d’adjudication est plus classique, mis à part le fait que le liquidateur, poursuivant, ne peut être déclaré adjudicataire ni personnellement (la loi le lui interdit) ni ès qualité, y compris en cas de carence (évidemment).

Les éventuelles facultés de baisse de mise à prix par le juge commissaire seront prises en considération avec

- les avantages d’éviter d’avoir à revenir au point de départ, c’est-à-dire à une nouvelle requête au juge commissaire, en cas de carence d’offre,

- les inconvénients d’amener les candidats à attendre que la baisse soit effective pour se porter enchérisseurs, et donc, de fait, à organiser la vente sur une mise à prix nécessairement baissée par rapport à celle décidée par le juge commissaire.

Le jugement d'adjudication est rendu au profit du meilleur enchérisseur.

Il n'est dérogé au droit commun ni en matière de surenchère, ni de préemption, ni en matière de réitération des enchères.

Le jugement d'adjudication doit être publié dans les 2 mois de sa date ou dans les deux mois de sa confirmation en cas d’appel (R643-3) 

Ceci dit la jurisprudence considère que le débiteur est irrecevable à former un recours, en raison de l’autorité de l’ordonnance du juge-commissaire qui décidément bloque toutes les initiatives du débiteur (Cass com 19 janvier 1999 n°95-20493)  (et en tout état dans les deux ans à défaut de quoi l'ordonnance du juge commissaire cesse de produire ses effets et est frappée de péremption Cass com avis du 18 avril 2018 n°15009

Le prix et les intérêts au taux légal à compter du jour où la vente est définitive doit être payé au liquidateur dans les 3 mois du jugement d'adjudication par dérogation au droit commun, le paiement du prix intervient entre les mains du liquidateur, puisque c’est lui qui règlera l’ordre entre les créanciers (R643-3) 

Ce paiement doit inclure les intérêts au taux légal à compter du jour où la vente est devenue définitive (ce qui déroge au droit commun qui ne prévoit pas le règlement d’intérêt si ce n’est pas mentionné au cahier des conditions de la vente).

Sauf surenchère ( un créancier inscrit peut considérer que le prix est insuffisant et exercer son droit de surenchère, le bien est alors remis en vente) ou réïtération de la vente (si l'adjudicataire ne peut pas payer le prix et les intérêts dans le délai, le bien est remis en vente, procédure anciennement dénommée folle enchère), on "rebascule" dans le droit de la liquidation judiciaire à partir du paiement du prix entre les mains du liquidateur.

Cependant l’article L. 642-18 du Code de commerce précise que l’adjudication emporte purge ce qui est heureux, mais ne dispensera évidemment pas le liquidateur, après paiement du prix, de rechercher les radiations amiables ou judiciaires des inscriptions (et ici devant le juge de l’exécution).

Quand la vérification des créances le permettra, c'est à dire quand les créances seront connues, le liquidateur établira un "état de collocation" (article R643-6 du code de commerce, c'est le document décrivant le projet de répartition du prix entre les créanciers) qui est déposé au greffe du tribunal de la liquidation judiciaire et publié au BODACC.

Cet état de collocation peut faire l'objet de recours dans les 30 jours de sa publication au BODACC, devant le juge de l'exécution.

En l'absence de recours, le liquidateur dépose un procès verbal de clôture de l'ordre (article R643-7 du code de commerce) et paye les créanciers.

Pour entrer plus dans le détail

Le liquidateur répartira le prix en fonction de l’ordre des créanciers sur l’état des créances établi dans le cadre de la procédure collective (L642-18) et des créanciers de la procédure collective elle-même (frais de justice et créances postérieures). Ainsi :

  • Contrairement au droit commun de la saisie les créanciers inscrits n’ont pas à déclarer leur créance au sens du droit de la saisie immobilière, dans les deux mois de la dénonciation du commandement, ni à compter de quelque autre acte, puisqu’ils auront déclaré créance au sens des règles de la procédure collective(le terme employé par les deux corps de texte est le même).
  • Il n’est pas ici question de paiement provisionnel du créancier de premier rang tel qu’il est organisé par le droit commun. La procédure collective organise ses propres possibilités de paiements provisionnels sous le contrôle du juge-commissaire (L643-3) qui peuvent satisfaire tous les besoins en l’espèce, et notamment ceux de mettre un terme au cours des intérêts en effectuant des paiements aux créanciers concernés.
  • L’ordre des créanciers tel qu’il s’appliquerait en droit commun est affecté par :
  • – L’existence du super privilège des salariés, qui comme déjà indiqué garantit les 60 derniers jours de salaires, les préavis et congés dus aux salariés. Comme son nom l’indique, ce privilège passe avant tous les autres en ce compris les privilèges spéciaux et notamment l’hypothèque, et c’est, avec le privilège des salariés, un des rares privilèges généraux existants, qui porte donc également sur les immeubles (et prime les privilèges spéciaux en application de l’article 2376 du Code civil)

Ces créances des salariés, dans les droits desquels l’AGS est subrogé, seront donc payées avant les créanciers hypothécaires.

  • – Les éventuels frais de justice inhérents à la procédure collective.

Matériellement le liquidateur établit un état de collocation (R643-6) qui est déposé au greffe du tribunal de la procédure collective et publié au BODACC.

Les  recours  éventuels  doivent  être  formés  dans  les  30 jours  de  l’insertion au BODACC et sont de la compétence du JEX (R643-11)

En l’absence de recours, le liquidateur dépose au greffe du tribunal de la procédure collective un procès-verbal de clôture de l’ordre et paye les créanciers R643-7

Le cas particulier du recours contre l'ordonnance du juge commissaire, et les conséquences sur le calendrier

Pour l’essentiel, le calendrier, calqué sur celui du droit commun, est organisé par l’article R. 642-29-1 du Code de commerce.

Comme pour le commandement, l’ordonnance doit être publiée, même si c’est moins utile qu’en droit commun où la publication rend l’immeuble indisponible.

En effet en liquidation judiciaire l’immeuble ne pourra de toute façon pas être valablement vendu sans le respect de la procédure ad hoc en raison du dessaisissement du débiteur et l'acte éventuellement passé est inopposable à la liquidation judiciaire (voir dessaisissement pour plus de précisions)

Sauf des cas particuliers très marginaux, la publicité du jugement d’ouverture de la procédure collective est suffisamment accessible pour éviter des ventes passées en violation des règles de la liquidation et protéger ainsi la responsabilité des notaires : le site BODACC.fr permet maintenant des recherches fiables, et seules les procédures relativement anciennes, concernant des personnes qui ne sont pas immatriculées au registre du commerce, présentent de réels risques dans ce domaine.

En tout état, comme pour le commandement, la publication de l’ordonnance cesse de produire ses effets faute d’adjudication dans les 3 ans ou de jugement prolongeant ce délai.

Comme en droit commun, la publication de l’ordonnance du juge-commissaire déclenche l’enchaînement des formalités :

  • deux mois pour le dépôt du cahier des conditions de la vente ;
  • 5 jours ouvrables après ce dépôt pour l’avis de la date de l’audience d’adjudication donné aux créanciers inscrits et au conjoint du débiteur.

Ce délai de 5 jours doit être respecté sous peine de voir le juge de l’exécution déclarer non avenue l’ordonnance du juge-commissaire, sauf motif légitime25.

On ne sait pas trop quel motif peut être légitime à ce stade, mais on ne sait pas trop non plus ce qui s’opposerait au respect de ce délai.

  • L’audience d’adjudication est fixée entre 2 et 4 mois de l’avis aux créanciers  inscrits et au conjoint du débiteur.

Tout cela semble bien s’enchaîner.

Pourtant un souci peut provenir de la double nécessité :

- de publier l’ordonnance du juge-commissaire dans les mêmes délais que le commandement, soit dans les deux mois de sa date ;

 - et de fixer l’audience d’adjudication entre 2 et 4 mois de l’avis aux créanciers inscrits c’est-à-dire concrètement 2 mois et 5 jours après la publication de  l’ordonnance du juge-commissaire.

L’audience d’adjudication doit donc intervenir au maximum 6 mois et 5 jours après la publication de l’ordonnance du juge-commissaire.

Ces deux délais doivent eux aussi être respectés sous peine de voir l’ordonnance du juge-commissaire non avenue, et là encore sauf motif légitime (R642-29-1)

- Exposé du problème : l’effet du recours contre l’ordonnance du juge-commissaire.

Que se passe-t-il en cas de recours contre l’ordonnance du juge-commissaire ? Le problème est plus préoccupant encore depuis le décret de février 2009.

En effet, antérieurement à ce texte, le recours contre l’ordonnance du juge- commissaire était porté devant le tribunal, donc évacué assez rapidement.

Depuis, l’article R. 642-37-1 du Code de commerce dispose que le recours est formé devant la cour d’appel, ce qui implique un calendrier plus long, même s’il est vrai que les juridictions font généralement beaucoup d’efforts pour statuer rapidement.

La lettre du texte est en tout état potentiellement problématique à respecter quand il y a un recours contre l’ordonnance du juge-commissaire.

- Solutions proposées :

Trois voies semblent possibles pour pallier cette difficulté de calendrier :

Solution 1 — La plus expéditive qui ne satisfait personne : les décisions rendues en matière de procédure collective sont exécutoires de plein droit (R661-1 du code de commerce) : on peut vendre malgré un recours. En outre faute de texte, l’exécution provisoire ne peut être arrêtée (Cass com 1er Octobre 2013 n°12-23999) ou plus exactement ne peut être arrêtée à notre avis que sur ordonnance du premier Président (voir le mot exécution provisoire sur ce débat)

L’argument est cependant envisageable, mais évidemment c’est  assez  théorique pour des questions de responsabilité des différents intervenants et notamment du liquidateur qui prendrait le risque de voir l’ordonnance du juge-commissaire invalidée après une vente devenue irréversible.

Deux autres solutions moins exposées :

Solution 2 — Soutenir devant le juge de l’exécution que le recours contre l’ordonnance constitue un motif légitime de dépassement du délai, puisque l’article R. 642-29-1 l’envisage. C’est tout à fait défendable.

Solution 3 — Soutenir qu’en cas de recours, ce n’est pas l’ordonnance du juge- commissaire qui doit être publiée, mais l’arrêt de la cour d’appel, ou plus exactement en pratique l’ordonnance du juge-commissaire confirmée par la cour d’appel puisqu’évidemment si l’immeuble est vendu c’est que la cour d’appel a confirmé l’ordonnance.

C’est sans doute l’esprit du texte, même si sa lettre évoque simplement la  publication de l’ordonnance.

Évidemment cette position peut paraître assez théorique quand on connaît le formalisme des démarches aux services de la publicité foncière, attentifs à publier, à la lettre du texte, une « ordonnance du juge-commissaire ».

C’est en tout cas la solution qu’envisagent les auteurs.

C’est également ce qu’avait jugé la Cour de cassation avant le décret de 2009. Deux arrêts :

Ceci dit, cette imperfection de coordination n’a pas encore été tranchée en jurisprudence depuis le décret de février 2009 et il n’y a donc pas de solution certaine à proposer.

Différences avec la procédure de droit commun

L'ordonnance du juge commissaire se substitue au commandement de saisie

L’ordonnance du juge-commissaire se substitue au commandement dont elle contient toutes les indications et est publiée dans les mêmes conditions (la seule particularité est que d’éventuels commandements antérieurs cessent de produire effet). R642-23

Le juge de l'exécution ne peut faire droit à une demande de vente amiable

Faute d’être recevable à demander au juge de l’exécution (par ailleurs incompétent) de modifier la décision du juge-commissaire, le débiteur ne pourra pas solliciter la vente amiable en cours de saisie

L’ordonnance du juge-commissaire une fois définitive bloque toutes les initiatives du débiteur (Cass com 19 janvier 1999 n°95-20493 Cass com 11 avril 1995 n°92-12254

Il n'y a pas d'audience d'orientation

L’audience d’orientation, jugée inutile, est en conséquence supprimée (R642-29-1) (jusqu’au  décret du 12 février 2009 cette audience était maintenue bien que vidée de sa  substance puisque le débiteur ne pouvait rien y demander).

Ainsi, le texte (R642-29-1) prévoit un cheminement procédural plus simple : le liquidateur dépose le cahier des conditions de la vente au greffe du juge de l’exécution, ce document n’ayant rien de particulier par rapport au droit commun si ce n’est évidemment qu’il vise l’ordonnance du juge-commissaire au lieu de commandement.

Le conjoint du débiteur (évidemment en cas de vente d’un bien commun) et les créanciers inscrits sont avisés par acte d’huissier, à la demande du liquidateur, de la  date de l’audience d’adjudication.

Cet avis contient ou vaut (le texte emploie successivement les deux termes) sommation  de  prendre  communication  du  cahier  des  conditions  de  la  vente,   et l’indication que les seules contestations recevables sont celles relatives à des actes postérieurs à l’ordonnance du juge-commissaire (à la vérité on voit mal de quoi il s’agit).

Les éventuelles contestations relatives à un acte postérieur à l’ordonnance du juge- commissaire sont formulées par conclusions d’avocat déposées au greffe du Juge de l’exécution dans les 15 jours de l’avis et ce n’est qu’en cas de contestation que ce juge tiendra une audience. Le texte précise que ces contestations ne suspendent pas le cours de la procédure, pas plus d’ailleurs que l’appel du jugement rendu par le juge de l’exécution.

En pratique ce type d’audience est évidemment rarissime, le juge-commissaire, et le cas échéant la cour d’appel statuant sur recours contre son ordonnance, ayant vidé préalablement toutes les contestations.

L'effet du dessaisissement sur le déroulement de la saisie

Voir le mot dessaisissement

L'idée qui semble dominer est que le débiteur est entendu par le juge commissaire lorsqu'il statue sur la vente de l'immeuble et peut exercer des recours contre son ordonnance.

En suite de l'ordonnance du juge commissaire devenue définitive, l'idée qui semble dominer est que le débiteur perdrait tout ou l'essentiel de son droit propre d'agir Cass com 28 janvier 2004 n°01-13422  Cass com 5 octobre 2010 n°09-16602 Cass com 23 septembre 2014 n°13-20304 qui indique clairement "le débiteur en liquidation des biens que son conjoint, commun en biens, dessaisi par l'effet de l'ouverture ultérieure d'une procédure de liquidation judiciaire, exercent leurs droits propres en formant un recours contre l'ordonnance du juge-commissaire à la liquidation du premier ayant ordonné la vente d'un bien commun aux enchères publiques" ce qui semble limiter le droit propre du débiteur au seul recours contre l'ordonnance du juge commissaire.

Le débiteur ne peut donc, au nom de son droit propre, élever une contestation devant le juge de l'exécution : il est irrecevable Cass civ 2ème 17 novembre 2022 n°21-10819  sauf le cas où il invoquerait devant le juge de l'exécution le caractère abusif des clauses du contrat qui a fondé la créance du poursuivant (l'espèce est dans un cas de poursuite par un créancier bancaire auquel l'insaisissabilité est inopposable, dont les clauses du contrat étaient prétendues abusives) et que le juge commissaire n'aurait pas examiné lors de l'admission de la créance Cass com 8 février 2023 n°21-17763

Il est alors indifférent que le débiteur ait été sommé de prendre connaissance du cahier des conditions de la vente (Cass com 18 janvier 2011 n°09-72961) puisque ses contestations seront irrecevables, qu'il s'agisse d'incidents de la saisie Cass com 18 janvier 2011 n°09-72961 Cass com 11 octobre 2016 n°14-22796  Cass com 31 janvier 2017 n°15-14879 Cass com 21 février 2012 n°10-10457 pour la reprise de la saisie

L’article R. 642-29-1 du Code de commerce n’évoque d’ailleurs pas le débiteur saisi dans les destinataires de l’avis d’avoir à prendre connaissance du cahier des conditions de la vente et il n'est en tout état pas recevable à déposer un dire Cass com 28 janvier 2004 n°01-13422

Cependant sous l'empire de l'ancien texte il avait été jugé que le débiteur était recevable nonobstant le dessaisissement, à rechercher la nullité de la sommation d'en prendre connaissance, devenue maintenant inutile Cass com 17 novembre 2009 n°08-19151 alors qu'à l'inverse il avait été jugé que dès que l'ordonnance du juge commissaire était définitive, le débiteur était dessaisi au profit du liquidateur Cass com 19 janvier 1999 n°95-20493

Il semble a priori raisonnable que les actes qui concernent le débiteur saisi soit destinés au débiteur et non pas au liquidateur : c'est par exemple à notre avis le cas de la dénonciation de surenchère prévue à l'article R322-51 du Code des procédures civiles d'exécution dont l'article R322-52 Indique qu'elle doit être dénoncée au créancier poursuivant, à l'adjudicataire et au débiteur saisi. Il nous semble logique ici que le créancier poursuivant soit assimilé au liquidateur et le "débiteur saisi" au sens du texte soit le débiteur lui même. Cela amène par voie de conséquence (encore que ce ne soit pas forcément une conséquence nécessaire) à envisager que le débiteur ait qualité pour mener une contestation au sens de l'article R311-6 du CPCE, ce qui est une éventualité (mais pas évident), outre la question de l'intérêt à agir (notamment pour contester une surenchère) mais qui se pose dans les mêmes termes pour le liquidateur.

La Cour de Cassation ne s'est pas prononcée, mais a jugé que le débiteur ne pouvait, au nom de son droit propre, relever appel d'une décision statuant sur la péremption du commandement de saisie Cass com 8 mars 2017 n°15-19606 .. mais pour un commandement délivré avant le jugement.

Il nous semble a priori que le liquidateur, au gré de ses diligences, trouve sa qualité pour agir soit dans le monopole de représentation des créanciers, soit dans le dessaisissement du débiteur, et qu'il s'agit ici d'une alternative : le liquidateur n'agit pas au nom de ces deux qualités possibles, contradictoires. Dans la saisie immobilière il agit clairement aux lieu et place du créancier poursuivant, et pas au nom du dessaisissement, la saisie n'étant pas une vente volontaire. Pour cette raison le débiteur garde des prérogatives.

Pour résumer sur le point précis de la surenchère (mais ce n'est qu'un des points) il n'est pas certain que la dénonciation de surenchère doive être adressée au débiteur lui même, mais dans le doute et compte tenu des conséquences (irrecevabilité de la surenchère) les surenchérisseurs seront inspirés de ne pas courir de risque inutile. 

Voir notre étude détaillée

- notre article issu du colloque" la saisie immobilière approches transversales" organisée par le laboratoire de droit privé de la Faculté de Droit de MONTPELLIER (Octobre 2013) : Philippe PERNAUD, intervention sur le thème de la saisie immobilière en procédure collective et plus précisément en liquidation judiciaire. Publication des actes aux éditions Dalloz Octobre 2014.


Saisie sur salaire et AGS

Le mandataire judiciaire auquel la saisie est dénoncée doit évidemment la respecter, et va donc verser au créancier saisissant la part saisissable des sommes allouées par l'AGS, et au salarié la part non saisissable, le tout calculé sur la base d'un barème fixé eu fonction de la rémunération (a priori le total des 12 net ( c'est à dire cotisations déduites, ainsi que prélèvement à la source de l'IR) derniers mois est utilisé comme référence, divisé par 12 pour déterminer la part saisissable mais il est aussi admis, plus simplement, que le salaire du mois concerné par la saisie soit seul utilisé)

La rémunération de référence comprend toute somme due au titre de rémunération, c'est à dire les salaires et accessoires, les indemnités de congé payés, de préavis ou compensatrices de préavis.

Les indemnités de licenciement n'ont pas le caractère de salaires et sont donc exclues du champs d'application de la saisie sur salaires (mais peuvent faire l'objet d'une saisie de droit commun et d'une saisie administrative à tiers détenteur (ex ATD).

(le barème pour les pensions alimentaires est différent de celui des autres créances).

Pour les saisies sur le salaires du débiteur en liquidation judiciaire, voir le mot dessaisissement

Voir également le mot saisie qui détaille les effets de la procédure collective sur les saisies rémunération du débiteur.


Saisine

C'est le fait de "saisir" une juridiction. On dit par exemple que dans certains cas la saisine du juge commissaire relève d'une requète du mandataire judiciaire.


Saisine d'office

Quelques points de la définition

La notion

Saisine d'office et procédures collectives

Disparition de la plupart des cas de saisine d'office pour l'ouverture de la procédure collective

Maintien ou création de certains cas de saisine d'office pour les décisions d'évolution de la procédure déjà ouverte

Les passerelles d'une procédure à l'autre: procédure commune

Saisine d'office pour convertir une sauvegarde en redressement judiciaire en l'absence de plan et en cas de risque de cessation des paiements: supprimée

Saisine d'office en cas de conversion d'une sauvegarde en redressement ou liquidation judiciaires en cas de cessation des paiements avérée

Saisine d'office pour prononcé d'une liquidation judiciaire en cours de redressement judiciaire (y compris en cas de rejet du plan)

Saisine d'office en cas de demande de liquidation, pour prononcé d'un redressement judiciaire

Saisine d'office en cas de demande de redressement judiciaire, pour prononcé d'une liquidation judiciaire

Saisine d'office pour clôture de la liquidation judiciaire

Saisine d'office pour reprise de la liquidation judiciaire: supprimée

Saisine d'office pour le remplacement des mandataires de justice

Saisine d'office par le juge commissaire pour inventaire

Le président peut solliciter le Parquet pour qu'il saisisse le tribunal

Procédure de saisine d'office

La notion

C'est le fait pour une juridiction de "s'auto saisir" c'est à dire d'utiliser les informations qu'elle détient (par son greffe en charge du registre du commerce, par les rapports des mandataires de justice ..) pour déclencher une procédure qui aurait normalement été initiée par assignation ou requête d'une partie.

La saisine d'office et les procédures collectives

En matière de procédure collective, la loi de 2005, plusieurs fois modifiée puis intégrée au code de commerce prévoyait que dans certains cas le tribunal pouvait se saisir d'office, en l'état des informations qu'il pouvait détenir. C'était notamment le cas pour ouvrir une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.

Disparition de la plupart des cas de saisine d'office tendant à l'ouverture d'une procédure ou à des processus similaires

Cependant par une décision du 7 décembre  2012 le Conseil Constitutionnel a considéré que la saisine d'office pour ouvrir une procédure de redressement judiciaire était contraire à la Constitution.  Le Conseil a considéré que le tribunal qui se saisit d'office a déjà une idée pré-conçue de la décision qu'il va rendre, ce qui est contraire au principe de l'impartialité du juge. Plus précisément il est fait reproche au texte qui organise la saisine d'office, considérée comme présentant des avantages pour l'intérêt général en permettant une ouverture rapide d'une procédure collective, de ne pas fixer de garantie légale permettant de s'assurer de l'impartialité du tribunal lorsqu'il statue sur sa propre saisine.

En application de cette décision, et des règles organisant les conséquences des décisions du Conseil Constitutionnel, le texte est abrogé.

La plupart des différents cas de faculté de saisine d'office, notamment pour ouvrir une liquidation judiciaire, ont suivi le même sort, Une première décision du Conseil Constitutionnel du 15 novembre 2013 (2013-352 QPC) a invalidé la saisine d'office dans les dispositions légales applicables en Polynésie Française.

Par la suite, par deux décisions du Conseil Constitutionnel du 7 mars 2014 (2013-368 et 2013-372) la saisine d'office pour prononcer la résolution d'un plan de sauvegarde ou de redressement et la saisine d'office pour prononcer la liquidation judiciaire ont été déclarées inconstitutionnelles.

Progressivement le Conseil Constitutionnel a censuré la plupart des cas de saisine d'office pour l'ouverture d'une procédure, qui ont ainsi progressivement disparu des textes en vigueur, et ce mode de saisine est supprimé dans les dispositions légales applicables à compter du 1er Juillet 2014.

Maintien ou création de certains cas de saisine d'office

Par contre lorsqu'un redressement judiciaire est ouvert et que le Tribunal constate en cours de prériode d'observation qu'il y a lieu de prononcer la liquidation judiciaire (article R631-11 du code de commerce), le Conseil Constitutionnel a considéré qu'il s'agissait de la même instance dont le Tribunal se saisissait d'office, et a donc considéré que cette faculté n'était pas anti constitutionnelle (décision 2014-399 du 6 JUIN 2014).

L'ordonnance du 12 mars 2014 entrée en vigueur pour les procédures ouvertes à compter du 1er juillet 2014 a repris ces évolutions, et n'a maintenu la saisine d'office que dans des cas exceptionnels, dans le courant de la jurisprudence antérieure, et essentiellement pour permettre les évolutions d'une procédure déjà ouverte (dans ce cas le Conseil Constitutionnel considère à juste titre qu'il s'agit de la même procédure qui se poursuit)

Pour schématiser le tribunal ne peut plus se saisir d'office pour ouvrir une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, si c'est l'autre procédure qui lui est exclusivement demandée, et ne peut, dans ce cas, qu'informer le ministère public qui pourra initier l'action (article L631-3-1 applicable à la liquidation), y compris d'ailleurs en cas de demande de sauvegarde non accompagnée d'une demande subsidiaire de redressement judiciaire. 

Les passerelles d'une procédure à l'autre

La procédure est toujours la même: l'article R631-3 doit être respecté voir sur ce point la saisine d'office pour prononcé d'une liquidation judiciaire en cours de procédure, qui décrit la procédure applicable dans les autres cas

- saisine d'office tendant à convertir une procédure de sauvegarde en redressement judiciaire (622-10 alinéa 3) en l'absence de plan, ou si aucun plan n'est possible ou encore si la clôture de la procédure conduit de manière certaine à la cessation des paiements, mais cette faculté est supprimée par l'ordonnance du 26 septembre 2014 (modification de l'article L 621-12)

La liquidation judiciaire peut également être prononcée en cours de période d'observation en cas de rejet du plan, mais cela suppose évidemment le respect de la procédure (voir plus bas) Cass com 20 juin 2018 n°17-13204 17-13206 et 17-13207

- saisine d'office tendant à convertir une procédure de sauvegarde en redressement ou liquidation judiciaire (L622-10 alinéa 2) en cas de cessation des paiements avérée 

- saisine d'office tendant au prononcé de la liquidation judiciaire en cours de période d'observation d'un redressement judiciaire (L631-15 du code de commerce), qui avait été déclarée constitutionnelle (arrêt 2014-399) avec une procédure bien particulière (voir la liquidation judiciaire). Ce processus peut être consécutif au rejet du plan

Voir la procédure

- saisine d'office tendant au prononcé d'un redressement judiciaire alors que c'est une liquidation judiciaire qui avait été sollicitée (L641-1-I alinéa 2 créé par l'ordonnance de 2014),

Cela permet, sur les observations du débiteur d'éviter de prononcer une liquidation dont le tribunal perçoit en cours d'audience qu'elle n'est pas adaptée, ou de rejeter la demande alors que l'état de cessation des paiements est caractérisé mais que la poursuite de l'activité est possible (mais le débiteur est invité à formuler ses observations, et on est en fait entre la saisine d'office et la demande sur l'audience formulée par le débiteur). En tout état il convient alors d'inviter les parties à s'expliquer et de respecter les formalités Cass com 13 mai 2014 n°13-13745

- saisine d'office tendant au prononcé d'une liquidation judiciaire alors que le tribunal est saisi d'une demande de redressement judiciaire (L631-7 al 2 créé par l'ordonnance de 2014)  

(mais le débiteur est invité à formuler ses observations, et on est en fait entre la saisine d'office et la demande sur l'audience formulée par le débiteur)

- saisine d'office tendant à la clôture de la liquidation judiciaire (L643-9 du code de commerce)

- saisine d'office tendant à la reprise de la liquidation judiciaire (L643-13) ... mais cette faculté est supprimée par l'ordonnance du 26 septembre 2014 (modification de l'article L643-13)

Le texte permet également la saisine d'office pour le remplacement ou l'adjonction de professionnels (L621-7 et L 641-1-1).

Le juge commissaire peut également se saisir d'office pour prescrire l'inventaire en sauvegarde si les délais sont dépassés (L622-6-1)

Le président peut solliciter le Parquet pour qu'il saisisse le Tribunal : voir le mot Parquet

La procédure de saisine d'office

Dans les cas où la saisine d'office était possible, et dans le cas où elle le reste, le débiteur est évidemment convoqué par le greffe à une audience (cass com 13.05.2014 P 13-13745) dans les formes de l'article R631-3 du code de commerce. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la saisine d'office (en l'espèce pour conversion d'un redressement judiciaire en liquidation) n'est pas contraire à la constitution (Conseil constitutionnel décision 2014-399 du 6 juin 2014

En cas de saisine d'office, les formes de l'article R631-3 du code de commerce doivent être respectées (Cass com 1er Mars 2016 n°14-21997) " Lorsque le tribunal exerce son pouvoir d'office et à moins que les parties intéressées n'aient été invitées préalablement à présenter leurs observations, le tribunal fait convoquer le débiteur à la diligence du greffier, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à comparaître dans le délai qu'il fixe. A la convocation est jointe une note dans laquelle sont exposés les faits de nature à motiver l'exercice par le tribunal de son pouvoir d'office. Le greffier adresse copie de cette note au ministère public."

Il convient de préciser que le seul fait que l'administrateur judiciaire indique dans son rapport qu'il demandait au tribunal de prononcer la liquidation judiciaire ne vaut pas requête en ce sens: dès lors si, sur ce rapport, le Tribunal prononce néanmoins la liquidation il doit le faire dans les formes de la saisine d'office (avec notamment note jointe à la convocation) Cass com 24 mai 2018 n°16-27296 Il s'agit d'une cassation sans renvoi, nouvelle occasion de confirmer que si la juridiction est irrégulièrement saisie, l'effet dévolutif ne joue pas. De même si l'administrateur judiciaire demande oralement la liquidation en cours d'audience, les formalités de saisine d'office doivent alors être respectées Cass com 20 juin 2018 n°17-13207

Ainsi soit les parties ont été invitées avant l'audience à présenter leurs observations soit le tribunal fait convoquer le débiteur à la diligence du greffe, par courrier recommandé avec accusé de réception, à comparaitre dans le délai qu'il fixe.

Une note émanant du Président du Tribunal est jointe à la convocation pour expliquer les faits de nature à justifier la saisine d'office, et une copie de cette note est adressée au ministère public, le tout sous la sanction de la nullité. Cass com 9 février 2010 n°09-10925

Si l'audience d'examen de la poursuite de la période d'observation est renvoyée, le tribunal ne peut considérer qu'il peut statuer sur l'éventualité ou pas de prononcer la liquidation judiciaire sans respecter les formalités de convocation et de note du Président.Cass com 22 janvier 2013 n°11-27318 et 11.27392. A défaut le tribunal est irrégulièrement saisi (ce qui entraîne que l'effet dévolutif ne joue pas).

Même si le débiteur était présent lors du prononcé du jugement de redressement judiciaire, ou d'une audience à l'occasion de laquelle il lui a été expressément indiqué la date à laquelle l'éventuelle liquidation serait évoquée, et même encore à l'audience à laquelle la liquidation a été évoquée et mise en délibéré, cela ne dispense pas le greffe de le convoquer, à peine de nullité du jugement de liquidation judiciaire (Cass com 1er mars 2016 n°14-21997). En réalité d'ailleurs dans ce dernier cas, sans doute l'absence de la note prévue à l'article R631-3 dont le but est de présenter les raisons de la saisine d'office, a motivé particulièrement la cassation (sans renvoi)

Voir par exemple pour un rejet de plan et une liquidation (Cass com 20 juin 2018 n°17-13204) "Attendu que pour rejeter la demande d'annulation du jugement, l'arrêt retient que le tribunal, après avoir ordonné la prolongation exceptionnelle de la période d'observation, avait renvoyé l'affaire pour statuer sur le projet de plan présenté par la société débitrice et qu'à l'audience de renvoi, à laquelle cette société était représentée, il a statué sur la demande formée au cours de l'audience par l'administrateur, le mandataire judiciaire et le ministère public tendant au rejet du projet de plan et au prononcé de la liquidation judiciaire ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la convocation régulière à l'audience pour examen du plan, la comparution du représentant de la société débitrice ou la demande de conversion formée à l'audience par les organes de la procédure ou le ministère public ne peuvent suppléer à l'absence d'invitation préalable faite aux parties de présenter leurs observations ou de convocation en vue de la conversion d'office du redressement en liquidation judiciaire dans les formes prévues par l'article R. 631-3 du code de commerce, sans le respect desquelles la saisine d'office est irrégulière, la cour d'appel a violé les textes susvisés"

Même solution Cass com 20 juin 2018 n°17-13207   Cass com 20 juin 2018 n°17-13206 et même solution Cass com 19 septembre 2018 n°17-13208 "Vu les articles L. 631-15, II, R. 631-24, alinéa 1er, et R. 631-3 du code de commerce, ce dernier dans sa rédaction issue du décret du 30 juin 2014 ;

Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que, lorsqu'il n'est pas saisi par voie de requête, le tribunal qui entend exercer d'office son pouvoir de conversion de la procédure de redressement en liquidation judiciaire, doit, à moins que les parties intéressées n'aient été invitées préalablement à présenter leurs observations, faire convoquer le débiteur à comparaître dans le délai qu'il fixe, à la diligence du greffier, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à laquelle est jointe une note exposant les faits de nature à motiver l'exercice par le tribunal de ce pouvoir ;

Attendu que pour rejeter la demande d'annulation du jugement, l'arrêt retient que le tribunal, après avoir ordonné la prolongation exceptionnelle de la période d'observation, avait renvoyé l'affaire pour statuer sur le projet de plan présenté par la société débitrice et qu'à l'audience de renvoi, à laquelle cette société était représentée, il a statué sur la demande formée au cours de l'audience par l'administrateur, le mandataire judiciaire et le ministère public tendant au rejet du projet de plan et au prononcé de la liquidation judiciaire ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la convocation régulière à l'audience pour examen du plan, la comparution du représentant de la société débitrice ou la demande de conversion formée à l'audience par les organes de la procédure ou le ministère public ne peuvent suppléer à l'absence d'invitation préalable faite aux parties de présenter leurs observations ou de convocation en vue de la conversion d'office du redressement en liquidation judiciaire dans les formes prévues par l'article R. 631-3 du code de commerce, sans le respect desquelles la saisine d'office est irrégulière, la cour d'appel a violé les textes susvisés"

L'article R621-3 dispose en effet "Lorsque le tribunal exerce son pouvoir d'office et à moins que les parties intéressées n'aient été invitées préalablement à présenter leurs observations, le tribunal fait convoquer le débiteur à la diligence du greffier, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à comparaître dans le délai qu'il fixe. A la convocation est jointe une note dans laquelle sont exposés les faits de nature à motiver l'exercice par le tribunal de son pouvoir d'office. Le greffier adresse copie de cette note au ministère public."

La Cour de cassation en tire "Vu les articles L. 631-15, II, R. 631-24, alinéa 1er, et R. 631-3 du code de commerce, ce dernier dans sa rédaction issue du décret du 30 juin 2014 

Attendu qu’il résulte de la combinaison de ces textes que, lorsqu’il n’est pas saisi par voie de requête, le tribunal qui entend exercer d’office son pouvoir de conversion de la procédure de redressement en liquidation judiciaire, doit, à moins que les parties intéressées n’aient été invitées préalablement à présenter leurs observations, faire convoquer le débiteur à comparaître dans le délai qu’il fixe, à la diligence du greffier, par une lettre recommandée avec demande d’avis de réception à laquelle est jointe une note exposant les faits de nature à motiver l’exercice par le tribunal de ce pouvoir" Cass com 20 juin 2018 n°17-13205

Le tribunal ne peut se contenter du fait que dans le jugement de redressement judiciaire était précisée la date à laquelle l'affaire serait réexaminée, ni même d'ailleurs de la présence du débiteur à cette nouvelle audience (Cass com 9 février 2010 n°09-10925). Cette décision est d'ailleurs curieuse puisque l'article R631-3 du code de commerce indique "Lorsque le tribunal exerce son pouvoir d'office et à moins que les parties intéressées n'aient été invitées préalablement à présenter leurs observations, le tribunal fait convoquer le débiteur à la diligence du greffier, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à comparaître dans le délai qu'il fixe. A la convocation est jointe une note dans laquelle sont exposés les faits de nature à motiver l'exercice par le tribunal de son pouvoir d'office. Le greffier adresse copie de cette note au ministère public" et qu'en l'espèce précisément le débiteur a été invité à présenter ses observations, et ce qui reste certain est que l'article R631-3 doit être respecté Cass com 22 janvier 2013 n°11-27318 Cass com 9 février 2010 n°09-10925

Dans le même sens (indication d'une date d'audience dans le jugement d'ouverture de la procédure collective et requête de l'administrateur pour liquidation judiciaire, le tout ne valant pas convocation) Cass com 26 juin 2019 n°17-27498

La nullité qui découle de l'absence de convocation (qui constitue une irrégularité de la saisine, qui écarte tout effet dévolutif) doit être soulevée en cause d'appel par les parties, et ne peut être soulevée d'office par la Cour. Cass com 22 septembre 2015 n°14-15588

 

Voir le mot "ouverture de la procédure" et le mot parquet


Salaires

voir le mot salarié et le mot AGS

Voir également le mot prescription


Salarié

Quelques points de la définition

Le contrat de travail

L'ouverture de la procédure collective est sans effet sur le contrat de travail

La rupture du contrat de travail en procédure collective

le traitement particulier de la location gérance

les créances salariales

--------------------------

Le traitement social, et plus particulièrement le maintien de l'emploi est l'objectif premier des procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire.

La procédure de liquidation judiciaire, qui emporte arrêt total et définitif de l'activité, ne peut évidemment pas privilégier cet objectif.

Le contrat de travail

Le contrat de travail repose sur la situation de fait qui lie les parties, et pas nécessairement de la qualification donnée à leur contrat. Ainsi, par exemple, un contrat de coursier, autoentrepreneur, est requalifié en contrat de travail dès lors qu'existe un lien de subordination, c'est à dire que le coursier exécute ses courses sous l'autorité de son "employeur" , qui donne des instructions, vérifie leur exécution et sanctionne leur mauvaise exécution. Dans le cas particulier en outre le coursier était géolocalisé par l'employeur, qui pouvait le suivre en temps réel et comptabiliser ses déplacements et les distances parcourues. Cass soc 28 novembre 2018 n°17-20079 

Voir également AGS les salariés garantis et nullités

L'ouverture d'une procédure collective, que ce soit de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, n'a pas, de plein droit (c'est à dire sans formalité) d'effet sur le contrat de travail.

Le contrat de travail est donc maintenu à ses clauses et conditions tant qu'une décision de licenciement n'est pas concrétisée: le salarié doit se rendre sur son lieu de travail, et l'employeur doit, le cas échéant sous le contrôle de l'administrateur judiciaire (et le liquidateur en liquidation judiciaire), lui régler le salaire convenu aux dates et conditions contractuelles.

Le droit du travail reste applicable sans dérogation, qu'il s'agisse des relations collectives (comité d'entreprise, représentants du personnel ..) ou des relations individuelles (démission, licenciement pour faute, retraite, maladie, accident du travail ...).

La rupture du contrat de travail en raison de la procédure collective

La procédure collective marque les difficultés économiques de l'employeur.

Il est logique qu'en pareille situation la réduction de la masse salariale, et donc généralement de l'effectif salarié, soit envisagée dans des situations où l'entreprise pourra poursuivre son activité.

Dans tous les cas, si un licenciement intervient en raison de la situation économique, il sera régi par les règles de droit commun du licenciement pour motif économique et se déroulera suivant le droit du travail.

Celui des mandataires de justice ( administrateur judiciaire ou liquidateur) qui prononcera le licenciement remettra au salarié l'ensemble des documents nécessaires (lettre de licenciement, certificat de travail, attestation employeur, fiches de paye, solde de tout compte).

Pour plus de détail voir le mot licenciement

Transfert des salariés en cas de location gérance de fonds de commerce 

(voir le mot location gérance)

Dans le cas où le débiteur exploite un fonds de commerce donné en location gérance, en principe la liquidation judiciaire va entraîner résiliation de la location gérance.

En application de l'article L1224-1 du code du travail ((voir ci dessus) les salariés sont de plein droit transférés au propriétaire du fonds de commerce qui devient leur employeur et est tenu de respecter le contrat de travail en cours à ses clauses et conditions. Le propriétaire du fonds de commerce devient, par l'effet de la résiliation qui notifie le liquidateur, le nouvel employeur des salariés attachés au fonds de commerce.

Par exception, le transfert des contrats de travail en cours n'aura pas lieu s'il est démontré ce qu'on appelle la ruine du fonds, c'est à dire si le fonds ne peut être exploité par son propriétaire (pour des raisons tenant au fonds de commerce)

En pratique en cas de liquidation judiciaire du locataire gérant, le liquidateur notifie (en principe) la résiliation du contrat de location gérance au bailleur du fonds (le propriétaire du fonds) et lui transmet la liste des salariés attachés au fonds. Il prévient également individuellement les salariés du retour du fonds de commerce sous la responsabilité du propriétaire. Ainsi, dès cette notification, le propriétaire du fonds de commerce est responsable de l'exploitation du fonds de commerce (et de ses salariés)

Les créances salariales

Voir vérification des créances salariales

Voir également les mots "AGS", "licenciement", "représentant des salariés", et "la cession"


Sanctions (et interdictions réelles ou imaginaires): banqueroute, interdiction de gérer, faillite personnelle, comblement de passif

Nous tenons à vous présenter les sanctions réellement prévues par les textes, et démentir l'existence de celles qui font partie des idées reçues inexactes qui sont véhiculées par diverses personnes généralement ignorantes de la loi.

Quelques points de la définition

Présentation schématique

Quelle procédure collective ?

Démentis sur de fausses rumeurs de sanctions

Démentis sur de fausses conséquences d'une liquidation clôturée

Démentis sur une pseudo interdiction de travailler du débiteur ou du dirigeant pendant ou après la clôture de la liquidation judiciaire

Présentation détaillée

Le moment de l'action : redressement et/ou liquidation judiciaires suivant les cas

La notion de dirigeant au regard des sanctions

Sanctions patrimoniales comblement de passif

La fin de l'action en contribution aux dettes

Sanctions civiles faillite personnelle et interdiction de gérer et notamment points communs, procédure ...

Principe des sanctions jusqu'à 15 ans dans le respect de la proportionnalité

Exceptions pour les professionnels indépendants soumis à un ordre professionnel

La procédure

Tribunal de la procédure collective et/ ou tribunal correctionnel et interférences entre les deux saisis

L'initiative de l'action 

Le liquidateur

Les contrôleurs

le Ministère public

les débats: audience publique par principe

le jugement et l'absence d'exécution provisoire de droit

Pas de transaction possible

Le temps de l'action : initiée durant la procédure collective mais éventuellement prononcée après

Faillite personnelle et interdiction de gérer: la prescription

Voies de recours

Effet de la faillite personnelle

Effet de l'interdiction de gérer

Faillite personnelle ou interdiction de gérer : différence de conséquence

Faillite personnelle ou interdiction de gérer dans quels cas

La date des faits

Quelques cas de faillite personnelle

Cas dans lesquels le tribunal peut choisir entre faillite personnelle et interdiction de gérer

Cas spécifiques d'interdiction de gérer et la date de cessation des paiements retenue

Tableau comparatif

Fichier National des interdits de gérer

La suite des sanctions : violation, fin et fichier des interdits de gérer

Non respect

Fin des mesures de faillite personnelle ou interdiction de gérer

Effet commun banqueroute et faillite personnelle

Sanctions pénales: banqueroute

Généralités et auteurs

Banqueroute la procédure

Date des faits

Banqueroute la prescription de l'action

Banqueroute délit intentionnel / pas de tentative punissable

Banqueroute quelques cas

Banqueroute incidence de la date de cessation des paiements et quelle date ? Frontière abus de biens sociaux / banqueroute? 

Banqueroute répartition du produit de l'action

Les autres délits

Effet commun banqueroute et faillite personnelle

Sanctions à l'initiative des contrôleurs: c'est possible

La notion de comptabilité dans les sanctions

Les textes

la jurisprudence appréciant la comptabilité au regard des sanctions

Nous avons volontairement laissé sous dans ce texte une étude détaillée de la faillite personnelle et l'interdiction de gérer d'une part et de la banqueroute d'autre part dans la mesure où la juridiction pénale qui prononce la banqueroute a pu, un temps (mais ce n'est plus d'actualité) prononcer la faillite personnelle en accessoire de la banqueroute.

Nous avons par contre présenté sommairement l'action en comblement de passif, détaillée sous un mot spécifique du lexique.

Voir également action en responsabilité pour faute ayant contribué à la cessation des paiements

Présentation schématique

Les sanctions prévues par les textes

La loi organise trois types de sanctions qui ne sont pas exclusives l’une de l’autre et peuvent donc se cumuler pour sanctionner le débiteur, les dirigeants de personnes morales, et dans certaines circonstances leurs complices :
- Des sanctions patrimoniales
- Des sanctions civiles
- Des sanctions pénales.

Aucune de ces sanctions ne découle ipso facto de la liquidation judiciaire ou de l'ouverture de la procédure collective.

La sanction, quelle qu'elle soit, est prononcée spécifiquement par un tribunal, tribunal de la procédure collective dans certains cas, tribunal correctionnel dans d'autres, mais toujours à la suite d'une instance à laquelle le débiteur ou le dirigeant est appelé et amené à faire valoir sa défense. Il n'existe aucune sanction "automatique" qui serait la seule conséquence de la liquidation judiciaire (ou a fortiori du redressement judiciaire)

Quelle procédure collective ?

Il est enfin rappelé que les sanctions de faillite personnelle, banqueroute ne sont pas applicables à la procédure de sauvegarde (L653-1 pour la faillite personnelle, qui ne vise que le redressement ou la liquidation, et L654-1 pour la banqueroute complété par L654-2 qui ne vise que le redressement ou la liquidation).

Le comblement de passif est réservé à la liquidation judiciaire.

- Les sanctions patrimoniales

Ces sanctions permettent au Tribunal de mettre à la charge d’un ou plusieurs dirigeants qui ont commis des fautes de gestion tout ou partie de l'« insuffisance d’actif » de l’entreprise, c'est-à-dire des sommes qui seront nécessaire au paiement des créanciers. Voir le mot "comblement de passif".

Concrètement, le dirigeant dont le liquidateur entend démontrer qu'il a commis des fautes de gestion qui sont l'une des causes des difficultés, et plus précisément de l'insuffisance d'actif, est assigné devant le Tribunal de la procédure collective.

Si les fautes sont établies, le dirigeant sera condamné à payer au liquidateur une somme correspondant à "l'augmentation de l'insuffisance d'actif", c'est à dire en réalité à la dégradation de la situation entre le moment où l'entreprise aurait du déclarer sa cessation des paiements et celui où la cessation des paiements a été constatée : le délai entre les deux correspond au maintien fautif de l'activité dont le dirigeant est jugé responsable.

- Les sanctions civiles:

Il s'agit essentiellement de la faillite personnelle et de l’interdiction de gérer par lesquelles le Tribunal pourra interdire aux dirigeants et chefs d’entreprises fautifs de gérer une entreprise pendant une durée qui pourra aller jusqu’à 15 années, en ce compris interdiction de voter dans les assemblées

Cette sanction peut être prononcée par le tribunal de la procédure collective ou par le tribunal correctionnel dans le cadre de sanctions pénales (voir si après).

Concrètement, le dirigeant ou débiteur qui a commis un certain nombre de fautes énumérées par la loi, sera convoqué devant le tribunal saisi, et si ces fautes sont établies, sera condamné.

- Les sanctions pénales

Elles reposent essentiellement sur le délit de banqueroute (voir ce mot)
Il s’agit d’un délit passible de 5 ans d’emprisonnement et de 75.000 € d’amende, outre privation des droits civiques et de famille, interdiction fonctions élective, interdiction d’exercice de la profession à l’occasion de laquelle infraction commise, exclusion marchés publics, interdictions d’émettre des chèques.
Peuvent être sanctionnés les chefs d’entreprise et dirigeants qui auront notamment détourné des actifs de l’entreprise, tenu une comptabilité fictive, fait disparaître la comptabilité.

Les mandataires de justice peuvent, à l'occasion de poursuites pour banqueroute, se constituer partie civile pour le compte des créanciers et demander des dommages intêrets.

Démentis sur les sanctions véhiculées par diverses rumeurs

Vous entendrez souvent deux types de rumeurs véhiculées par des personnes qui ne connaissent pas le droit des procédures collectives ou qui confondent une "simple liquidation judiciaire" avec des situations où un dirigeant a été spécialement poursuivi et condamné à des sanctions (voir ci dessus).

Contrairement à ce qui est souvent prétendu, la liquidation judiciaire n'a pas pour but ni pour effet de sanctionner ipso facto un dirigeant ou un chef d'entreprise.

- la liquidation judiciaire aurait des conséquences financières tant que le débiteur vivra, y compris après la clôture de la procédure : autrement dit, toute sa vie le débiteur doit rembourser le passif, même si c'est impossible en raison des sommes en jeu et de ses ressources : c'est faux

- par l'effet de la liquidation judiciaire, le débiteur ou le dirigeant serait interdit, pendant plusieurs années, d'exercer une activité: c'est également faux

Ces deux "sanctions" n'existent pas telles qu'elles sont présentées, et sont la conséquence d'amalgames et de méconnaissance des textes.

Démentis sur les conséquences patrimoniales d'une liquidation judiciaire clôturée

La liquidation judiciaire d'une personne physique (commerçant, artisan, "profession libérale") a pour conséquence que la totalité de son patrimoine est sous l'emprise de la procédure: le liquidateur a qualité pour vendre la totalité de l'actif, à l'exception bien entendu des biens insaisissables (biens nécessaires à la vie courante notamment).

Pour autant une fois le patrimoine du débiteur réalisé, le Tribunal va procéder à la clôture de la procédure, pour "insuffisance d'actif" s'il ne peut pas payer tous les créanciers (voir le mot clôture).

A partir du jugement de clôture, et sauf exceptions, la partie impayée du passif ne permet pas aux créanciers de retrouver leur droit de poursuite contre le débiteur. Autrement dit, les créanciers impayés ne peuvent plus poursuivre le débiteur.

Deux situations "singulières" peuvent se rencontrer :

- le débiteur a dissimulé un bien: dans ce cas la procédure peut être "reprise" et le bien sera vendu par le liquidateur dans les formes de la liquidation.

- le débiteur devient propriétaire de nouveaux biens. Cette situation peut-être la conséquence d'une nouvelle activité du débiteur, d'un héritage ... Ces biens "nouveaux" ne justifient pas la reprise de la liquidation judiciaire et ne peuvent être saisis par les créanciers. De manière très imagée, la loi "fait cadeau" au débiteur du solde de son passif impayé, sauf dans des cas très particuliers de mauvaise foi caractérisée ou de sanctions prononcées.

Pour ce qui concerne le dirigeant d'une personne morale en liquidation, il n'a, ipso facto, aucune sanction financière. La "sanction" ou plus exactement la conséquence financière la plus fréquente est la mise en jeu de ses cautions (voir ce mot). Pour le surplus, il pourra évidemment être condamné financièrement, mais la liquidation en elle même n'entraîne pas de sanction "automatique".

Démentis sur la pseudo interdiction de "travailler" qui frapperait le débiteur ou le dirigeant pendant et après la clôture de la liquidation judiciaire

Débiteur personne physique ( artisan, commerçant, profession libérale)

Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi 2022-172 du 14 février 2022 la loi conciliait deux considérations :

- le même débiteur ne pouvait se trouver simultanément deux fois en liquidation judiciaire : une personne physique en liquidation ne pouvait donc, tant que sa liquidation n'est pas clôturée, exercer une activité qui risquerait de l'exposer à une seconde liquidation. Le débiteur personne physique ne pouvait donc, pendant sa liquidation, être à nouveau commerçant, artisan ou profession libérale. Il pouvait cependant exercer une activité salariée (voir également le mot "dessaisissement")

Sauf cas particuliers, rien n'empéchait par contre le débiteur, postérieurement à la clôture de la liquidation, d'exercer quelque activité que ce soit, sous quelque forme que ce soit ( y compris à titre individuel - commerçant, artisan, profession libérale, ou sous forme sociétaire - par exemple en étant gérant d'une SARL).

Sur ce dernier point les idées reçues sont donc fausses, et les cas d'impossibilité ne se rencontrent que dans des situations où des sanctions ont été prononcées (par exemple faillite personnelle)

- le débiteur ou le dirigeant est en principe formé et compétent pour une activité précise, et lui interdire "à vie" ou pour longtemps, l'exercice de cette activité reviendrait à le priver de toute possibilité de vivre décemment.

Ainsi, comme indiqué ci dessus, dès la clôture de la liquidation d'une personne physique, elle peut, sauf exceptions, exercer la même activité. Elle peut évidemment également être dirigeant de toute personne morale, associée, salariée ...

La loi 2022-172 du 14 février 2022 relative à l'entrepreneur individuel est venue modifier le dispositif, et désormais l'article L681-2 VII du code de commerce dispose :

"- Lorsqu'une procédure de liquidation judiciaire est ouverte, l'entrepreneur individuel peut exercer une nouvelle activité professionnelle. Un nouveau patrimoine professionnel est alors constitué. Ce patrimoine professionnel n'est pas concerné par la procédure ouverte.

Le débiteur ne peut constituer plus de deux patrimoines distincts de son patrimoine personnel.

La faculté d'exercer une nouvelle activité professionnelle dans les conditions prévues au premier alinéa du présent VII ne s'applique pas au débiteur qui, au titre de l'un quelconque de ses patrimoines, a fait l'objet, depuis moins de cinq ans, d'une procédure de liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif ou d'une décision de clôture d'une procédure de rétablissement professionnel"

Dirigeant d'une personne morale en liquidation judiciaire

Le dirigeant d'une personne morale (par exemple le gérant d'une SARL) en liquidation est encore moins touché que le débiteur personne physique puisqu'il peut, là encore sauf sanction de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer prononcée spécialement, exercer toute activité, y compris pendant la liquidation judiciaire.

Il peut donc, même pendant la liquidation, être dirigeant d'une autre personne morale, commerçant, artisan ...

Il se peut d'ailleurs que plusieurs sociétés aient le même dirigeant, et que l'une d'elles seulement soit en liquidation. Les autres ne sont pas touchées par la liquidation, et leur dirigeant peut continuer ses fonctions.

Conclusion

La loi ne fait que mettre des limites, qui relèvent de considérations évidentes: le débiteur ou le dirigeant, même exerçant par la suite la même activité que celle ayant donné lieu à la liquidation, ne peut bénéficier d'actifs (clients, matériel, savoir faire, brevets, logiciels ..) détournés (c'est à dire "volés") de la précédente liquidation.

Voir également dans le lexique les mots suivants qui donnent tous des précisions sur le sort réservé au dirigeant et au chef d'entreprise: "banqueroute", "faillite personnelle", "interdiction", "extension", "comblement de passif", "responsabilité du dirigeant" et "dessaisissement".

Présentation détaillée

Le moment de l'action : Redressement ou liquidation judiciaires suivant les cas

L'action en comblement de passif n'existe qu'en liquidation judiciaire (article L651-2 du code de commerce)

Les actions en faillite personnelle ou interdiction de gérer sont applicables au redressement ou à la liquidation judiciaire (article L653-1 du code de commerce)

Les sanctions pénales (banqueroute) sont applicables en redressement ou liquidation judiciaires (article L654-2 du code de commerce)

Sur la notion de dirigeant voir le mot dirigeant

Les sanctions patrimoniales: le "comblement de passif"' c'est à dire l'action "en responsabilité pour insuffisance d'actif"

Comblement de passif

Cette sanction permet au Tribunal de mettre tout ou partie de l'« insuffisance d’actif » de l’entreprise, c'est-à-dire des sommes qui seront nécessaire au paiement des créanciers, à la charge d’un ou plusieurs dirigeants qui ont commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif.

Peuvent être visés les dirigeants de droit (c'est à dire les dirigeants statutaires) et les dirigeants de fait, c'est à dire les personnes dont il est démontré à l'occasion de l'action que, bien que n'étant pas dirigeant de droit, elles ont pris des initiatives de direction qui dépassent leur rôle normal dans l'entreprise (par exemple il relève bien d'un directeur des ressources humaines d'une grande entreprise de signer les contrats de travail, mais il ne relève certainement pas d'un parent du gérant d'une petite entreprise de se comporter comme s'il en était le dirigeant, parfois en induisant les tiers en erreur, et de recruter ou licencier les salariés, de signer les contrats, les opérations bancaires ... ) 

On emploie souvent le terme de "comblement de passif" puisque par la contribution à laquelle il est condamné le dirigeant contribue à "combler" le passif, ou plus exactement à résorber totalement ou partiellement ce qu'on appelle l'insuffisance d'actif, c'est à dire la différence qui existe entre le passif et les sommes disponibles pour payer les créanciers. Cependant la terminologie légale (articles L651-1 et suivants du code de commerce) évoque l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif

Voir le mot comblement de passif

La fin de l'action en obligation aux dettes sociales

La loi de 2005 avait instauré, en quasi concurrence avec l'action en comblement de passif, une action dite en obligation aux dettes sociales (article L652-1 du code de commerce).

Cette action, qui avait un régime différent de l'action en comblement (notamment le produit de l'action était réparti en respectant l'ordre des privilèges) mais recoupait en réalité des situations similaires, a été supprimée par ordonnance du 18 décembre 2008 qui a abrogé les textes correspondants.

Les sanctions civiles: faillite personnelle et interdiction de gérer. Les différences entre faillite personnelle et interdiction de gérer.

Généralités

Le principe: des sanctions qui peuvent aller jusqu'à 15 ans et qui tendent à écarter de la vie des affaires, dans le respect de la proportionnalité

Il s'agit de la faillite personnelle et de l’interdiction de gérer par lesquelles le Tribunal pourra interdire aux dirigeants et chefs d’entreprises fautifs de gérer une entreprise pendant une durée qui pourra aller jusqu’à 15 années, en ce compris interdiction de voter dans les assemblées.

Le juge doit évidemment motiver sa décision tant sur le principe que sur le quantum Cass com 5 juillet 2018 n°18-11743 Cass com 17 avril 2019 n°18-11685 Cass com 20 octobre 2021 n°20-10557 et le texte n'est pas anti constitutionnel Cass com 17 avril 2019 n°18-11743

Le juge doit donc veiller à la proportionnalité de la sanction ( Cass com 9 Octobre 2019 n°18-10797 pour un dirigeant inexpérimenté qui n'avait été dirigeant que très peu de temps) et doit motiver sa décision sur le quantum de la sanction au regard de la gravité de la faute et de la situation personnelle du dirigeant Cass com 25 mars 2020 n°18-11684  Cass com 29 septembre 2021 n°20-12166 Cass com 20 octobre 2021 n°20-10557

Au regard de l'article 8 de la convention européenne, le juge doit tenir compte de la gravité des faits, de la situation matérielle familiale et sociale du dirigeant et de sa personnalité, ce qui peut par exemple donner lieu à une condamnation pour 12 ans d'un débiteur récidiviste Cass com 1er juillet 2020 n°18-17789

Evidemment la décision doit répondre aux conclusions du dirigeant, à défaut de quoi elle n'est pas motivée Cass com 17 juin 2020 n°18-18321 Cass com 5 juillet 2023 n°22-13289 pour un dirigeant par ailleurs condamné à un comblement de passif et qui faisait valoir qu'il avait constitué une autre société dont il tirait ses revenus.

Et évidemment encore, la contradiction de motif équivaut à une absence de motif Cass com 6 mars 2024 n°21-19326 pour un arrêt d'appel qui infirme un jugement ayant prononcé une faillite personnelle pour une durée de 10 ans et prononce la même sanction. 

Le tribunal n'a pas d'obligation de tenir compte de la situation personnelle du débiteur pour moduler la condamnation (en réalité il le fait, mais n'a pas d'obligation en ce sens) Cass com 19 mai 2021 n°19-23753

L'exception: pour les professionnels indépendants dont l'organisation de la profession est régie par un ordre professionnel, le texte n'est pas applicable

Par exception la loi dispose que les personnes exerçant une profession indépendante (souvent qualifiée de profession libérale) ne sont pas soumises à la sanction de la faillite personnelle, dès lors qu'elles dépendent de règles disciplinaires ( voir article L653-1 3° du code de commerce).

Concrètement pour ces professionnels, c'est l'ordre dont ils dépendant qui est susceptible le cas échéant de prononcer des sanctions (radiation, suspension .. ) ayant même objet que la faillite personnelle.

A titre d'exemple, la Cour de Cassation a considéré comme justifiées les sanctions disciplinaires (interdiction d'exercice pendant 3 ans) prononcées par l'instance disciplinaire des avocats, contre un avocat ayant fait l'objet d'une procédure collective, et qui, de manière répétée, n'avait pas respecté ses obligations fiscales et sociales (Cass civ 1ère 10 décembre 2014 n°13-25808)

La procédure (faillite personnelle ou interdiction de gérer)

Sanctions prononcées par le tribunal de la procédure collective (et/ ou anciennement par le tribunal correctionnel, cette dernière solution n'étant plus possible) dans la limite de 15 ans

La procédure est identique pour les deux sanctions: elles peuvent être prononcées (l'une ou l'autre et pas les deux à la fois, mais nous verrons que la faillite personnel produit les effets de l'interdiction de gérer et d'autres effets complémentaires).

La durée de la mesure est limitée à 15 ans (L653-11)

Ces sanctions pouvaient initialement prononcées :

- par le tribunal de la procédure collective à titre principal, c'est à dire dans le cadre d'une demande en ce sens,

- ou par le tribunal correctionnel dans le cadre de sanctions pénales en accessoire d'une condamnation pénale pour banqueroute (voir ci après).

Le dispositif a été déclaré conforme à la constitution (décision du conseil constitutionnel 2016-570 du 29 septembre 2016)

Les textes permettaient initialement également une autre application: le cumul de la même sanction, prononcée à la fois par le Tribunal de la procédure collective et par le Tribunal correctionnel. 

Les textes permettaient en effet que le tribunal de la procédure prononce la faillite personnelle alors que par ailleurs le tribunal correctionnel l'avait également prononcée (et dans ce cas ce qui compte est que le cumul des deux faillites prononcées ne dépassent pas les 15 ans prévus par les textes Cass com 24 mai 2018 n°17-11743) ,

Mais à l'inverse l'article L654-6 du code de commerce dans sa rédaction initiale prévoyait que le tribunal correctionnel ne pouvait prononcer la faillite personnelle en peine accessoire de la banqueroute que si le tribunal de la procédure ne l'avait pas déjà prononcé.

Cette absence de réciprocité exposait les débiteurs à une double sanction, suivant dans quel ordre les juridictions statuaient et sur ce point également le conseil constitutionnel a été saisi.

Ainsi la question de savoir si d'une part le tribunal de la procédure collective peut prononcer une interdiction de gérer ou une faillite personnelle, alors que par ailleurs le tribunal correctionnel a déjà prononcé une peine de banqueroute assortie elle aussi d'une interdiction de gérer ou d'une faillite personnelle pour les mêmes faits est controversée (surtout si c'est l'occasion pour le tribunal de la procédure collective de prononcer une sanction plus longue) en raison de la règle "non bis in idem" (pas deux fois pour la même chose).

La Cour de Cassation a considéré la question prioritaire de constitutionnalité sérieuse, et la décision du conseil Constitutionnel a été de considérer que l'article L654-6 du code de commerce dans sa rédaction qui lui était soumise, était contraire à la constitution et abrogé immédiatement (Cass com QPC du 28 juin 2016, n°16-40208 et décision du Conseil Constitutionnel 2016-573 du 29 septembre 2016). 

On aurait pu normalement comprendre que l'article L654-6 du code de commerce était purement et simplement abrogé, et que, jusqu'à ce qu'un nouveau texte soit promulgué, le juge correctionnel ne pouvait plus prononcer la faillite personnelle (c'est d'ailleurs la conclusion du commentaire de la décision du conseil Constitutionnel) et celui de la Cour de Cassation Cass crim 22 novembre 2017 n°16-83549

Cependant dans un premier temps, l'article L654-6 du code de commerce telle que présenté sur le site Légifrance a simplement été modifié et la modification a conduit à la suppression de l'expression "pour les mêmes faits":

Ancienne formulation avant la décision du conseil Constitutionnel: "La juridiction répressive qui reconnaît l'une des personnes mentionnées à l'article L. 654-1 coupable de banqueroute peut, en outre, dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 653-11, prononcer soit la faillite personnelle de celle-ci, soit l'interdiction prévue à l'article L. 653-8, à moins qu'une juridiction civile ou commerciale ait déjà prononcé une telle mesure par une décision définitive prise à l'occasion des mêmes faits."

Nouvelle formulation présentée sur le site Légifrance au lendemain de la décision: "La juridiction répressive qui reconnaît l'une des personnes mentionnées à l'article L. 654-1 coupable de banqueroute peut, en outre, prononcer soit la faillite personnelle de celle-ci, soit l'interdiction prévue à l'article L. 653-8, à moins qu'une juridiction civile ou commerciale ait déjà prononcé une telle mesure par une décision définitive."

Il s'agit donc de la formulation issue de la loi de 2005, considérée dans un premier temps comme applicable.

Ainsi, faute de pouvoir établir une réciprocité, c'est à dire de préciser que les mêmes faits ne pouvaient donner lieu à faillite personnelle prononcée par le tribunal de la procédure ou le tribunal correctionnel, peu important l'ordre dans lequel les décisions interviennent, la conséquence de la décision du Conseil Constitutionnel est le retour au texte antérieur, de sorte que désormais le tribunal correctionnel ne peut plus prononcer de faillite personnelle si une telle mesure a déjà été prononcée par le tribunal de la procédure collective, qu'il s'agisse des mêmes faits ou pas.

Ce "nouveau" dispositif ne semble a priori pas plus cohérent que le précédent, car rien n'empêche à l'inverse le tribunal de la procédure collective de prononcer la faillite personnelle, y compris si le tribunal correctionnel l'a déjà prononcé, et on n'est pas certain que ce soit ce que le Conseil Constitutionnel ait entendu juger.

Par un arrêt du 22 novembre 2017 (Cass crim 22 novembre 2017 n°16-83549) la Cour de Cassation confirme les conséquences de l'inconstitutionnalité de l'article L654-6 du code de commerce dans sa version visée par la décision, et en tire, plus simplement que le débiteur ne pourra donc pas faire l'objet d'une faillite personnelle prononcée par la juridiction correctionnelle dans le cadre des procédures régies par l'article L654-6 dans sa version antérieure à la décision du Conseil Constitutionnel

Par la suite le site Légifrance a purement et simplement été modifié : la version anticonstitutionnelle de l'article L654-6 est réputée abrogée, et la version antérieure est réputée n'être applicable que jusqu'au 15 février 2009, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance du 18 décembre 2008 qui avait instauré la nouvelle version. Cette nouvelle position semble plus cohérente et on en tire donc qu'à ce jour les juridictions correctionnelles ne puissent plus prononcer la faillite personnelle (par exemple Cass crim 16 octobre 2019 n°17-87196 ou Cass crim 29 mai 2019 n°18-81455

C'est cette interprétation qui est maintenant retenue Cass crim 21 mars 2018 n°17-81160 pour toutes les affaires qui n'étaient pas définitivement jugées au jour de la déclaration d'inconstitutionnalité Cass crim 22 novembre 2017 n°16-83549 Cass crim 24 octobre 2018 n°17-86749

Concrètement, encourt la faillite personnelle et l'interdiction de gérer le dirigeant ou débiteur qui a commis un certain nombre de fautes énumérées par la loi, sera convoqué devant le tribunal saisi, et si ces fautes sont établies, peut être condamné.

(mais n'oublions pas, qu'au terme de l'article L654-5 du code de commerce le Tribunal correctionnel peut, en complément d'une condamnation pour banqueroute, prononcer 

1° L'interdiction des droits civiques, civils et de famille, suivant les modalités de l'article 131-26 du code pénal ;

2° L'interdiction, suivant les modalités prévues par l'article 131-27 du code pénal, soit d'exercer une fonction publique ou d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, soit d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale. Ces interdictions d'exercice peuvent être prononcées cumulativement ;

3° L'exclusion des marchés publics pour une durée de cinq ans au plus ;

4° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ;

5° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal., 

ce qui peut avoir des conséquences très voisines si les faits sont postérieurs à l'entrée en vigueur de la loi du 4 aout 2018 qui a modifié ce texte, voir notamment Cass crim 25 novembre 2020 n°19-85740)

L'initiative de l'action

C'est l'article L653-7 qui organise l'initiative de l'action : "le tribunal est saisi par le mandataire judiciaire, le liquidateur ou le ministère public. Dans l'intérêt collectif des créanciers, le tribunal peut également être saisi à toute époque de la procédure par la majorité des créanciers nommés contrôleurs lorsque le mandataire de justice ayant qualité pour agir n'a pas engagé les actions prévues aux mêmes articles, après une mise en demeure restée sans suite dans un délai et des conditions fixés par décret en Conseil d'Etat."

Le liquidateur ou le mandataire judiciaire

L'action peut être initiée par le liquidateur (en liquidation) ou le mandataire judiciaire (en redressement judiciaire) , qui délivre une assignation au dirigeant, 

Les contrôleurs

L'action peut également être initiée par la majorité des créanciers désignés contrôleurs (ce qui suppose qu'il y en ait plusieurs) après une mise en demeure d'agir délivrée par eux au liquidateur et restée infructueuse (L653-7 du code de commerce).

Ministère public

L'action peut également être initiée par une requête du Procureur de la République (qui est donc dispensé d'assignation) qui le fait citer par un acte du greffe (l'article R631-4  auquel renvoi l'article R653-2 prévoit un courrier recommandé (mais la procédure n'est pas nulle si le débiteur est convoqué par un acte d'huissier Cass com 20 octobre 2021 n°20-13268), et il semble que si ce courrier n'est pas réceptionné par le débiteur, il n'appartient pas au greffe de convoquer par acte d'huissier mais au Parquet de procédure par voie de signification: cela résulterait d'un avis de la Cour de Cassation et Cass com 5 mai 2021 n°20-11112

Sur les mentions obligatoires de la convocation émise par le greffe voir comblement de passif la procédure

Le Procureur de la République doit être présent à l'audience s'il est demandeur à la sanction, pour soutenir sa requête (Cass com 13 septembre 2016 n°14-10927 Cass com 16 juin 2021 n°20-14771, y compris en cause d'appel, et s'il prend des conclusions écrites elles doivent être communiquées au dirigeant (même arrêt).

Le débiteur est nécessaire informé de l'action

Dans les deux cas de sanction, le dirigeant est informé de la date de l'audience et des faits reprochés, et peut évidemment constituer un dossier pour alimenter sa défense, soit en le présentant personnellement soit en choisissant d'être assisté par un avocat de son choix.

Débats: par principe audience publique

Les débats sont par principe publics (article L662-3 du code de commerce) sauf s'il en est décidé autrement par le Président du Tribunal à la demande d'une partie mise en cause: il s'agit ici d'une évolution par rapport aux textes antérieurs qui prévoyaient une audition du dirigeant en chambre du conseil. Dans un esprit de moralisation, le législateur a estimé pertinent que l'audience soit publique pour que l'exemple soit donné des sanctions retenues en cas de faute des dirigeants.

Contrairement à la procédure pénale, le dirigeant n'a pas à être entendu après le ministère public Cass com 29 septembre 2021 n°19-25112

Singulièrement les textes ne prévoient pas la présence du liquidateur s'il n'est pas à l'origine des poursuites, de sorte que sa présence à l'audience s'interprète a priori comme une intervention volontaire. 

Le jugement et l'exécution provisoire

A la différence de la quasi totalité des décisions rendues en matière de procédure collective, le jugement qui prononce la faillite personnelle ou l'interdiction de gérer n'est pas exécutoire de plus droit (article R661-1 alinéa 2 du code de commerce) sauf si le tribunal en décide (article L653-11 du code de commerce) : ainsi s'agissant d'une exécution provisoire facultative, le Premier Président de la Cour d'appel peut, en cas d'appel, en ordonner suspension dans les conditions de droit commun, étant précisé en outre que l'appel du Parquet est suspensif (article L661-11 du code de commerce).

Pour les procédures ouvertes à compter du 1er octobre 2021, l'article R653-3 du code de commerce prévoit que la notification du jugement précise la procédure pour obtenir le relèvement de la sanction.

( sur le déréférencement par GOOGLE d'une article faisant allusion à la condamnation voir CE 10-9ème chambres réunies 20 avril 2023 n°463487 

Pas de transaction sur l'action

Selon l’article 2045, alinéa 1er, du code civil, pour transiger, il faut avoir la capacité de disposer des objets compris dans la transaction. C’est, dès lors, à bon droit que l’arrêt, après avoir énoncé que les articles L. 653-1 et suivants du code de commerce concernant la faillite personnelle et les autres mesures d’interdiction ne tendent pas à la protection de l’intérêt collectif des créanciers mais à celle de l’intérêt général, et qu’il s’agit de mesures à la fois de nature préventive et punitive, retient que si la transaction pouvait mettre fin à l’instance en paiement de l’insuffisance d’actif, elle ne pouvait avoir pour objet de faire échec, moyennant le paiement d’une certaine somme ou l’abandon d’une créance, aux actions tendant au prononcé d’une sanction professionnelle. Cass com 9 décembre 2020 n°19-17258

Concrètement il n'est donc pas pertinent d'assigner à la fois en comblement de passif et en faillite personnelle car cela rendra toute transaction impossible, et il est préférable de mener en premier l'action en comblement et de ne rechercher la faillite personnelle qu'en cas de condamnation (et d'absence de transaction sur l'exécution).

Voies de recours

L'appel est ouvert au ministère public et est suspensif (article L661-11) dans le délai de 10 jours de l'avis qui lui est adressé (R661-3)

L'appel est également ouvert au mandataire de justice demandeur en cas de rejet de sa demande (même délai)

Enfin l'appel est ouvert au dirigeant condamné dans les 10 jours de la signification (et pas de la notification par le greffe) de la décision.

Un arrêt Cass com 2 mai 2001 n°98-12037 précise que le délai court y compris si la signification a été faite par procès verbal de recherches infructueuses, ce qui est logique. La décision précise : "que la signification d'un jugement réputé contradictoire par voie de procès-verbal de recherches infructueuses fait courir le délai d'appel sans être contraire à l'exigence d'un procès équitable, dès lors que la régularité de cette signification, soumise par la loi à des conditions et modalités précises et à des investigations complètes de l'huissier de justice, peut être contestée, et que son destinataire dispose d'une procédure de relevé de la forclusion encourue"

Le temps de l'action : initiée durant la procédure collective mais éventuellement prononcée après

On peut tirer de l'évolution des textes que l'action doit être initiée avant la clôture de la procédure (et d'ailleurs le rapport du juge commissaire, par hypothèse en fonction, est nécessaire) mais peut être prononcée après.

C'est a minima possible pour les sanctions prononcées par le Tribunal correctionnel. Concernant le Tribunal de la procédure, on pourrait soutenir qu'il est dessaisi par la clôture et ne peut donc statuer.

Cependant la loi lui attribue une compétence "autonome" et le fait est que l'indication que la sanction peut être prononcée "à tout moment de la procédure" a été supprimée du texte (mention présente dans l'article 187 de la loi du 25 janvier 1985, dont la suppression démontre que la procédure n'a plus à être en cours au moment du prononcé)

Les auteurs d'accordent donc sur le fait que la sanction peut être prononcée postérieurement à la clôture, pourvu qu'elle soit initiée avant, et évidemment qu'elle ne soit pas initiée par un mandataire de justice dont par ailleurs les fonctions ont pris fin: la demande du Parquet, pour sa part, subsiste valablement. Voir en ce sens rapport fait au nom de la commission des lois n°2095 II D 3 par monsieur XAVIER DE ROUX sur le projet de loi de sauvegarde des entreprises

Ce que confirme la Cour de Cassation Cass com 8 février 2023 n°21-22796

Délai d'exercice de l'action: prescription

L'action se prescrit par 3 ans à compter du jugement d'ouverture de la procédure (article L653-1 du code de commerce).

Malgré l'ambiguïté du texte, la Cour de Cassation considère qu'en cas de redressement judiciaire par la suite converti en liquidation judiciaire, c'est le premier de ces jugements, qui est bien celui qui "ouvre" la procédure, qui fait courir les délais de prescription (Cass com 4.11.2014 n°13-24028). Dans le cas d'une résolution de plan suivi d'une liquidation judiciaire, c'est le jugement de liquidation qui fait courir le délai, dès lors qu'il s'agit d'une nouvelle procédure, et si ce jugement est annulé, et suivi d'une nouvelle liquidation prononcée par la Cour dans le cadre de l'effet dévolutif, c'est l'arrêt de la Cour qui fait courir le délai Cass com 23 novembre 2022 n°21-19431

Dans le cas où l'action est initiée par le Procureur de la République, c'est la date du dépôt de la requête qui interrompt la prescription, peu important que le débiteur n'en ait connaissance que postérieurement (Cass com 13 septembre 2016 n°14-10927)

Le texte ne précise pas que le Tribunal doit être saisi à l'intérieur du délai, et on peut donc penser que la délivrance de l'assignation (dans les cas où elle est nécessaire) suffit.

Une prescription spéciale court par la faillite personnelle consécutive au non paiement par le dirigeant des sommes auxquelles il a été condamné dans le cadre d'une action en comblement de passif (article L653-6 pour la faillite personnelle dans ce cas, et article L653-1 pour la prescription), délai qui court à compter du jour où la décision de condamnation devient exécutoire Cass com 7 novembre 2018 n°17-18661

Concrètement quel est l'effet de la faillite personnelle ?

Généralités

La faillite personnelle a pour objectif d'écarter de la vie des affaires une personne qui, par ses actes ne respecte pas un certain nombres de règles. Elle est prononcée par une durée fixée par le tribunal, dans la limite maximale de 15 ans.

Les effets de la faillite personnelle :

La faillite personnelle emporte cinq conséquences principales, certaines obligatoires et automatiques et d'autres sur lesquelles le tribunal a le pouvoir d'appréciation:

1- Interdiction de gérer toute entreprise (mais pas une activité libérale): un effet obligatoire:

"La faillite personnelle emporte interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole ou toute entreprise ayant toute autre activité indépendante et toute personne morale". (article L653-2 du code de commerce).

Il convient de préciser que cette interdiction n'affecte pas les mandats de membre du conseil de surveillance dont l'interdit peut être titulaire Cass com 8 janvier 2020 n°18-23991

En outre le texte ne vise pas les entreprises dites libérales Cass com 19 mai 2021 n°20-12049

(Cette mesure d'interdiction de gérer est assez trompeuse, puisque l'interdiction de gérer est par ailleurs une sanction distincte et moindre que la faillite personnelle, mais en fait la faillite personnelle emporte tous les effets de la "sanction" de l'interdiction de gérer et des effets supplémentaires). L'interdiction d'une activité indépendante a été ajoutée par la loi de sauvegarde de 2005, ne s'applique donc pas aux procédures ouvertes antérieurement, et s'agissant d'une loi - même non pénale - plus sévère, ne s'applique pas de plein droit aux situations antérieures (Cass com 17 février 2016 n°14-83663)

Le non respect de cette interdiction est sanctionné par l'article L654-15 du code de commerce et est susceptible d'être puni d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 375.000 € (par exemple Cass crim 29 novembre 2016 n°15-86116 qui a condamné le dirigeant à un an de prison ferme)

La Cour de cassation a tiré une conséquence inattendue de l'interdiction de gérer:" Le dirigeant ne saurait valablement invoquer le fait que la société n'a aucune activité pour s'exonérer de ses obligations comptables, ni le fait qu'il est interdit de gérer et ne pouvait donc accomplir sa mission de direction, alors que l'interdiction de gérer emporte interdiction d'accomplir des actes de gestion au nom de la société mais ne décharge par le dirigeant de ses obligations, notamment de coopération avec le liquidateur judiciaire" Cass com 11 avril 2018 n°16-24312

Cet arrêt peut paraître singulier dans la mesure où on croit y comprendre que le dirigeant interdit pourrait rester dirigeant et accomplir certains actes.

En réalité, outre le fait qu'il existe une sanction à la violation d'une interdiction de gérer, l'interdiction de gérer emporte interdiction d'exercer les fonctions de dirigeant et non pas seulement certains de leurs aspects. Pour autant évidemment le dirigeant qui reste en fonction malgré une interdiction doit assumer totalement ses fonctions et ne peut se réfugier derrière le fait qu'il était interdit ! La mesure d'interdiction de gérer n'emporte pas de démission ou de révocation d'office du dirigeant et il convient donc que le processus de droit des sociétés soit mis en place. Il semble cependant envisageable que le gérant interdit de gérer ne puisse plus engager la société, ce qui pourrait rendre ses initiatives irrecevables, encore que cette décision soit assez singulière au regard d'un dirigeant en fonction Cass com 27 janvier 1998 n°95-20585

Pour se protéger des effets de la sanction de non respect de l'interdiction, le dirigeant a tout intérêt à démissionner dès que la décision emportant interdiction de gérer est exécutoire (et évidemment sauf suspension de l'exécution).  

2 - Reprise des poursuites des créanciers après la clôture pour insuffisance d'actif: un effet obligatoire et très important pour l'avenir du débiteur

Un autre effet très important de la faillite personnelle est que, par exception au droit commun, en cas de clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, les créanciers retrouvent leurs droits de poursuites du débiteur.

Evidemment un tel effet ne concerne en pratique que les débiteurs personnes physiques, puisqu'une personne morale en liquidation judiciaire et dont la clôture pour insuffisance d'actif est prononcée sera nécessairement également liquidée au sens du droit des sociétés ce qui rend la reprise des poursuites totalement sans intêret (évidemment encore la reprise des poursuites ne concerne que le débiteur en liquidation judiciaire et pas ses dirigeants).

Ainsi, par différence avec une clôture pour insuffisance d'actif sans qu'il y ait eu de faillite personnelle prononcée, cas dans lequel le débiteur personne physique ne pourra pas, par la suite, être poursuivi par les créanciers qui n'ont pas été payés, même s'il revient à meilleure fortune, en cas de faillite personnelle prononcée, le débiteur n'est pas à l'abri de la reprise des poursuites sur les biens et salaires qu'il recevra postérieurement à la clôture, et ce dans la limite de la prescription de la créance (qui a été interrompue par la déclaration de créance, étant précisé que la prescription est suspendue pendant toute la durée de la procédure et recommence donc à courir avec le jugement de clôture)

3 - Mise sous contrôle des droits de vote du "failli" dans les personnes morales: un effet obligatoire

"Le droit de vote des dirigeants frappés de la faillite personnelle ... est exercé dans les assemblées des personnes morales soumises à une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire par un mandataire désigné par le tribunal à cet effet, à la requête de l'administrateur, du liquidateur ou du commissaire à l'exécution du plan. " (article L653-9).

Cette mesure est un peu singulière car elle ne concerne pas tous les droits de vote dont la personne condamnée est titulaire, mais uniquement ceux correspondant à une entreprise en procédure collective, qui n'est pas, a priori, celle dans laquelle les enjeux financiers sont les plus importants.

4 - Cession forcée des droits sociaux du "failli" au profit des créanciers: une mesure que le tribunal peut imposer

"Le tribunal peut enjoindre à ces dirigeants ou à certains d'entre eux, de céder leurs actions ou parts sociales dans la personne morale ou ordonner leur cession forcée par les soins d'un mandataire de justice, au besoin après expertise. Le produit de la vente est affecté au paiement de la part des dettes sociales dans le cas où ces dettes ont été mises à la charge des dirigeants." (article L653-9)

Là encore cette mesure est en pratique de mise en oeuvre difficile, tant il est vrai que la cession des droits sociaux d'une entreprise en difficulté est en principe peu attractive pour les candidats, sans évidemment cas particuliers ou recherche d'une incidence fiscale

5 - Incapacité élective: une mesure que le tribunal peut prononcer

"Le tribunal qui prononce la faillite personnelle peut prononcer l'incapacité d'exercer une fonction publique élective. L'incapacité est prononcée pour une durée égale à celle de la faillite personnelle, dans la limite de cinq ans. Lorsque la décision est devenue définitive, le ministère public notifie à l'intéressé l'incapacité, qui produit effet à compter de la date de cette notification." (article L653-10)

Cette mesure permet d'écarter notamment de la vie politique des dirigeants fautifs

Cette mesure est facultative, et la décision doit être motivée Cass com 1er juillet 2020 n°18-17786

L'interdiction de gérer

Généralités

L'interdiction de gérer est une sanction présentée par les textes comme de moindre conséquence que la faillite personnelle, et elle est souvent prononcée dans les cas les moins graves.

Les effets de l'interdiction de gérer

Les effets sont moins importants que ceux de la faillite personnelle (ils sont présentés avec la même numérotation que ceux de la faillite personnelle pour faciliter la comparaison)

1 - l'interdiction de gérer peut être limitée à une ou plusieurs entreprises.

C'est une différence avec la faillite personnelle, puisque l'interdiction de gérer attachée à la faillite personnelle concerne toutes les entreprises. Cependant, si le jugement ne précise pas quelles sont les activités ou entreprises dont la gestion est interdites, l'interdiction s'applique à toutes (Cass com 11 février 2014 n°12-21069). L'interdiction peut viser les activités de nature professionnelle ou sociales Cass crim 24 mai 2018 n°18-81240. Cependant le texte ne vise pas les entreprises dites libérales Cass com 19 mai 2021 n°20-12049

2 - absence de reprise de poursuites après clôture de la liquidation

La condamnation à une interdiction de gérer ne permet pas aux créanciers, après la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire, de reprendre les poursuites contre le débiteur personne physique. C'est une différence majeure avec la faillite personnelle, destinée à permettre au débiteur de se "reconstruire" sans être exposé pour l'avenir, à de nouvelles poursuites de ses créanciers sur ses biens nouveaux.

3 et 4 - Les effets sur les droits de vote et la possibilité de cession forcée des titres sont les mêmes qu'en cas de faillite personnelle

5 - Inéligibilité: il n'y a pas de possibilité d'inéligibilité

Faillite personnelle ou interdiction de gérer : différence de conséquence

Les différences majeures:

- en cas d'interdiction de gérer l'interdiction peut être limitée alors qu'en faillite personnelle elle porte sur toutes les entreprises.

- en cas d'interdiction de gérer les créanciers ne recouvrent pas leurs droit de poursuite après clôture

- en cas d'interdiction de gérer il n'y a pas d'inéligibilité

Faillite personnelle ou interdiction de gérer ? Dans quel cas ?

Avant tout, le Tribunal peut - et même doit -moduler la peine en tenant compte "de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle" Cass crim 1er février 2017 n°15-85199. Les faits reprochés doivent être intervenus dans la gestion de l'entreprise débitrice et le Tribunal ne peut invoquer d'office des agissements du dirigeant dans une autre société Cass com 8 avril 2021 n°19-25802

Date des faits

Les faits considérés sont nécessairement antérieurs à l'ouverture de la procédure collective Cass com 6 mars 2019 n°17-26495 et des faits postérieurs ne peuvent fonder les poursuites Cass com 20 octobre 2021 n°20-10557 Cass com 17 novembre 2021 n°20-19060 Cass com 29 mars 2023 n°21-25161 (et c'est le cas des faits commis le jour du jugement, qui sont nécessairement postérieurs puisque le jugement prend effet le jour de son prononcé à zéro heure Cass com 23 octobre 2019 n°18-12181

Quelques cas de faillite personnelle 

Les cas de faillite personnelle sont nombreux dans la loi, et correspondent à des actes anormaux de gestion qui mettent en péril les intérêts des créanciers. Ils sont prévus à L653-3  du code de commerce suivants 

Le débiteur ne peut être condamné pour un cas qui n'est pas prévu Cass com 18 janvier 2023 n°21-13647 pour le défaut de suivi.

- poursuite abusive d'une exploitation déficitaire, emploi de moyens ruineux de se procurer des fonds, paiements d'un créancier au préjudice des autres.

(par exemple Cass com 23 Mai 2000 n°98-13729) y compris quand la poursuite d'activité intervient alors que l'entreprise est déjà en état de cessation des paiements Cass com 13 avril 2022 n°21-12994

- détournement ou dissimulation d'actif du débiteur

En conséquence de la loi du 22 mai 2019, suppression, pour les EIRL, du cas suivant  "Avoir disposé des biens du patrimoine visé par la procédure comme s'ils étaient compris dans un autre de ses patrimoines"

"L'avance en compte courant consentie par un associé à une société est, sauf stipulation contraire, remboursable à tout moment. Son remboursement constitue dès lors le paiement d'une dette de la société, sans pouvoir être qualifié de détournement d'actif pour l'application du premier de ces textes". Cass com 20 octobre 2021 n°20-15736

- actes dans l'intérêt du dirigeant 

"1° Avoir disposé des biens de la personne morale comme des siens propres ;

2° Sous le couvert de la personne morale masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un intérêt personnel ;

3° Avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement ;

4° Avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale"

Il s'agit par exemple de l'utilisation des biens de l'entreprise dans son intérêt personnel ou la réalisation d'opérations dans un autre intérêt que celui de l'entreprise, et notamment pour favoriser une autre entreprise dans laquelle l'auteur est intéressé directement ou indirectement (la sanction n'est pas applicable si le dirigeant n'est pas intéressé dans le bénéficiaire des actes Cass com 21 octobre 2020 n°19-14138

L'usage contraire à l'intérêt de l'entreprise peut être réuni, sans qu'il soit nécessaire d'établir que cet usage a provoqué la liquidation judiciaire Cass com 18 mai 2022 n°20-22245

- destruction ou dissimulation de la comptabilité, abstention de tenue d'une comptabilité dans les règles légales

Voir comptabilité

Evidemment le grief ne peut être retenu que si l'entreprise était sujette à obligation de tenue de comptabilité Cass com 29 septembre 2021 n°19-25112 (cas pour une société civile)

On peut préciser que le défaut de remise de la comptabilité ne suffit pas à justifier le prononcé de la faillite personnelle (Cass com 27 février 2007 n°05-21795) ce qui est un faux problème puisque le débiteur qui n'aura pas remis, poursuivi pour défaut de tenu de comptabilité, devra rapporter la preuve de son existence. En outre les mêmes faits (défaut de remise de la comptabilité) tombent sous le cour de l'absence de collaboration, également sanctionnée par la faillite personnelle.

"L'arrêt retient, tant par motifs propres qu'adoptés, que le registre des ventes de véhicules n'était pas tenu correctement, que des opérations de vente et achat étaient comptabilisées sans aucune cohérence avec ce registre, s'agissant aussi bien des prix indiqués que des fournisseurs ou acheteurs mentionnés, et que manquaient de nombreuses pièces justificatives, dont au moins dix-huit factures d'achat de véhicules à l'étranger pourtant enregistrées en comptabilité. Ayant ainsi fait ressortir, sans se déterminer par les seuls motifs reproduits par le moyen, le caractère fictif, manifestement incomplet ou irrégulier de la comptabilité, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de prononcer la faillite personnelle." Cass com 23 septembre 2020 n°18-21351

- paiement d'un créancier au détriment des autres, postérieurement à la date de cessation des paiements

Exemple de refus Cass com 20 octobre 2021 n°20-15736

- l'absence de collaboration avec les "organes de la procédure" (voir ce mot)

C'est également un cas de faillite personnelle : c'est notamment le cas du débiteur qui ne remet pas aux mandataires de justice les documents nécessaires, ou qui, bien que convoqué, ne se présente pas. La jugement doit caractériser en quoi le débiteur s'est volontairement abstenu de coopérer, et le débiteur qui adresse un mail précis au mandataire de justice ne peut sans autre considération être considéré comme refusant de coopérer Cass com 17 octobre 2017 n°17-14127

De même le débiteur qui ne communique pas la liste de ses créanciers ou s'abstient de contester de créances n'est pas pour autant coupable d'abstention volontaire visée à l'article L653-3 Cass com 5 février 2020 n°18-18461

Les difficultés personnelles du dirigeant, et notamment son état de santé, ou le fait que, sans domicile fixe, il ne recevait pas les convocations du liquidateur, ne peuvent caractériser l'abstention volontaire de collaboration Cass com 1er juillet 2020 n°18-25931

"D'une part, l'arrêt relève que M. A... n'a pas communiqué, lors des réunions des 18 et 21 novembre 2016, auxquelles il s'était présenté, puis à la suite d'un courriel confirmant une nouvelle réunion fixée au 1er décembre 2016, de nombreux documents essentiels au bon déroulement de la procédure collective qui lui avaient été réclamés, soit « les statuts de la société et la répartition du capital social, les bilans et compte de résultat détaillés établis depuis la création de la société, les attestations d'assurances, une situation active et passive ainsi qu'un compte de résultat établi depuis la clôture du bilan et arrêté au jour du jugement d'ouverture, la situation de trésorerie actuelle, le compte d'exploitation prévisionnel établi mois par mois sur six mois et validé par l'expert-comptable de la société, les prévisions de trésorerie établies mois par mois sur six mois et validées par l'expert-comptable de la société, le carnet de commandes signées, le registre du personnel, les PV d'AG, le questionnaire dûment complété ». Il souligne que M. A..., qui a fait état d'incarcération et perquisition postérieures à ces demandes, n'a pas justifié d'une impossibilité de remettre lesdits documents. Il ajoute que M. A... n'a pas régularisé l'ouverture d'un compte bancaire spécifique lié à la procédure de redressement, ce qui ne pouvait que rendre très difficile le déroulement de la procédure. En faisant ainsi ressortir que l'abstention volontaire de M. A... de coopérer avec les organes de la procédure avait fait obstacle à son bon déroulement, la cour d'appel a légalement justifié sa décision.

5. D'autre part, l'arrêt relève, par motifs propres, que le défaut de coopération de M. A..., qui s'est manifesté dès la procédure de redressement, s'est produit à plusieurs reprises et étalé dans le temps en portant sur un nombre particulièrement important de documents utiles, et que le caractère incomplet et irrégulier de la comptabilité a privé le dirigeant de toute possibilité d'évaluation de la situation de l'entreprise, contribué à sa mauvaise appréciation et conduit à un retard dans la déclaration de cessation des paiements. Il met de plus en exergue l'importance de l'insuffisance d'actif en résultant. Il indique en outre que M. A..., âgé de 48 ans, et diplômé de l'ENSEM et de HEC, avait occupé, avant la création de la société Integrated Home technologies, des postes salariés notamment de directeur puis directeur général depuis 1998, faisant ressortir la conscience qu'il avait des faits qui lui étaient reprochés. Il souligne enfin expressément, par motifs adoptés, la gravité des griefs retenus. C'est ainsi par une décision motivée que la cour d'appel a fixé le quantum de l'interdiction de gérer de M. A...
." Cass com 23 septembre 2020 n°19-12545

- Signalement par le débiteur d'une créance fictive

L'ordonnance du 12 mars 2014, applicable aux procédures ouvertes à compter du 1er juillet 2014 a ajouté un nouveau cas de faillite personnelle à l'article L653-5 du code de commerce: "7° Avoir déclaré sciemment, au nom d'un créancier, une créance supposée". C'est la prise en considération du nouvel effet de la liste des créanciers remise par le débiteur à l'ouverture de la procédure, qui vaut "pré-déclaration" de créance pour le compte du créancier (voir en page d'accueil le PDF sur le processus de déclaration de créance): il s'agit d'éviter que le débiteur signale des créances inexistantes au bénéfice de créanciers fictifs dont il imagine qu'il pourra ainsi être payé aux détriments des autres.

Attention : L'absence de dépôt de la déclaration de cessation des paiements dans les 45 jours n'étant sanctionné que par l'interdiction de gérer et pas par la faillite personnelle, la juridiction ne peut donc prononcer la faillite personnelle en considération de plusieurs fautes, certaines effectivement sanctionnées par la faillite personnelle, et également en considération du défaut de dépôt de la déclaration de cessation des paiements dans les 45 jours : le principe de proportionnalité de la sanction n'est pas respecté et la décision doit être réformée (Cass com 28 février 2018 n016-27591). La pratique qui consiste parfois à énumérer dans la demande de condamnation un ensemble de fautes, est donc à bannir et il faut cibler chaque faute en fonction de sa sanction.

- Non paiement de la condamnation au titre d'une action en comblement de passif

Au visa de l'article L653-6 du code de commerce la tribunal peut prononcer la faillite personnelle d'un dirigeant qui n'a pas payé le montant de la condamnation

- Adaptation du texte en conséquence à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 14 février 2022 (15 mai 2022) relative à l'entrepreneur individuel

Un nouveau cas de faillite personnelle est instauré L653-3 

II.- Peuvent en outre, sous la même réserve, être retenus à l'encontre d'un entrepreneur individuel à responsabilité limitée ou d'un entrepreneur individuel relevant du statut défini à la section 3 du chapitre VI du titre II du livre V les faits ci-après :

1° (Abrogé)

2° Sous le couvert de l'activité ou du patrimoine visés par la procédure masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un intérêt autre que celui de cette activité ou de ce patrimoine ;

3° Avoir fait des biens ou du crédit de l'entreprise ou du patrimoine visés par la procédure un usage contraire à l'intérêt de cette entreprise ou de ce patrimoine à des fins personnelles ou pour favoriser une personne morale ou une entreprise dans laquelle il était intéressé, directement ou indirectement, ou un patrimoine distinct lui appartenant.

Dans les cas de faillite personnelle: le tribunal peut choisir entre les deux sanctions et ne prononcer que l'interdiction de gérer.

Dans tous les cas de faillite personnelle, le tribunal peut choisir de ne prononcer que l'interdiction de gérer, sanction moins sévère (L653-8)

Cas spécifiques d'interdiction de gérer et la date de cessation des paiements retenue

Il existe également plusieurs circonstances dans laquelle le tribunal ne peut prononcer que l'interdiction de gérer, et notamment les trois cas suivants (L653-8)

l'absence de dépôt d'une déclaration de cessation des paiements dans les 45 jours. Il s'agit de sanctionner le débiteur qui n'a pas signalé suffisamment tôt son état de cessation des paiements, ce qui cause évidemment un préjudice avec les créanciers qui ont continué à s'engager avec lui et qui ne l'auraient pas fait s'il avait été diligent.

La date de cessation des paiements retenue pour le prononcé de l'interdiction de gérer est celle fixée par le jugement d'ouverture de la procédure ou dans un jugement de report de date de cessation des paiements ( article R653-1 du code de commerce et antérieurement Cass com 5 octobre 2010 n°09-69010) étant précisé que "S'il résulte de l'arrêt que M. [X] n'avait pas conscience de la cessation des paiements au 6 octobre 2014, date à laquelle avait été reportée la date de la cessation des paiements de la société Cerebio, la cour d'appel retient aussi, par motifs propres et adoptés, que, dès le premier semestre 2015, il était impossible de payer la part patronale des cotisations sociales, qu'à partir du dernier trimestre de la même année la TVA n'était pas non plus réglée et que depuis quatre mois avant l'ouverture de la procédure collective, le paiement des salaires n'était plus assuré, ce dont elle a pu déduire qu'en attendant le 23 mars 2016, date mentionnée par le jugement confirmé, pour demander l'ouverture d'une procédure collective, M. [X] avait omis sciemment de déclarer la cessation des paiements dans le délai de quarante-cinq jours prévu par l'article L. 653-8, alinéa 3, du code de commerce." Cass com 12 janvier 2022 n°20-21427

Attention la Cour de cassation considère à juste titre que bien qu'assigné en redressement ou liquidation judiciaire par un créancier; le débiteur n'est pas dispensé de déposer une déclaration de cessation des paiements ( Cass com 14 janvier 2014, n°12-29807): il s'agit d'éviter que le débiteur fasse durer la procédure sur poursuite du créancier tout en l'exonérant de ses responsabilités.

L'article 239 de la loi n°2015-990 du 6 Aout 2015 dite loi Macron modifiant l’article L653-8 du code de commerce a ajouté le mot "sciemment" au texte: ainsi à compter du 8 aout 2015 (date d'entrée en vigueur de la loi) pour sanctionner le débiteur il conviendra d'établir que c'est en connaissance de cause qu'il n'a pas déclaré l'état de cessation des paiements.

On pouvait penser que faute de précision ce texte s'applique aux procédures en cours, et ce d'autant qu'il est favorable au débiteur et que c'est donc généralement la règle en matière pénale, généralement élargie en matière de sanction. Cette position semblait être confortée par la jurisprudence (CA Paris 24 novembre 2015 pole 5 ch 8 14-23088)

Finalement la Cour de Cassation a expressément écarté l'application du nouveau texte aux procédures en cours (Cass com 14 juin 2017 n°15-27851) ce qui a donné lieu à rejet d'une question prioritaire de constitutionnalité (Cass com 14 décembre 2017 n°17-18918) au motif que l'arrêt ne s'est pas prononcé sur la rétroactivité de dispositions à caractère de "punition", mais dans un arrêt plus récent la Cour de cassation admet l'application du texte nouveau à une situation antérieure à son entrée en vigueur au motif qu'il est "moins sévère" Cass com 24 Mai 2018 n°17-18918

Nous aurions été plutôt favorable à une application "rétroactive" même s'il est exact que la faillite personnelle n'est pas une mesure pénale, ce qui a déjà été jugé Cass com 19 décembre 2006 n°05-19088 

Il semble cependant que le mot « sciemment » pour sanctionner l’absence de déclaration de cessation des paiements dans les 45 jours, puisse correspondre à la situation d'un dirigeant qui savait parfaitement qu'il ne pouvait assurer le règlement des charges courantes, que les salaires étaient impayés, et que l'entreprise subissait de nombreuses poursuites.

L'absence de dépôt de la déclaration de cessation des paiements dans les 45 jours n'étant sanctionné que par l'interdiction de gérer  (Cass com 7 novembre 2018 n°17-21284 et textes applicables) et pas par la faillite personnelle (Cass com 12 janvier 2022 n°19-25230), la juridiction ne peut prononcer la faillite personnelle en considération de plusieurs fautes, certaines effectivement sanctionnées par la faillite personnelle, et également en considération du défaut de dépôt de la déclaration de cessation des paiements dans les 45 jours : le principe de proportionnalité de la sanction n'est pas respecté et la décision doit être réformée (Cass com 28 février 2018 n°16-27591 et Cass com 16 janvier 2019 n°17-25778)

- l'absence, de mauvaise foi, de remise au mandataire judiciaire, à l'administrateur ou au liquidateur, des documents nécessaires au déroulement de la procédure, et notamment les documents permettant la finalisation de l'inventaire, la liste des créanciers et des instances en cours (L622-6)

- le fait de n'avoir pas, sciemment, informé les créanciers pour lesquels une instance était en cours, de l'ouverture de la procédure.

Il s'agit d'un nouveau cas d'interdiction de gérer, introduit par l'ordonnance du 12 mars 2014 applicable aux procédures ouvertes à compter du 1er juillet 2014, en conséquence du nouvel article L622-22 du code de commerce qui crée une nouvelle obligation à la charge du débiteur: informer les parties aux instances en cours. Le texte dispose en effet :

"Sous réserve des dispositions de l'article L. 625-3, les instances en cours sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l'administrateur ou le commissaire à l'exécution du plan nommé en application de l'article L. 626-25 dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.

 Le débiteur, partie à l'instance, informe le créancier poursuivant de l'ouverture de la procédure dans les dix jours de celle-ci."

Tableau des cas de faillite personnelle et/ou d'interdiction de gérer

(les couleurs signalent des faits identiques, mentionnés à des textes différents pour des auteurs différents)

SANCTIONS APPLICABLES : Tableau synthétique des faits reprochés au regard des textes (principaux cas)

 

Sanction

Auteur

Article

Faits

 

Faillite personnelle ou à défaut interdiction de gérer (L653-8 alinéa 1)

 

- Personnes physiques exerçant une activité commerciale ou artisanale, agriculteurs et toute autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé (sauf  celles qui sont soumises à des règles disciplinaires dépendant d’un ordre professionnel ou assimilé.)

 

- Personnes physiques, dirigeants de droit ou de fait de personnes morales ;

 

- Personnes physiques, représentants permanents de personnes morales, dirigeants des personnes morales

Absence volontaire de coopération avec le liquidateur

L653-5 5°

Avoir, en s'abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure, fait obstacle à son bon déroulement

 

Absence de comptabilité ou irrégularité comptable

L653-5 6°

Avoir fait disparaître des documents comptables, ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables

 

Anomalies dans la poursuite d’activité

L653-3 I 1°

Avoir poursuivi abusivement une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements

 

L653-5 2°

Avoir, dans l'intention d'éviter ou de retarder l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, fait des achats en vue d'une revente au-dessous du cours ou employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds

 

L653-5 1°

Avoir exercé une activité commerciale, artisanale ou agricole ou une fonction de direction ou d'administration d'une personne morale contrairement à une interdiction prévue par la loi

 

Actes anormaux dans l’intérêt de tiers

L653-5 3°

Avoir souscrit, pour le compte d'autrui, sans contrepartie, des engagements jugés trop importants au moment de leur conclusion, eu égard à la situation de l'entreprise ou de la personne morale

 

L653-5 4°

Avoir payé ou fait payer, après cessation des paiements et en connaissance de cause de celle-ci, un créancier au préjudice des autres créanciers

 

L653-5 7°

Avoir déclaré sciemment, au nom d'un créancier, une créance supposée

 

Détournement ou dissimulation d’actif

L653-3 I 3°

Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de son actif ou frauduleusement augmenté son passif.

 

Entrepreneur individuel à responsabilité limitée

L653-3 II 1°

Abrogé

Avoir disposé des biens du patrimoine visé par la procédure comme s'ils étaient compris dans un autre de ses patrimoines

 

L653-3 II 2°

Sous le couvert de l'activité visée par la procédure masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un intérêt autre que celui de cette activité

 

L653-3 II 3°

Avoir fait des biens ou du crédit de l'entreprise visée par la procédure un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement.

 

Tout dirigeant, de droit ou de fait, d'une personne morale

L653-4 1°

Avoir disposé des biens de la personne morale comme des siens propres

 

L653-4 2°

Sous le couvert de la personne morale masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un intérêt personnel

 

L653-4 3°

Avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement

 

L653-4 4°

Avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale

 

L653-4 5°

Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif ou frauduleusement augmenté le passif de la personne morale

 

Dirigeant de la personne morale ou entrepreneur individuel à responsabilité limitée

L653-6

Ne pas avoir acquitté les dettes mises à leur charge en application de l'article L. 651-2.

 

 

Interdiction de gérer

 

- Personnes physiques exerçant une activité commerciale ou artisanale, agriculteurs et toute autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé (sauf  pour celles qui sont soumises à des règles disciplinaires dépendant d’un ordre professionnel ou assimilé.)

 

- Personnes physiques, dirigeants de droit ou de fait de personnes morales ;

 

- Personnes physiques, représentants permanents de personnes morales, dirigeants des personnes morales

 

Absence de remise au liquidateur des documents utiles au déroulement de la procédure

 

 

L653-8

 

Ne pas avoir remis au mandataire judiciaire, à l'administrateur ou au liquidateur les renseignements qu'il est tenu de lui communiquer en application de l'article L. 622-6 dans le mois suivant le jugement d'ouverture

 

 

 

L653-8

 

Avoir sciemment, manqué à l'obligation d'information prévue par le second alinéa de l'article L. 622-22

 

 

Non déclaration de la cessation des paiements

 

 

 

L653-8

 

Avoir omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir, par ailleurs, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.

 

 

 

Faillite personnelle et interdiction de gérer: quelle sanction en cas de non respect ?

Le non respect de la faillite personnelle ou de l'interdiction de gérer est sanctionné pénalement.

L'article L654-15 du code de commerce dispose: "Le fait, pour toute personne, d'exercer une activité professionnelle ou des fonctions en violation des interdictions, déchéances ou incapacité prévues par les articles L. 653-2 et L. 653-8, est puni d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 375 000 euros"

La sanction est applicable que les fonctions ou l'activité professionnelle soit exercée directement ou indirectement par l'intermédiaire d'un prête nom du le débiteur est en réalité le dirigeant de fait. Pour un exemple Cass crim 7 novembre 2017 n°17-85773 ou Cass crim 26 janvier 2022 n°21-81822

Faillite personnelle et interdiction de gérer: comment ces mesures prennent fin ?

- La fin automatique des sanctions

Les mesures prennent automatiquement fin à l'expiration de la durée fixée par le tribunal (15 ans maximum). L'interdiction de fonction élective prend automatiquement fin au bout de 5 ans

Les mesures prennent également fin par l'effet d'une clôture de la liquidation judiciaire pour extinction du passif (L653-11), ce qui est logique puisque tous les créanciers ont été payés.

- La fin des sanctions sur décision du tribunal

Enfin:

- la faillite personnelle peut prendre fin, à l'appréciation du tribunal, si le "failli" a "apporté une contribution suffisante" au paiement des créanciers

- l'interdiction de gérer peut prendre fin, à l'appréciation du tribunal, si le débiteur présente des "garanties démontrant" sa capacité à gérer et administrer une entreprise

Le fichier national des interdits de gérer

Voir la définition

Les sanctions pénales: le délit de banqueroute

Généralités et auteurs possibles

Elles reposent essentiellement sur le délit de banqueroute

L'infraction est définie à l'article L654-2 du code de commerce
Il s’agit d’un délit passible de 5 ans d’emprisonnement et de 75.000 € d’amende, outre privation des droits civiques et de famille, interdiction fonctions élective, interdiction d’exercice de la profession à l’occasion de laquelle infraction commise, exclusion marchés publics, interdictions d’émettre des chèques (Cass crim 18 Mars 2020 n°18-84214)
Peuvent être sanctionnés les chefs d’entreprise et dirigeants qui auront notamment détourné des actifs de l’entreprise, tenu une comptabilité fictive, fait disparaître la comptabilité.

L'article L654-1 délimite les auteurs de banqueroute et précise que le délit est applicable "1° A toute personne exerçant une activité commerciale ou artisanale, à tout agriculteur et à toute personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ;

2° A toute personne qui a, directement ou indirectement, en droit ou en fait, dirigé ou liquidé une personne morale de droit privé ;

3° Aux personnes physiques représentants permanents de personnes morales dirigeants des personnes morales définies au 2° ci-dessus."

Le dirigeant de fait peut être condamné Cass crim 20 mars 2019 n°18-80034, mais par exemple une personne physique à laquelle la procédure a été étendue par confusion ne pourra être poursuivie comme auteur de banqueroute si elle n'exerce pas une activité économique (on rappellera que dans les législations antérieures à la loi de sauvegarde applicable à compter de 2006, les procédures collectives étaient applicables aux commerçants, et, par voie de conséquence il en était de même du délit de banqueroute).

Encore faut-il démontrer que le prévenu était dirigeant de droit ou de fait Cass Crim 25 octobre 2023 n°22-84650

Bien évidemment en tout état une personne qui ne peut être reconnue auteur en raison de son activité peut, sans considération de celle-ci, être complice du délit de banqueroute.

Il convient de préciser que les poursuites pour banqueroute n'interdisent pas des poursuites distinctes pour faux et usage de faux Cass crim 12 janvier 2022 n°20-86312 mais l'auteur ne peut être condamné pour recel Cass crim 13 avril 2022 n°19-84831

Date des faits

On tire de la jurisprudence sur la prescription que les faits peuvent être postérieurs au jugement d'ouverture de la procédure, au contraire de ce qui est jugé pour la faillite personnelle.

La procédure

S'agissant d'une sanction pénale, elle relève exclusivement de la compétence du tribunal correctionnel et c'est en principe le Procureur de la République qui est à l'origine de l'action. Le liquidateur peut se constituer partie civile pour demander des dommages et intérêts pour le compte des créanciers qu'il représente.

L'action peut également être provoquée par une majorité de créanciers contrôleurs, en cas de carence du liquidateur (et dans ce cas le désistement de l'un deux après le réquisitoire introductif est sans incidence sur la recevabilité de la plainte, présentée initialement par deux contrôleurs Cass crim 8 juillet 2020 n°18-83536 )

Accessoirement à la banqueroute, le Tribunal correctionnel peut prononcer la faillite personnelle ou une interdiction de gérer (mais voir cependant si dessus la décision d'inconstitutionnalité de l'article L654-6 du code de commerce: cela suppose qu'une telle sanction n'ait pas déjà été prononcée par le tribunal de la procédure collective)

Le tribunal peut également accorder des dommages intérêts aux mandataires de justice ( liquidateur, mandataire judiciaire) qui se constitue partie civile pour le compte des créanciers victimes de l'infraction. Classiquement la constitution de partie civile peut être régularisée à l'audience Cass crim 10 octobre 2023 n°22-85694 

Dans ce cas les sommes recouvrées sont réparties aux créanciers en respectant l'ordre des privilèges (article L643-8 du code de commerce et Cass com 11.06.2014 n°13-12.658)

Banqueroute la prescription

Au visa de l'article L654-16 du code de commerce le délai de prescription de l'action court à compter du jugement d'ouverture de la procédure si les faits sont antérieurs (Cass crim 25 novembre 2020 n°19-85091 Cass crim 15 septembre 2021 n°20-86484 et le jugement de conversion du redressement en liquidation judiciaire ne repousse pas le point de départ du délai (même arrêt).

Si les faits sont postérieurs, la prescription court à compter de leur révélation, c'est à dire à la date à laquelle ils étaient connus ( et non de l'enquête pénale Cass crim 1er juillet 2009 n°08-87080), ce qui est généralement la date de commission des faits (Cass crim 25 novembre 2020 n°19-85091)

S'agissant d'un délit la prescription de l'action est de 6 ans (article 8 du Code de procédure pénale) . Antérieurement au 1er Mars 2017, la prescription de l'action était de 3 ans. L'augmentation du délai de prescription a un effet inattendu ; l'action en faillite personnelle se prescrit toujours par 3 ans, mais comme la faillite personnelle peut également être prononcée en peine accessoire de la banqueroute, on peut se demander si le prononcé de cette peine est enfermé dans le délai de l'action pénale (6 ans) ou de l'action en faillite personnelle (3 ans). A priori cela devrait être 6 ans puisque c'est dans ce cas une peine complémentaire, mais cela ne semble pas avoir été jugé à ce jour.

Banqueroute délit intentionnel / tentative non punissable

Il convient en premier lieu de rappeler que l'infraction est intentionnelle.

Elle suppose l'intention délictuelle (par exemple nécessite la connaissance de l'état de cessation des paiements "Attendu que, pour déclarer Didier X... et Francis Y... coupables, respectivement, de banqueroute par détournement d'actif et de recel des fonds procurés par ce délit, l'arrêt énonce, notamment, que les sommes versées pour frais et honoraires n'ont pas été affectées au paiement de dettes sociales mais ont rétribué des diligences accomplies dans l'intérêt du dirigeant ; que les juges relèvent que les frais facturés ne sont assortis d'aucun justificatif ; qu'ils ajoutent que le paiement d'une somme importante en période suspecte, dans des conditions inhabituelles, constitue un détournement punissable, l'élément intentionnel résultant de la connaissance qu'avaient les prévenus, à la date du virement des fonds, de l'état de cessation des paiements de la société, déclaré quatre jours plus tard ;Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré les prévenus coupables" Cass crim 5 avril 2006 n°04-87765) et ne peut être constituée par des faits d'imprudence.

Voir également Cass crim 12 septembre 2018 n°17-83155

Plus précisément  la constitution de l’infraction suppose la démonstration de la volonté de l’auteur de porter atteinte aux droits des créanciers (Cass crim 12 septembre 2018 n°17-83155, Cass crim 13 juin 1996 n°95-83280).

« le délit de banqueroute par détournement d'actif suppose l'existence d'un acte de disposition volontaire accompli par un élément du patrimoine du débiteur après la date de cessation des paiements » (Cass crim 21 septembre 1994 n°93-85544) ou encore « le délit de banqueroute par détournement d'actif suppose, pour être constitué, l'existence d'une dissipation volontaire d'un élément du patrimoine d'un débiteur en état de cessation des payements par l'une des personnes désignées à l'article 196 de la loi du 25 janvier 1985 » (Cass crim 22 janvier 1998 n°96-86426).

Ainsi par exemple en matière de détournement d'actif, une vente dont le prix a été versé à la procédure collective, n’est pas constitutive de banqueroute (Cass crim 13 juin 1996 n°95-83280), pas plus qu’une vente à un prix correct qui a régulièrement été payé (Cass crim 10 mars 2020 n°09-83016).

En matière de défaut de tenue de comptabilité " Il résulte de ces textes que la caractérisation de l’élément intentionnel des délits de banqueroute par absence de comptabilité ou tenue d’une comptabilité manifestement irrégulière suppose la seule conscience de son auteur de se soustraire à ses obligations comptables légales.

14. Elle n’exige pas la preuve que le prévenu a eu la volonté soit d’éviter ou de retarder la constatation de l’état de cessation des paiements, soit d’affecter la consistance de l’actif disponible dans des conditions de nature à placer l’intéressé dans l’impossibilité de faire face au passif exigible." Cass crim 25 novembre 2020 n°19-85205

En outre la tentative n'est pas punissable.

Le juge doit motiver sa décision Cass crim 13 avril 2022 n°21-85179

Quelques cas de banqueroute

Peuvent être sanctionnés les chefs d’entreprise et dirigeants qui notamment (article L654-2 du code de commerce)

- ont détourné ou dissimulé des actifs du débiteur (par exemple Cass crim 17 janvier 2018 n°16-87135 et Cass crim 12 septembre 2018 n°17-83155 pour des prélèvements effectués postérieurement à la date de cessation des paiements ou Cass crim 18 mars 2020 n°18-86492 pour le maintien par le dirigeant d'une rémunération excessive, Cass Crim 21 octobre 2020 n°19-86050 pour une résiliation de bail organisée dans la perspective de création d'une autre entreprise, ou Cass crim 8 mars 2017 n°15-87457 pour des détournements stricto sensu et Cass crim 16 janvier 2019 n°17-84969. Voir également Cass crim 25 octobre 2023 n°22-854650 pour la mise en fiducie d'un actif immobilier.

La Cour de Cassation a eu en l'espèce l'occasion d'appliquer le principe selon lequel une décision de justice ne peut être constitutive d'infraction (par exemple « qu’en vertu du principe constitutionnel qui garantit l’indépendance des magistrats du siège, leurs décisions juridictionnelles ne peuvent être critiquées, dans les motifs et dans le dispositif qu’elles comportent, que par le seul exercice des voies de recours prévues par la loi ; que ce principe, ainsi d’ailleurs que le secret du délibéré, met obstacle à ce qu’une décision de justice puisse être considérée comme constitutive par elle-même d’un crime ou d’un délit .. » Cass crim 19 novembre 1981 n°81-94556, le tout évidemment sauf concert frauduleux (Cass crim 26 juin 1997 n°96-81283, qui évoque des « manœuvres (du juge) propres à faire obtenir à un tiers une décision de justice qui lui soit favorable » ou absence d'information de la juridiction (ou encore décision obtenue par fraude, par exemple dans le cas où le dirigeant a dissimulé sa participation par l'intermédiaire d'un "homme de paille" dans la société repreneuse et a manifesté, quelques jours après la vente autorisée son intention de revendre beaucoup plus cher, ce qui démontrait qu'il avait manoeuvré pour dissimuler le prix réel Cass crim 7 décembre 1992 n°91-83937

Ainsi en matière de banqueroute, la réalisation d'actif par le liquidateur, autorisé par le juge commissaire, n'est pas constitutif de banqueroute Cass crim 22 février 1996 n°95-82506 (cet arrêt est en outre relatif à un cas outrancier dans lequel le dirigeant de fait de la société débitrice a acquis le fonds de commerce pour un prix déterminé, par l'intermédiaire d'une société constituée pour la circonstance, laquelle l'a revendu ensuite bien plus cher, dans des conditions en réalité convenues avant la liquidation avec le même acheteur. Le dirigeant s'est vanté d'avoir "fait une bonne farce" au liquidateur, mais, malgré ces circonstances, il a été jugé que la cession  avait été opérée par le liquidateur autorisé par le juge commissaire, et que le dirigeant n'avait lui même effectué aucun acte de disposition, alors même que "le détournement d'actif suppose un acte de disposition volontaire accompli sur un élément du patrimoine du débiteur après la date de cessation des paiements "

La constitution de l’infraction suppose la démonstration de la volonté de l’auteur de porter atteinte aux droits des créanciers Cass crim 12 septembre 2018 n°17-83155, Cass crim 13 juin 1996 n°95-83280 

« le délit de banqueroute par détournement d'actif suppose l'existence d'un acte de disposition volontaire accompli par un élément du patrimoine du débiteur après la date de cessation des paiements » Cass crim 21 septembre 1994 n°93-85544

Ou encore « le délit de banqueroute par détournement d'actif suppose, pour être constitué, l'existence d'une dissipation volontaire d'un élément du patrimoine d'un débiteur en état de cessation des payements par l'une des personnes désignées à l'article 196 de la loi du 25 janvier » 1985 Cass crim 22 janvier 1998 n°96-86426.

Les détournements doivent donc être postérieurs à l'état de cessation des paiements et l'avoir provoquée Cass crim 9 février 2022 n°20-81038 

C’est donc l’appauvrissement de la liquidation qui sera l’élément déterminant de l’infraction.

L’infraction repose nécessairement sur un acte de disposition au détriment du débiteur en liquidation judiciaire (Cass crim 24 avril 1984 n°83-92675)

« Le délit de banqueroute par détournement d'actif suppose, pour être constitué à l'égard d'un dirigeant social, l'existence d'une dissipation volontaire d'un élément du patrimoine d'une société en état de cessation des paiements » Cass crim 22 aout 1995 n°94-83750

« le délit de banqueroute par détournement d'actif suppose, pour être constitué, l'existence d'une dissipation volontaire d'un élément de patrimoine d'un débiteur en état de cessation des paiements par l'une des personnes énumérées à l'article 196 de la loi du 25 janvier 1985, relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises » Cass crim 5 juin 1989 n°87-91278

Les faits d'appauvrissements du débiteur, accomplis par le dirigeant, sont passibles de banqueroute par détournement d'actif, comme par exemple la résiliation d'un bail au profit d'une SCI dont le dirigeant est associé Cass crim 26 octobre 1995 n°94-82737, un abandon de créance, de même que le détournement (ici la vente) de biens qui appartiennent à la société Cass crim 20 octobre 2004 n°03-85238

A l'inverse "le délit de banqueroute par détournement d'actif suppose, pour être constitué à l'égard d'un dirigeant social, l'existence d'une dissipation volontaire d'un élément du patrimoine d'une société en état de cessation des paiements" ce qui n'est pas le cas si le bien n'appartenait pas à la société (ici bien en location gérance) Cass crim 22 aout 1995 n°94-83750

L'idée sous jacente en matière de détournement d'actif est que, dans le cas où l'auteur n'a pas directement détourné un actif, mais a contribué à sa cession dans des conditions anormales, la procédure collective doit avoir été appauvrie.

Tel n'est pas le cas si par exemple un bien a été vendu sans l'autorisation légale nécessaire, mais son prix a été consigné Cass crim 13 juin 1996 n°95-83280 : il n'y a aucun élément intentionnel. De même l'infraction n'est pas constituée si le bien est vendu à un prix normal qui est régulièrement payé Cass crim 10 Mars 2020 n°09-83016 "Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Ercan X... est poursuivi du chef de banqueroute pour avoir détourné des véhicules de la société Aytac france, dont il était le gérant, et qui avait été placé en redressement judiciaire le 2 juillet 2003 ; Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable de ces faits, l'arrêt énonce qu'il a vendu ces véhicules entre les 15 février et 1er mars 2003, pour la somme totale de 138 000 euros, correspondant à leur valeur ; que les juges ajoutent que ces actes de disposition sont intervenus postérieurement à la date de cessation des paiements fixée au 31 décembre 2002 et en fraude des droits des créanciers " dans la mesure où les éléments d'actif constitués par les véhicules vendus ont été détournés " ; Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'il ne résulte pas de ses propres énonciations que le produit de la vente de ces véhicules, réalisée à leur juste prix, ait été détourné ou dissimulé, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision"

Tel est le cas en cas de vente d'un bien à un prix normal (avant l'ouverture de la procédure) mais avec dissimulation d'une partie du prix (Cass crim 29 mars 2000 n°99-85878 ) ou à un prix inférieur à la valeur tenant la participation du débiteur au capital de la société acquéreur Cass crim 7 décembre 1992 n°91-83937. De même tel est le cas de paiements effectués sans raison Cass crim 21 septembre 1994 n°93-85544, de prélèvements du dirigeant Cass crim 23 octobre 1997 n°96-84717, de cession d'actif en redressement judiciaire à un prix inférieur à la valeur, à une société dans laquelle le débiteur a des intérêts Cass com 7 décembre 1992 n°91-83937, l'appropriation des biens du débiteur Cass crim 22 janvier 1998 n°96-86426, de la vente à l'insu du liquidateur en conservant le prix Cass crim 20 septembre 2000 n°98-87918.

La mise d'un bien sous fiducie peut constituer un détournement d'actif Cass Crim 25 octobre 2023 n°22-84650

- ont tenu une comptabilité fictive, ont fait disparaître la comptabilité, ou n'ont tenu aucune comptabilité dans les cas où la loi impose d'en tenir une, ou encore ont tenu une comptabilité incomplète ou irrégulière (et le fait de ne pas présenter de comptabilité est assimilé par la Cour de Cassation à l'absence de comptabilité (Cass crim 10 sept 2014 n°13-85077 et Cass crim 3 dec 2014 n°13-86846, ce qui ne correspond peut-être pas à la notion d'interprétation stricte des textes pénaux mais correspond bien à la situation du débiteur qui délibérément ne remet pas de comptabilité) étant précisé qu'il appartient au dirigeant de tenir la comptabilité, et qu'il ne saurait s'en exonérer en prétendant que son expert comptable n'a pas accompli sa mission Cass crim 20 avril 2017 n°16-82850 (mais arrêt plutôt en sens inverse Cass crim 6 avril 2011 n°10-86008 qui exonère le dirigeant qui a missionné un cabinet comptable).

Pour un exemple de faux en comptabilité Cass crim 9 septembre 2020 n°18-86351

Le dirigeant qui ne présente pas la comptabilité est coupable de banqueroute Cass crim 11 janvier 2001 n°99-87455. Cass crim 14 mai 2014 n°13-80448 mais la dissimulation ne peut être assimilée à la non remise de la comptabilité Cass crim 18 janvier 2023 n°22-82465

- ont augmenté frauduleusement le passif, (il convient de démontrer le caractère frauduleux Cass crim 26 janvier 2022 n°21-81822) Cass crim 1er février 2023 n°22-82368 pour une volonté délibérée de ne pas payer les charges

- ont maintenu l'activité avec le recours à des moyens ruineux de se procurer des fonds

Banqueroute : incidence de la date de cessation des paiements et quelle date de cessation des paiements ? Frontière abus de biens sociaux / banqueroute ?

Il est traditionnellement jugé que la date de cessation des paiements est une frontière entre le délit d'abus de biens sociaux et celui de banqueroute pour le détournement d'actif et l'emploi ruineux de se procurer des fonds (Cass crim 5 juin 1989 n°87-91278  Cass crim 6 juin 2007 n°06-85644  Cass crim 18 juin 1998 n°97-83996) mais étant précisé qu'il est systématiquement jugé que si le prévenu est condamné pour banqueroute alors qu'il encourait l'abus de biens ou inversement, il n'y a pas lieu à cassation (Cass crim 11 décembre 2002 n°01-88798) ,

Ainsi, et sauf requalification en cause d'appel, auquel cas le prévenu doit pouvoir s'en expliquer Cass crim 30 avril 2014 n°13-82425, Cass crim 24 janvier 2024 n°22-83726 il semble peu important et sans conséquence que le prévenu soit poursuivi pour abus de biens ou banqueroute en fonction de la date des faits.

Les décisions considèrent d'ailleurs diversement la date des faits par rapport à l'état de cessation des paiements, et ont été retenu comme constitutifs de banqueroute:

- des faits qui ont provoqué l'état de cessation des paiements cass crim 5 octobre 1992 n°91-86770 et sont donc par hypothèse antérieurs

- l'indifférence de la date des faits par rapport à la date de cessation des paiements : "Qu'en effet le délit de banqueroute est constitué, que les faits constatés soient antérieurs ou postérieurs à la date de la cessation des paiements, dès lors que, comme en l'espèce, procédant d'une même intention et tendant au même but, ils ont pour objet ou pour effet soit d'éviter ou de retarder la constatation de cet état, soit d'affecter la consistance de l'actif disponible dans des conditions de nature à placer l'intéressé dans l'impossibilité de faire face au passif exigible " Cass crim 21 septembre 1994 n°93-85544 ,et Cass crim 5 octobre 1992 n°91-86770  Cass crim 6 février 1995 n°94-82469 qui écartent la nécessité que les faits soient postérieurs la date de cessation des paiements ou encore Cass crim 19 février 2003 n°01-87432

- même si des décisions plus anciennes ne retenaient que des faits postérieurs à la date de cessation des paiements Cass crim 10 mai 1993 n°92-83001 Cass crim 16 juin 1999 n°98-86016

La réalité nous semble que les textes n'évoquent pas la cessation des paiements et son antériorité ou pas comme éléments constitutifs du délit, et que ces questions devraient donc être indifférentes (pour un exemple où est simplement évoquée la date de cessation des paiements fixée par le tribunal de commerce Cass crim 12 septembre 2018 n°17-83135

Cependant certains arrêts ont pu juger que la juridiction pénale devait se prononcer sur la date de cessation des paiements  Cass crim 29 mars 2000 n°99-85878 Cass crim 5 juin 1989 n°87-91278 Cass crim 6 juin 2007 n°06-85644 Cass crim 19 février 2003 n°01-87432) et considérer que l'état de cessation des paiements est un élément constitutif de l'infraction

En tout état, dans les cas où la juridiction pénale estime devoir se prononcer sur la date de cessation des paiements, la question est de savoir si cette juridiction pénale est liée par la date de cessation des paiements fixée par la juridiction de la procédure collective.

Les décisions rendues sous l'empire des textes anciens sont en faveur de l'autonomie du juge pénal, en raison de l'absence d'autorité de la décision civile sur les juridictions pénales ( Cass crim 18 novembre 1991 n°90-83775, Cass crim 21 juin 1993 n°92-84526 Cass crim 16 juin 1999 n°98-86016

Les auteurs sont maintenant partagés sur la question en l'état de la jurisprudence qui reconnait de plus en plus en matière de sanction l'autorité de la date de cessation des paiements fixée par la juridiction de la procédure collective et de l'article R653-1 du code de commerce

La solution n'est pas si évidente et on peut effectivement relever que l'article R653-1 du code de commerce, qui dispose "Pour l'application de l'article L. 653-8, la date retenue pour la cessation des paiements ne peut être différente de celle retenue en application de l'article L. 631-8" , c'est à dire retient la date de cessation des paiements fixée par le jugement d'ouverture ou un jugement de report de date de cessation des paiements, s'applique stricto sensu à la faillite personnelle, ce qui pourrait signifier qu'il ne s'applique pas en matière pénale à la banqueroute.

La question ne semble pas être tranchée, le juge pénal semble autonome sur la question, mais surtout, il ne nous semble absolument pas nécessaire qu'il se prononce sur la date de cessation des paiements (cet avis n'étant pas unanime loin s'en faut)

Répartition du produit de l'action en banqueroute

A la différence de l'action en comblement de passif pour laquelle, le produit de l'action en comblement est affecté à tous les créanciers égalitairement ( L651-2 du code de commerce qui évoque tous les créanciers et pas seulement les créanciers après paiement des créances privilégiées) sans égard pour les créances privilégiées et est la véritable répartition au marc le franc, le produit de l'action en banqueroute est réparti comme les autres sommes figurant à l'actif de la liquidation judiciaire, suivant la règle posée par l'article L643-8 du code de commerce : c'est donc une répartition au marc le franc après paiement des créances privilégiées.

En effet la répartition prévue pour l'action en comblement est expressément dérogatoire avec la répartition "de droit commun" prévue en liquidation, qui consiste à répartir au marc le franc aux créanciers chirographaires après paiement des frais de justice et des créanciers privilégiés : c'est la répartition "de droit commun, c'est à dire dans le respect des privilèges, qui s'applique aux dommages et intérêts versés par dans le cadre d'une action en responsabilité pour banqueroute Cass com 11 juin 2014 n°13-12658

C'est une autre différence avec l'action en comblement : la personne condamnée certes ne pourra pas compenser sa condamnation avec sa créance, mais participera aux répartitions effectuées avec les sommes qu'il a lui même versées, alors que le dirigeant condamné en comblement de passif, s'il est par ailleurs créancier, ne participe pas aux répartitions (L651-2).

Pour plus de précisions voir les actions en responsabilité

Les autres délits et les cumuls éventuels

Les sanctions d'abus de biens sociaux, les sanctions pénales et la faillite personnelle ne protègent pas les mêmes intérêts et sont susceptibles de se cumuler Cass Com 11 septembre 2019 n°19-90026

Voir les autres délits

Un effet commun de la faillite personnelle et de la banqueroute: la reprise des poursuites après la clôture

Par principe la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire ne fait pas retrouver aux créanciers leurs droits de poursuite contre le débiteur: concrètement les créanciers ne sont pas payés, ou ne son pas intégralement payés, mais même si la par suite le débiteur retrouve une solvabilité, il ne pourra être poursuivi par ces créanciers.

Cependant si la faillite personnelle a été prononcée ou une banqueroute prononcée, le texte (article L643-11 III du code de commerce) prévoit que les créanciers retrouvent, après la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, leurs droit de poursuite.

Le texte organise cette reprise des poursuites: les créanciers admis au passif de la liquidation judiciaire auront besoin d'un titre exécutoire s'ils n'en disposent pas déjà, ce pour quoi le Président du Tribunal de la procédure collective statue par ordonnance. 

Sanctions à l'initiative des contrôleurs c'est possible

Les textes organisent la possibilité pour les contrôleurs d'être à l'initiative des sanctions (comblement de passif, faillite personnelle et interdiction de gérer, banqueroute) dans des conditions procédurales bien précises: voir les contrôleurs

Précisions sur la notion de comptabilité, au regard des sanctions

Les anomalies ou l'absence de comptabilité sont à la fois visées dans les cas de faillite personnelle et de banqueroute.

Les textes décrivant la comptabilité

L'article L123-12 du code de commerce donne des précisions sur la nature des documents attendus (même si ce texte est applicable aux commerçants: "Toute personne physique ou morale ayant la qualité de commerçant doit procéder à l'enregistrement comptable des mouvements affectant le patrimoine de son entreprise. Ces mouvements sont enregistrés chronologiquement. Elle doit contrôler par inventaire, au moins une fois tous les douze mois, l'existence et la valeur des éléments actifs et passifs du patrimoine de l'entreprise. Elle doit établir des comptes annuels à la clôture de l'exercice au vu des enregistrements comptables et de l'inventaire. Ces comptes annuels comprennent le bilan, le compte de résultat et une annexe, qui forment un tout indissociable. "

Ce texte est complété par l'article L123-13 "Le bilan décrit séparément les éléments actifs et passifs de l'entreprise, et fait apparaître, de façon distincte, les capitaux propres. Le compte de résultat récapitule les produits et les charges de l'exercice, sans qu'il soit tenu compte de leur date d'encaissement ou de paiement. Il fait apparaître par différence, après déduction des amortissements, des dépréciations et des provisions, le bénéfice ou la perte de l'exercice. Les produits et les charges, classés par catégorie, doivent être présentés soit sous forme de tableaux, soit sous forme de liste. Le montant des engagements de l'entreprise en matière de pension, de compléments de retraite, d'indemnités et d'allocations en raison du départ à la retraite ou avantages similaires des membres ou associés de son personnel et de ses mandataires sociaux est indiqué dans l'annexe. Par ailleurs, les entreprises peuvent décider d'inscrire au bilan, sous forme de provision, le montant correspondant à tout ou partie de ces engagements. L'annexe complète et commente l'information donnée par le bilan et le compte de résultat." et par l'article L123-14 Les comptes annuels doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise. Lorsque l'application d'une prescription comptable ne suffit pas pour donner l'image fidèle mentionnée au présent article, des informations complémentaires doivent être fournies dans l'annexe. Si, dans un cas exceptionnel, l'application d'une prescription comptable se révèle impropre à donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière ou du résultat, il doit y être dérogé. Cette dérogation est mentionnée à l'annexe et dûment motivée, avec l'indication de son influence sur le patrimoine, la situation financière et le résultat de l'entreprise.

L'article L123-15 dispose Le bilan, le compte de résultat et l'annexe doivent comprendre autant de rubriques et de postes qu'il est nécessaire pour donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise. Chacun des postes du bilan et du compte de résultat comporte l'indication du chiffre relatif au poste correspondant de l'exercice précédent. Les éléments composant les capitaux propres sont fixés par décret. Le classement des éléments du bilan et du compte de résultat ainsi que les mentions à inclure dans l'annexe sont fixés par un règlement de l'Autorité des normes comptables.

L'article L123-18 A leur date d'entrée dans le patrimoine de l'entreprise, les biens acquis à titre onéreux sont enregistrés à leur coût d'acquisition, les biens acquis à titre gratuit à leur valeur vénale et les biens produits à leur coût de production. Pour les éléments d'actif immobilisés, les valeurs retenues dans l'inventaire doivent, s'il y a lieu, tenir compte des plans d'amortissement. Si la valeur d'un élément de l'actif devient inférieure à sa valeur nette comptable, cette dernière est ramenée à la valeur d'inventaire à la clôture de l'exercice, que la dépréciation soit définitive ou non. Les biens fongibles sont évalués soit à leur coût moyen pondéré d'acquisition ou de production, soit en considérant que le premier bien sorti est le premier bien entré. La plus-value constatée entre la valeur d'inventaire d'un bien et sa valeur d'entrée n'est pas comptabilisée. S'il est procédé à une réévaluation de l'ensemble des immobilisations corporelles et financières, l'écart de réévaluation entre la valeur actuelle et la valeur nette comptable ne peut être utilisé à compenser les pertes ; il est inscrit distinctement au passif du bilan.

L'article L123-19 Les éléments d'actif et de passif doivent être évalués séparément. Aucune compensation ne peut être opérée entre les postes d'actif et de passif du bilan ou entre les postes de charges et de produits du compte de résultat, sauf dans des cas exceptionnels prévus par un règlement de l'Autorité des normes comptables. Le bilan d'ouverture d'un exercice doit correspondre au bilan de clôture de l'exercice précédent.

L'article L123-20 Les comptes annuels doivent respecter le principe de prudence. Pour leur établissement, le commerçant, personne physique ou morale, est présumé poursuivre ses activités. Même en cas d'absence ou d'insuffisance du bénéfice, il doit être procédé aux amortissements, dépréciations et provisions nécessaires. Il doit être tenu compte des passifs qui ont pris naissance au cours de l'exercice ou d'un exercice antérieur, même s'ils sont connus entre la date de la clôture de l'exercice et celle de l'établissement des comptes.

L'article L123-22 Les documents comptables sont établis en euros et en langue française. Les documents comptables et les pièces justificatives sont conservés pendant dix ans. Les documents comptables relatifs à l'enregistrement des opérations et à l'inventaire sont établis et tenus sans blanc ni altération d'aucune sorte, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat

La jurisprudence relative à la comptabilité dans le domaine des sanctions

Cass crim 28 février 2018 n°17-81682 pour des commissions mal comptabilisées et des provisions pour perte pas passées,

- Cass crim 5 juin 2002 n°01-84366 pour une société qui avait subi un redressement fiscal mais n'avait comptabilisé aucune dette fiscale, Cass crim 3 novembre 2005 n°05-80979 pour l'absence de comptes

- Cass crim 12 janvier 2005 n°04-85653 et Cass crim 4 novembre 2009 n°08-88437 pour des documents établis en dépit des règles applicables ou sans justificatifs Cass crim 26 janvier 2005 n°04-81206 ou encore des comptes comportant des anomalies Cass com 29 juin 2022 n°21-12998

- Cass crim 31 octobre 2007 n°06-89045 Cass com 10 mars 2021 n°19-22811 pour l'absence de documents obligatoires

- Cass crim 12 septembre 2001 n°01-80064, Cass crim 5 janvier 1995 n°93-82157, Cass crim 2 septembre 2015 n°14-82980, Cass crim 20 avril 2017 n°16-82850 pour des documents destinés à dissimuler la réalité

- Cass com 13 juin 2006 n°05-14081 (dans le cadre d'une action en comblement) sur la notion de comptabilité régulière

- Cass crim 22 juin 2022 n°21-83036 qui définit la notion de comptabilité, et sanctionne l'irrégularité de comptabilisation d'un stock en immobilisation


SARL OU SAS

Voir SAS ou SARL


SAS (représentant légal)

La SAS est représentée par son président (article L227-6 du code de commerce).

Cependant les statuts peuvent prévoir qu'un directeur général exerce les prérogatives du Président.


SAS ou SARL

Voir aussi SASU ou forme individuelle

Généralités

Le choix de la structure sociétaire est d’autant plus important au démarrage de l’activité qu’il est parfois complexe de passer d’une forme à l’autre. Il est donc prudent de s’interroger préalablement sur les avantages et inconvénients des différentes formes possibles.

Pour une petite et moyenne entreprise, l’arbitrage se fait généralement entre la SARL (société à responsabilité limitée) et la SAS (société par action simplifiée).

Le nombre d’associés

Il convient de préciser que chacune de ces formes peut être utilisée avec un associé unique (voir EURL – entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée - et SASU – société par action simplifiée unipersonnelle -), et que la SARL ne peut comporter plus de 100 associés (mais il n’y a pas de limite pour la SAS.

L’activité

SAS et SARL sont toutes deux des sociétés commerciales.

Elles sont donc adaptées pour l’exercice d’une activité commerciale, mais également pour les professions indépendantes (parfois qualifiées de professions libérales) non réglementées.

Par contre pour les professions indépendantes réglementées, ce sont des formes spécifiques, adaptées à partir de la SAS ou la SARL de droit commun, qui sont possibles, sous condition que la réglementation spécifique à la profession le permette ( dans le cas c’est la SELARL - société d'exercice libéral à responsabilité limitée qui constitue la forme « adaptée » à partir de la SARL – et la SELAS - société d'exercice libéral par actions simplifiée qui constitue la forme adaptée à partir de la SAS).

Le processus  et les formalités de création

Il s’agit dans les deux cas d’une société, régie avant tout par le droit commun du contrat de société, et les différences de constitution sont minimes.

Ainsi, les statuts de la société, qui a une personnalité morale, doivent être rédigés par écrit, entre des associés, ayant un affectio societatis (c’est-à-dire l’intention de mener en commun le projet social), la durée de la société doit être précisée, ainsi que l’objet social, le siège social et les apports des associés doivent être définis. En SARL les associés détiennent des parts sociales, et en SAS des actions (mais la SAS permet de créer plusieurs catégories d’actions, qui auront des prérogatives différentes, ce qui n’existe pas en SARL)

Au-delà de ces formalités entre associés, l’existence de la société devient opposable aux tiers, par l’accomplissement de formalités (publication d’un avis de constitution dans un journal d’annonces légales, formalités de greffe).

La différence de formalités va cependant exister au stade des apports : en effet dans les SAS tous les apports en nature (c’est-à-dire l’apport d’un bien, par différence avec un apport en numéraire, c’est-à-dire en argent) doit faire l’objet d’un rapport d’un commissaire aux apports (choisi sur la liste des commissaires aux comptes ou des experts judiciaires), ce qui n’est pas nécessaire pour les SARL si l’apport a une valeur inférieure à 30.000 € et que le capital social n’est pas composé en majorité d’apports en nature.

Apports et droits du conjoint

Les apports effectués par des associés mariés en communauté, et portant sur des biens communs nécessitent en SARL l’accord du conjoint, lequel peut revendiquer la moitié des parts de capital correspondante.

En SAS les apports sont libres

Concernant l’activité du conjoint, en SARL le conjoint du gérant majoritaire qui souhaite exercer une activité au sein de la société peut bénéficier du statut de conjoint collaborateur, et bénéficier de la protection sociale correspondante. Ce statut est peu couteux puisque le conjoint n’est pas rémunéré (et les formalités sont simples puisqu’il n’y a ni contrat de travail ni fiches de paye).

En SAS ce statut n’est pas applicable, le conjoint pouvant évidemment être associé ou salarié dans les conditions de droit commun.

La direction de la société :

La direction de la SARL est assurée par un ou plusieurs gérants, qui sont obligatoirement des personnes physiques (une société ne peut être gérante d’une SARL), nommés dans les statuts ou par décision des associés.

La direction de la SAS est assurée par un président (et un seul, mais qui peut désigner des directeurs généraux qui représentent la société), personne physique ou morale, nommés par les associés, dans les statuts ou par décision séparée, ou encore par un organe mis en place par les associés.

La vie sociale et le fonctionnement de la société

Les différences découlent des règles de droit applicables : la SARL est régie par le code de commerce qui organise de manière précise et détaillée le fonctionnement de la société, avec des règles qui s’appliquent soit si les associés n’ont rien prévu de particulier dans les statuts, soit qui s’imposent même si les associés ont entendu y déroger (on appelle ces règles des dispositions d’ordre public). L’avantage est d’offrir aux associés un fonctionnement bien déterminé, sans qu’ils aient à se soucier de prévoir des statuts très détaillés.

A l’inverse, la SAS, de constitution plus moderne, est plus tournée sur la liberté des associés, et les textes sont moins contraignants. Les associés ont beaucoup plus de liberté pour définir le mode de fonctionnement de la société, ce qui peut être un avantage, mais aussi un inconvénient si se présente un cas non prévu dans les statuts et parfois un risque pour des associés peu vigilants qui auront laissé écrire dans les statuts des dispositions peu protectrices.

Le statut social du dirigeant

Le gérant de SARL est affilié au régime des travailleurs indépendants s’il est associé majoritaire, qu’il soit rémunéré ou pas, et au régime général de la sécurité sociale s’il n’est pas associé majoritaire et est rémunéré.

Le président de SAS, et le cas échéant les directeurs généraux sont affiliées au régime général de la sécurité sociale s’ils sont rémunérés (ce qui ne veut pas dire qu'ils sont salariés - sauf cas de cumul avec un contrat de travail - , ou qu'ils bénéficient du chômage puisqu'ils sont dirigeants sociaux, ils bénéficient simplement de la protection sociale des salariés)

Le régime des travailleurs non salariés est moins favorable au regard des droits à retraite, et implique pour les sociétés soumises à l’IS (impôt sur les sociétés) le paiement  de cotisations sociales sur les dividendes supérieurs à 10% du résultat de l’opération « capital social + prime d’émission + sommes versées en compte courant »

Le régime fiscal

Les deux formes sociales sont en principe soumises à l’IS (impôt sur les sociétés), mais il est possible dans les deux cas, de manière temporaire et dans certains cas, d’opter pour le régime de l’impôt sur le revenu (imposition du chef des associés).  Le régime fiscal des deux formes sociales est donc le même.

Par contre seule la SARL prévoit un régime spécifique de SARL dite de famille (capital composé de membres de la même famille, PACS ..) qui peut opter pour un régime d’imposition du chef des associés (impôt sur le revenu) sans limite de temps.

La surveillance des comptes

Comme déjà indiqué la SAS impose un recours plus fréquent à un commissaire aux apports que la SARL.

Par ailleurs les seuils à partir desquels la nomination d’un commissaire aux comptes s’impose sont plus bas pour les SAS, qui auront donc plus fréquemment recours à ce professionnel que les SARL: 2 des 3 seuils suivants doivent être dépassés :

  • Chiffre d’affaires HT supérieur à 3,1 M€ pour les SARL et 2 M€ pour les SAS

  • Total du bilan supérieur à 1,55 M€ pour les SARL et 1 M€ pour les SAS

  • Effectif salarié supérieur à 50 pour les SARL et 20 pour les SAS.

Enfin la SAS doit nommer un commissaire aux comptes si elle dirigée par ou dirige une personne morale (ce qui est impossible en SARL)

Les cessions de titres 

Les cessions de parts de SARL, nécessairement soumises à agrément des associés si le cessionnaire n’est pas déjà associé, sont matérialisées par un acte soumis à droit d’enregistrement (3% avec abattement)

Les cessions d’actions de SAS, dont l’agrément dépend des dispositions organisées librement par les associés dans les statuts, sont matérialisées par un virement entre compte du cédant et du cessionnaire , lequel donne lieu à un droit réduit de 0,1%

 


SASU ou forme individuelle

Généralités

Au-delà de l’entreprise individuelle stricto sensu, qui expose le chef d’entreprise à une responsabilité indéfinie – sauf l’insaisissabilité de la résidence principale pour les créanciers professionnels – ou de l’entreprise individuelle à responsabilité limitée, qui fonctionne comme une entreprise individuelle mais avec un patrimoine affecté qui limite considérablement le risque pour le chef d’entreprise, le chef d’entreprise peut envisager une forme sociale adaptée à un exercice individuel.

Les formes proposées par les dispositifs en vigueur sont l’EURL – entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée – qui est une variété de SARL,  et la SASU – société par action simplifiée unipersonnelle – qui est une variété de SAS.

La situation sociale du dirigeant de la SASU

Alors que le gérant associé unique de l’EURL a un  statut de travailleur indépendant assujetti notamment au RSI, le Président de la SASU est "assimilé" à un salarié et est affilié à la sécurité sociale ( ce qui impose des fiches de paye et des déclarations sociales)

Il bénéficie donc de la protection sociale des salariés, et, à revenu équivalent, d’une meilleure couverture vieillesse que les travailleurs indépendants.

Cependant sa qualité de mandataire social ne lui permet pas de bénéficier de l’assurance chômage ou de l’AGS en cas de procédure collective.

Il semble de même logique que "l'assimilation" avec le statut de salarié ne soit pas totale pour ce qui concerne les saisies sur rémunération organisées par le conde du travail: en effet, l'article R3252-1 du code du travail évoque bien "l'employeur" et l'article R3252-44 le changement d'employeur. Or la SASU n'est pas à stricto sensu, l'employeur de son président, qui n'a d'ailleurs pas de contrat de travail.

Enfin, en l’absence de rémunération de son Président , la SASU ne paye pas de cotisation sociale, alors que le travailleur indépendant est assujetti à cotisation minimale s’il n’a pas de rémunération.

Les dividendes versés ne sont pas assujettis à cotisation sociales (sauf prélèvement sociaux de 15%), ce qui est une différence significative par rapport aux dividendes perçus par les dirigeants ayant un  statut de travailleur non salarié.

L’aspect fiscal

La SASU est par principe assujettie àl’IS

Les bénéfices d’une SASU sont imposés à l’IS (une option temporaire pour l’IR est possible pour 5 ans)

A l’inverse les dividendes versés au dirigeant de l’EURL sont assujettis à l’impôt sur le revenu, sauf option à l’IS

Ainsi si la société est conçue pour que le dirigeant perçoive des dividendes, la SASU présente l’avantage d’un assujettissement aux seuls prélèvements sociaux, alors que les dividendes perçus dans une EURL sont soumis à cotisation sociale pour la part qui dépasse 10% du capital + prime d’émission + compte courant d’associé.

Ainsi sauf si le dirigeant a un compte courant associé largement créditeur, le taux de cotisation est pénalisant

Le changement de forme sociale :

Le passage en SAS est facilité en cas de cession de parts ayant pour conséquence que la société n’est plus unipersonnelle (ce qui est une différence majeure avec l’EIRL qui en réalité n’est pas une véritable société)

En outre les cessions de parts sont taxables à un taux inférieur à celui applicable pour un fonds de commerce si une EIRL apporte son fonds à une SARL par exemple.

Situation au regarde de l’ARE Aide au Retour à l’emploi

Le président de SASU peut opter qui a opté pour le maintien de l’ARE et qui ne perçoit  pas de rémunération continue de toucher l’intégralité de ses allocations, sans que les dividendes qu’il perçoit aient des conséquences.

C’est, là encore, un avantage par rapport au gérant associé de l’EURL où les bénéfices perçus impactent les allocations


Sauvegarde

Quelques points de la définition

Présentation schématique

Présentation détaillée

La sauvegarde en quelques phrases

La procédure

Ouverture: conditions et procédure

Conditions d'ouverture : précisions sur la moralité de la demande et le risque de fraude

Période d'observation

Objectifs de la période d'observation

Première audience de contrôle

Répartition des rôles entre administrateur et mandataire judiciaire

Vérification des créances par le mandataire judiciaire

Poursuite de l'activité avec l'intervention de l'administrateur judiciaire

La solution du plan de sauvegarde

La sortie de la procédure par constat de l'achèvement des difficultés

La constatation de l'état de cessation des paiements

Le passage en redressement judiciaire sans que l'état de cessation des paiements soit constaté

Différences redressement judiciaire / sauvegarde

Présentation schématique

La procédure est ouvrerte par le tribunal pour toute entreprise qui sans être en état de cessation des paiements connaît des difficultés qu’elle ne peut pas surmonter ( c'est la différence majeure avec le redressement judiciaire pour lequel il y a état de cessation des paiements).

Ce jugement désigne obligatoirement un juge commissaire, un mandataire judiciaire.

La désignation d'un administrateur judiciaire est facultative pour les entreprises dont le nombre de salariés est inférieur à 20 et le chiffre d'affaires HT est inférieur à 3.000.000 €. Au delà elle est obligatoire

Le jugement ouvre une période dite d’observation d’une durée maximale de 6 mois, durant laquelle les informations permettant de renseigner le Tribunal sur la situation sont collectées et les solutions devront être présentées.

La période d’observation peut être renouvelée une fois (6 mois) par un nouveau jugement du Tribunal, et pourra l’être une seconde fois (6 mois) de manière exceptionnelle sur demande du Procureur de la République.

Présentation détaillée

Comment est organisée la procédure de sauvegarde ?

Sauvegarde ou redressement judiciaire en quelques phrases:

Imaginez que l'entreprise est traitée comme si elle a commencé son activité le jour du jugement d'ouverture de la procédure: elle n'a pas de dettes, commence son activité et paye à bonne date ses dettes postérieures au jugement. Pendant la période d'observation, tout son passé est "mis de côté" pour lui permettre de préparer l'avenir. Elle va donc reconstituer sa trésorerie, se réorganiser. Ce n'est qu'après la période d'observation que des solutions seront recherchées, et que le passé sera repris en considération, si c'est possible par un plan de remboursement des créanciers (qui sauf exceptions peut durer jusqu'à 10 ans). On peut véritablement dire que l'entreprise est sous la protection de la loi, est d'ailleurs les créanciers antérieurs au jugement ne peuvent pas la poursuivre ou effectuer des saisies pour être payés. Ce sont les idées d'organisation de la sauvegarde ou du redressement judiciaire.

La procédure de sauvegarde

La procédure de sauvegarde : procédure permettant la poursuite d’activité dans une perspective de résolution de difficultés le cas échéant avec plan de sauvegarde organisant le règlement échelonné des créanciers.

Le déroulement de la procédure comprend trois "phases": l'ouverture de la procédure, la période d'observation et la solution, c'est à dire le plan de sauvegarde.

Ouverture de la procédure : conditions et procédure

La procédure de sauvegarde est réservée aux entreprises qui connaissent des difficultés qui peuvent compromettre à terme leur pérennité, mais ne sont pas en état de cessation des paiements (c'est-à-dire sont pour l’instant capables de payer leurs dettes à bonne date)

Il s’agit d’anticiper sur une prévisible dégradation de la situation pour permettre à l’entreprise de sortir de ces difficultés sans subir la pression de ses créanciers.

Par parenthèse, et dès lors qu'une fois qu'elle est ouverte, la procédure de sauvegarde se déroule comme un redressement judiciaire sur l'aspect traitement du passif, on ne peut que relever que la prétendue absence de cessation des paiements repose sur une hypocrisie flagrante : si l'entreprise n'avait pas de passif échu non payé, le plan de sauvegarde  ne concernerait aucun créancier, sauf évidemment dans le cas, très improbable, dans lequel l'entreprise dispose au jour du jugement de la trésorerie lui permettant d'honorer tout son passif échu. Dans ce cas et dans ce seul cas la sauvegarde est justifiée, et ses effets permettront de préserver la trésorerie et de soumettre les créances échues au plan.

C'est l'article L620-1 du code de commerce qui décrit la procédure

Le tribunal ne peut être saisi que par le chef d’entreprise, qui lui demande l’ouverture de la procédure.

Le jugement qui ouvre la procédure va désigner :

- Un juge commissaire qui est un de ses membres, comme dans toutes les procédures de traitement des difficultés

- Un mandataire judiciaire, qui est un mandataire judiciaire professionnel (son nom est indiqué dans le jugement d'ouverture) qui sera principalement chargé avec le chef d'entreprise d'arrêter le passif (le montant des dettes)

- Le cas échéant un administrateur judiciaire, qui est lui aussi un mandataire de justice professionnel (c'est généralement le cas, et dans cette hypothèse son nom est indiqué dans le jugement d'ouverture) qui sera principalement chargé d'assister le chef d'entreprise dans les démarches permettant de préparer l'avenir (ouverture d'un nouveau compte bancaire, mesures de restructuration, préparation des prévisionnels, préparation d'un plan "de remboursement" des créanciers ..).

Pour plus de précisions voir dans le lexique les mots "mandataires de justice", "mandataire judiciaire" et "administrateur". Le mot "mandataire de justice" du lexique explique notamment comment sont désignés les professionnels. 

Conditions d'ouverture précisions sur la moralité de la demande

Les différences entre la procédure de redressement judiciaire et la sauvegarde sont telles que le débiteur peut chercher à bénéficier de la procédure de sauvegarde pour éviter l'éviction des dirigeants, ou pour se trouver à l'abri des poursuites des créanciers de manière injustifiée.

La Cour de Cassation a eu l'occasion de se prononcer sur ces risques d'instrumentalisation de la procédure de sauvegarde:  

"si la société débitrice justifie de difficultés qu'elle n'est pas en mesure de surmonter et qui sont de nature à la conduire à la cessation des paiements, l'ouverture d'une procédure de sauvegarde ne peut lui être refusée au motif que ses associés ne seraient pas fondés à éviter, par ce moyen, d'en perdre le contrôle"

"hors le cas de fraude, l'ouverture de la procédure de sauvegarde ne peut être refusée au débiteur, au motif qu'il chercherait ainsi à échapper à ses obligations contractuelles, dès lors qu'il justifie, par ailleurs, de difficultés qu'il n'est pas en mesure de surmonter"

Autrement dit, il convient que les conditions visées au texte soient réunies, et sauf cas de fraude il n'est pas possible de refuser l'ouverture de la procédure, au motif que le débiteur en tirerait le bénéfice prévu par la loi Cass com 8 mars 2011 n°10-13989

Période d’observation :

Le principe de la période d’observation :

Le jugement qui prononce la sauvegarde va également ouvrir une période dite d’observation, de 6 mois, renouvelable une fois par jugement du Tribunal (6 mois supplémentaires).

La possibilité d'un second renouvellement à la demande du Procureur de la République qui existait dans le texte initial a été supprimée.

Les objectifs de la période d’observation :

Cette période d’observation répond à plusieurs nécessités :

- « cliché instantané » : Faire un bilan détaillé de l’état de l’entreprise, dans l’ensemble des domaines importants : trésorerie, comptable, exploitation, social, commercial, juridique. L’administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire devront établir divers rapports pour renseigner le Tribunal, le juge commissaire et le Procureur de la République.

- « mise en place de l’avenir » : Rechercher et mettre en place si elles existent les mesures de restructuration nécessaires, là encore dans l’ensemble des domaines importants pour la vie de l’entreprise. L’administrateur judiciaire assistera l’entreprise pour préparer l’avenir. Le but est de mettre en œuvre, si c’est possible, des mesures qui permettront à terme de préparer des documents comptables prévisionnels améliorés, qui dégageront suffisamment de trésorerie pour rembourser les créanciers (selon un échelonnement arrêté dans le cadre d’un plan)

- « évaluation du passé » : Connaître très exactement le montant des dettes qu’il faudra rembourser une fois que la restructuration sera avancée, et que la période d’observation prendra fin. Le mandataire judiciaire procèdera avec le chef d’entreprise et le cas échéant son comptable, à la vérification des créances qui conduira à l’arrêté par le juge commissaire de l’état des créances.

- Reconstitution de la trésorerie de l’entreprise : Pendant cette période d’observation, tout se passe comme si l’entreprise avait commencé son activité le jour du jugement d’ouverture de la sauvegarde sans le poids du passé: on ne tient provisoirement pas compte des dettes antérieures au jugement, qui sont « mises entre parenthèse ».

Concrètement:

- les créanciers antérieurs au jugement ne peuvent exiger d’être payés ou prendre des initiatives pour l’être (c’est ce qu’on appelle la « suspension des poursuites ») : si par exemple un procès était en cours pour que l’entreprise soit condamnée à payer, si des saisies risquaient de survenir .. ils ne pourront aboutir. L’entreprise est donc plus sereine puisqu’elle n’a pas la pression d’éventuelles saisies.

- Le chef d’entreprise ne peut utiliser la trésorerie « nouvelle » » pour payer des dettes antérieures au jugement.
En présentation imagée de la procédure, l'entreprise est dans un premier temps considérée comme si elle avait commencé son activité le jour du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde. Son passif (ses dettes) antérieur au jugement est pour l'instant "mis entre parenthèse" c'est à dire que les dettes ne sont pas payées (elles sont pendant ce temps vérifiées par le mandataire judiciaire avec le chef d'entreprise).

L’entreprise bénéficie donc d’une « bouffée d’oxygène » puisqu’elle est provisoirement déchargée de ses dettes antérieures au jugement, et doit consacrer ses efforts à l’amélioration de sa situation. Evidemment c’est l’occasion pour l’entreprise de reconstituer sa trésorerie puisqu’elle ne paye pas ses dettes antérieures.

L'entreprise va poursuivre son activité pendant cette période dite d'observation pendant laquelle des solutions de réorganisation seront recherchées pour permettre à terme de présenter un "plan de remboursement" aux créanciers basé sur des prévisions d'activité. Cette période dure 6 mois et peut être renouvelée une fois puis une seconde fois de manière exceptionnelle.

Par contre la période d’observation ne peut en aucun cas conduire à une aggravation de la situation, et l’entreprise doit assurer le paiement à bonne date de toutes les dettes postérieures au jugement.
C’est la première condition du maintien en période d’observation.

Première audience « de contrôle » :

Même si, à la différence du redressement judiciaire où c'est prévu par un texte (L631-15) il n'existe pas d'obligation légale, il est fréquent que le tribunal fixe dans le jugement d’ouverture de la procédure la date d’une future audience, quelques semaines plus tard. Cette première audience est une audience « de contrôle », pour s’assurer que l’entreprise est bien en mesure de poursuivre son activité dans générer de nouvelles dettes. Cette audience est purement administrative si l’entreprise règle normalement ses dettes nouvelles et bénéficie d’un suivi comptable, elle sera l’occasion de mettre immédiatement un terme à l’activité si le Tribunal n’est pas en mesure d’être sécurisé sur la trésorerie. En effet si l'arrêt de l'activité s'impose il est inutile d'attendre pour en tirer les conséquences.

L’activité est donc en principe poursuivie si l’entreprise n’aggrave pas sa situation.

La répartition des rôles entre l'administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire:

Pour rester dans une présentation imagée, pendant la période d'observation, le mandataire judiciaire va s'occuper du passé, c'est à dire d'arrêter le montant des dettes antérieurs au jugement qui ont été "mises entre parenthèse".

L'administrateur va s'occuper de l'avenir, c'est à dire de la période postérieure au jugement pour préparer le plan de "remboursement" des créanciers (s'il est possible) tout en veillant à ce que des dettes nouvelles ne soient pas créées.
 

La vérification des créances et le mandataire judiciaire:

Plus précisément :

Le mandataire judiciaire est donc chargé du « passé », et particulièrement de la vérification des créances, qui consiste à recenser les dettes : il est tenu de circulariser les créanciers conformément aux indications que le chef d’entreprise est tenu de lui remettre.

Les créanciers recevront donc dans les jours suivant le jugement une circulaire du mandataire judiciaire les invitant à lui faire connaitre le montant de la créance qu’ils revendiquent : on appelle cette formalité la « déclaration de créance ».

Le chef d’entreprise sera avisé de prévenir lui-même les créanciers avec lesquels il a un contact personnel, pour éviter qu’ils découvrent la situation par la circulaire du mandataire judiciaire.

Les créanciers disposent d’un délai (de deux mois à compter de la publicité du jugement d’ouverture, effectué par le greffe du Tribunal dans un journal dénommé BODACC) pour répondre au mandataire judiciaire.

A l’issue de ce délai, le mandataire judiciaire pourra transmettre au chef d’entreprise un état des créances déclarées auprès de lui, pour que les sommes demandées soient vérifiées avec les éléments comptables de l’entreprise.

Ce rapprochement, qu’on appelle « vérification des créances » permet de s’assurer de l’exactitude des « déclarations de créance » : par exemple le chef d’entreprise peut avoir oublié d’enregistrer dans sa comptabilité un chèque impayé, des pénalités ou majorations, mais le créancier peut avoir oublié de déduire un avoir ou un dernier règlement.

Les déclarations de créances sans discordance avec la comptabilité de l’entreprise feront partie du « passif », et celles pour lesquelles un désaccord existe donneront lieu à une contestation par le mandataire judiciaire.
Dans un premier temps, celui-ci adressera un courrier recommandé au créancier en lui indiquant le montant pour lequel il propose de retenir sa créance et les raisons du désaccord.
 

Le créancier disposera d’un délai de 30 jours pour lui répondre : soit il acceptera le montant proposé et reconnaitra son erreur, soit il maintiendra un montant sur lequel le chef d’entreprise n’est pas d’accord.
Dans le premier cas (accord sur le montant) la créance sera mentionnée dans le « passif ».
Dans le second cas (désaccord persistant après le courrier du mandataire judiciaire), le juge commissaire convoquera les parties (débiteur, créanciers, mandataire judiciaire, administrateur judiciaire s’il y en a un), et au terme d’une audience à l’occasion de laquelle chacun pourra s’exprimer, prendra une décision (ordonnance) qui sera mentionnée dans le « passif ».

Ainsi l’ensemble des créances, exactes dès le début ou conséquences d’échanges de courriers avec le mandataire, ou encore conséquences de décisions du juge commissaire, constitueront « l’état des créances », c’est-à-dire le montant total du passif antérieur au jugement qui avait été « mis entre parenthèse » pendant la période d’observation.

La poursuite de l'activité et l'administrateur judiciaire:

L’administrateur judiciaire (s’il en est désigné un, ce qui est généralement le cas) est donc au contraire chargé de l’avenir : il va assister l’entreprise pour les mesures urgentes – par exemple ouverture d’un nouveau compte bancaire -, les éventuelles restructurations à entreprendre.

A terme, le but de la période d’observation est, par des documents prévisionnels, de se faire une idée de ce que l’entreprise pourra, pour l’avenir, proposer à ses créanciers antérieurs au jugement qu’on a pour l’instant laissés « entre parenthèse ».

A partir de cette indication, le rapprochement est fait avec le « passé », c’est-à-dire l’état des créances issu de la « vérification des créances » réalisée entre le mandataire judiciaire et le chef d’entreprise : le rapport entre le montant des dettes et les possibilités de règlement permettra – ou pas – d’envisager de proposer un « plan » de remboursement aux créanciers.

La procédure est organisée pour conduire à une solution de plan de sauvegarde. Cependant d'autres solutions de "sortie" de la procédure sont possibles.

La solution du plan de Sauvegarde

Pour des explications plus détaillées, voir dans cette même rubrique "tout ce que vous voulez savoir" le sous menu "plan de remboursement des créanciers" qui donne plus de précisions sur les possibilités d'organisation des propositions de plan

La solution statistiquement la plus fréquente de la procédure de sauvegarde est le plan.

D'autres solutions sont envisageables: l'entreprise peut tout simplement être sorti de ses difficultés par les effets de la période d'observation et dans ce cas le Tribunal le constate et met fin à la procédure. La cessation des paiements peut être constatée et le Tribunal va prononcer le redressement judiciaire, et enfin l'échec de toute autre solution peut conduire à la liquidation judiciaire.

Pour entrer dans le détail du plan,le plan de sauvegarde est un « plan organisant le remboursement échelonné dans le temps des créanciers » en fonction de deux informations qui sont réunies et conciliées :

- Combien doit l’entreprise ? Cette information émane de la vérification des créances : passif qui avait été "mis entre parenthèse" sera pris en considération,

- Combien l’entreprise peut-elle raisonnablement rembourser annuellement ? Cette information émane des documents comptables prévisionnels établis durant la période d’observation, et est la conséquences des mesures prises, et du traitement de « l’avenir » avec le concours de l’administrateur judiciaire,
le plan pourra être envisagé sur la durée compatible avec ces deux paramètres.

Ainsi l’entreprise, avec le concours de l’administrateur judiciaire, mettra au point ses propositions de remboursement des créanciers, avec un échelonnement dans le temps, et le cas échéant avec des remises.

Les contraintes posées par la loi pour le plan:

Les limites imposées par la loi sont relativement souples, et sont au nombre de trois :

- la durée maximale de remboursement des créanciers est de 10 ans (15 ans pour les agriculteurs).

- le premier remboursement doit intervenir au maximum un an après le jugement arrêtant le plan : la première « annuité » de remboursement des créanciers devra intervenir au plus tard à la date anniversaire du jugement arrêtant le plan.

- les remboursements peuvent être annuels (c’est le plus pratique et la modalité qui prend le plus en considération les irrégularités du chiffre d’affaires dans l’année), mais dans tous les cas le minimum légal, c’est-à-dire imposé par la loi, est de 5% de chaque créance à compter de la troisième année. Les deux premières années, le plan peut prévoir des remboursements moins importants.

Comme indiqué dans la partie relative aux plans les juridictions ont tendance à considérer que ces contraintes s'imposent à tous les créanciers, alors en réalité le débiteur est totalement libre des propositions qu'il destine aux créanciers, qui sont libres de les accepter, et ce n'est qu'en cas de refus, et si le Tribunal arrête néanmoins le plan, que les modalités de remboursement des créanciers qui ont refusé les propositions seront fixées par le Tribunal à l'intérieur de ces contraintes

Mise en pratique des contraintes imposées par la loi: 

Ainsi bien souvent dans la pratique les plans proposés se situent, pourtant sans aucune nécessité juridique, à l'intérieur des contraintes légales qui s'appliquent uniquement aux créanciers qui ont refusé les propositions.

A titre d’exemple un plan « « élémentaire » proposera aux créanciers de les rembourser à 100% en 10 ans, par échéances annuelles de 10% chacune, la première payable à l’anniversaire du jugement adoptant le plan.

A l’intérieur de ces limites, le plan de remboursement proposé aux créanciers peut prévoir des options, généralement pour laisser le choix aux créanciers entre un remboursement intégral mais long et un remboursement plus rapide mais partiel.

Toujours à titre d’exemple on peut, pour autant que cela soit conforté par des documents comptables prévisionnels et des prévisions d’activité, proposer aux créanciers de se déterminer entre :
- une proposition à 100% en 10 ans avec progressivité c’est-à-dire par exemple 2% les deux premières années, 5% la troisième année (minimum imposé par la loi pour la troisième année), 6% la quatrième année, 10% la cinquième année, et 15% les années suivantes jusqu’à la 10ème, soit un total de 100%
- une proposition à 40% en quatre ans, avec des annuités de 10% par an, soit au total 40%.

La première option correspond à la « carte » du remboursement intégral, mais ce sont seulement 15% qui seront payés à l’issue des 4 premières années, alors que l’autre option correspond à la « carte » du remboursement partiel, mais plus rapide, avec 40% de la créance à l’issue des 4 premières années et abandon des 60% de la créance (et le traitement fiscal de l’abandon de créance qui va avec, que ce soit en matière de TVA ou d’IS).

La consultation des créanciers:

C’est le mandataire judiciaire qui consultera les créanciers : par courrier (ou assemblée) il leur demandera de prendre position sur ces propositions et s’il y en a plusieurs de se déterminer entre les différentes propositions: il suffira aux créanciers de répondre au mandataire judiciaire en lui indiquant leur décision, le cas échéant en indiquant quelle est l’option qu’ils choisissent, ou même en indiquant qu’ils refusent toutes les propositions.
Le mandataire judiciaire en informera le Tribunal et rendra compte des réponses des créanciers en remettant au tribunal une liste des réponses positives et des réponses négatives des créanciers.

La décision du Tribunal sur le plan:

Au vu des réponses des créanciers, le Tribunal prendra une décision (jugement) :

- soit le Tribunal arrêtera (« acceptera ») le plan, s’il estime que les propositions sont correctes et que les réponses des créanciers le permettent. Ce n’est pas parce que des créanciers ont refusé le plan que le Tribunal est contraint de refuser le plan, ce qui déterminera le Tribunal est plus la viabilité de l’entreprise, le sérieux des prévisions, et évidemment la position de l’ensemble des créanciers.

- soit le Tribunal considérera le plan comme insuffisant, ou que les réponses des créanciers ne permettent pas de l’arrêter (« de l’autoriser »).

Le jugement arrêtant le plan: contenu, effets, commissaire à l'exécution du plan.

Si le Tribunal arrête le plan (« l’accepte »), il donnera deux précisions dans son jugement :

- le Tribunal prendra acte de la décision des créanciers qui ont accepté les propositions. Chacun sera remboursé en fonction de la proposition qu’il aura acceptée.

- Pour les créanciers qui ont refusé toutes les propositions, le tribunal leur imposera des délais, mais ne pourra leur imposer de remise : ils seront donc remboursés à 100%, mais dans le délai fixé par le Tribunal, qui ne peut dépasser 10 ans.

En principe pour les créanciers qui ont refusé les propositions le Tribunal fixe des délais calqués sur ceux de la plus longue des propositions, pour éviter de déséquilibrer la trésorerie et ne pas mettre en péril le plan.
Le jugement qui arrête, c'est-à-dire « valide » le plan de remboursement des créanciers va désigner un commissaire à l’exécution du plan, qui est soit l’administrateur judiciaire soit le mandataire judiciaire.

La mission du commissaire à l’exécution du plan sera de recevoir de l’entreprise les sommes nécessaires au règlement des échéances du plan, et de payer chaque créancier en fonction du plan.

En cas de difficulté, le commissaire à l’exécution du plan se rapprochera de l’entreprise pour examiner les possibilités de régularisation des échéances, et en informera le Tribunal pour qu’il puisse, si nécessaire, mettre un terme au plan, c'est-à-dire ordonner sa « résolution ».

La solution de sortie par achèvement des difficultés

La procédure de sauvegarde, et en particulier la suspension des poursuites qu'offre la période d'observation peut à elle seule parfois permettre de solutionner les difficultés de l'entreprise.

Dans ce cas et à tout moment de la période d'observation, le Tribunal peut constater que les difficultés sont résolues, et mettre un terme à la procédure: dans ce cas il n'y a pas de plan. L622-12 du code de commerce et L622-10 alinéa 4

Les solutions de constatation de l'état de cessation des paiements

S'il s'avère en cours de période d'observation que l'entreprise est en état de cessation des paiements, le Tribunal mettra fin à la procédure de sauvegarde qui sera "convertie" en procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire suivant les circonstances (article L622-10 du code de commerce)

L'état de cessation des paiements peut résulter de la constatation que le Tribunal s'est trompé en ouvrant la procédure de sauvegarde, et qu'en réalité il y avait cessation des paiements, mais également de la survenue de la cessation des paiements en cours de période d'observation de la procédure de sauvegarde. Par exemple le débiteur faisait l'objet d'un contentieux en cours au jour de la procédure de sauvegarde, et est finalement condamné définitivement après l'ouverture de la procédure: cette dette, exigible et antérieure à l'ouverture de la procédure de sauvegarde (notion de fait générateur) va amener le constat de la cesation des paiements (voir notamment Cass com 5 mai 2015 n°14-11706 sur le fait que le tribunal se pmositionne au jour où il statue pour apprécier l'état de cessation des paiements)

Le tribunal est saisi par le débiteur, l'administrateur judiciaire, le mandataire judiciaire et peut se saisir d'office (article L622-10). L'article R622-11 précise les modalités de saisine du tribunal (requête sauf le cas de saisine d'office où le débiteur est convoqué)

Ce passage de la sauvegarde au redressement judiciaire est également souvent motivé par les besoins de l'intervention de l'AGS (voir le lexique) pour payer les salaires, puisqu'en procédure de sauvegarde l'AGS n'intervient pas pour payer les salaires.

La solution du redressement judiciaire sans que l'état de cessation des paiements soit constaté

L'article L622-10 prévoit en son alinéa 3 "A la demande du débiteur ou, à la demande de l'administrateur, du mandataire judiciaire ou du ministère public, lorsqu'aucun plan n'a été adopté conformément aux dispositions de l'article L. 626-30-2 et, le cas échéant, de l'article L. 626-32 par les comités mentionnés à la section 3 du chapitre VI du présent titre, il (comprendre le tribunal) décide également la conversion en redressement judiciaire si l'adoption d'un plan de sauvegarde est manifestement impossible et si la clôture de la procédure conduirait, de manière certaine et à bref délai, à la cessation des paiements."

Dans ce cas le redressement judiciaire est prononcé non pas sur le constat de l'état de cessation des paiements mais de sa survenue prochaine. Par la suite d'ailleurs la liquidation judiciaire de ce redressement judiciaire pourra être prononcée si le redressement est manifestement impossible, c'est à dire sans, là encore, que l'état de cessation des paiements soit constaté Cass com 28 février 2018 n°16-19422

Quelques différences entre la procédure de sauvegarde et le redressement judiciaire

voir sauvegarde / redressement les différences


Sauvegarde / Redressement judiciaire: différences

Quelques différences entre la procédure de sauvegarde et le redressement judiciaire

Globalement les deux procédures fonctionnent de la même manière, notamment pour le déroulement de la période d'observation et le plan. Les rôles des intervenants sont les mêmes, et les règles légales aussi.

Cependant, la procédure de sauvegarde a été voulue par le législateur comme incitative: on part du principe que si l'entreprise ses difficultés de manière précoce, c'est à dire avant l'état de cessation des paiements, les chances de redressement sont augmentées.

L'absence d'état de cessation des paiements est l'axe majeur de la différence entre la sauvegarde et les deux autres procédures collectives que sont le redressement et la liquidation judiciaires, et d'ailleurs dès que le Tribunal constate l'état de cessation des paiements il doit convertir la sauvegarde en redressement ou liquidation judiciaire Cass com 15 novembre 2017 n°16-19690

Ainsi, pour inciter les chefs d'entreprises à dévoiler leurs difficultés, quelques différences ont été introduites par rapport au redressement judiciaire, et la procédure de sauvegarde offre aux entreprises, à leurs dirigeants et aux cautions de nombreux avantages par rapport à la procédure de redressement judiciaire.

Parmi ces avantages:

- seul le débiteur peut demander l'ouverture de la procédure, à la différence du redressement judiciaire qui peut être demandé par un créancier

- plusieurs mesures qui peuvent être perçues comme instaurant un contrôle vexatoire, applicables en redressement judiciaire, ne sont pas applicables en sauvegarde:

* en sauvegarde le tribunal n'est pas contraint de prévoir une première audience dans les deux mois de l'ouverture pour contrôler l'avancement de la procédure (alors qu'en redressement judiciaire l'article R631-15 l'impose).

* en sauvegarde c'est le débiteur qui établit l'inventaire des actifs alors qu'en redressement judiciaire ce sera un huissier ou un commissaire priseur (L622-6 et R622-4 du code de commerce)

* la rémunération du chef d'entreprise n'est pas encadrée en sauvegarde alors qu'en redressement judiciaire elle relève de la décision du juge commissaire (R631-11) (cette disposition est supprimée par la loi du 22 mai 2019, et désormais la rémunération est maintenue dans les deux cas, la différence étant cependant qu'en redressement judiciaire le juge commissaire peut, sur saisine de l'administrateur, du mandataire ou du ministère public, réduire la rémunération

* les licenciements sont libres en sauvegarde alors qu'en redressement judiciaire le juge commissaire doit les autoriser (L631-17)

* la cession d'entreprise n'est pas une "sortie" de la procédure de sauvegarde, même si la cession d'une ou plusieurs activités est possible en complément d'un plan de sauvegarde. La crainte du débiteur de se voir "dépossédé" de son entreprise est donc moindre qu'en redressement judiciaire où la cession est une alternative au plan de redressement.

- En sauvegarde seul le débiteur peut proposer un plan aux classes de parties affectées (L631-19), alors qu'en redressement judiciaire toute partie affectée le peut (L626-30-2)

- les sanctions ( faillite personnelle, banqueroute ..) ne sont pas applicables à la procédure de sauvegarde (L653-1 pour la faillite personnelle, qui ne vise que le redressement ou la liquidation, et L654-1 pour la banqueroute complété par L654-2 qui ne vise que le redressement ou la liquidation)

- le traitement des cautions et coobligés personnes physiques (par exemple le dirigeant) est très favorable en sauvegarde : comme en redressement judiciaire, la caution ne peut être poursuivie pendant la période d'observation du débiteur principal (L622-28 et L631-14), mais en outre, et à la différence du redressement judiciaire (L631-20), la caution pourra également se prévaloir du plan de sauvegarde (L626-11), c'est à dire que tant que le plan est respecté, elle ne sera pas actionnée en paiement (voir par exemple Cass com 22 juin 2017 n°16-20027).

Cette dernière différence est supprimée pour les procédures ouvertes à compter du 1er octobre 2021 en application de l'ordonnance du 15 septembre 2021.

- la résolution du plan de sauvegarde permet l'ouverture d'un redressement judiciaire (L626-27-1), alors que la cessation des paiements en cours de plan de redressement entraîne résolution du plan et liquidation judiciaire

- les dispositions sur la cession forcée des parts du dirigeant ne sont pas traitées de la même manière (voir le mot parts sociales)

Il existe cependant une différence qui n'est pas un avantage : l'AGS n'intervient pas en sauvegarde pour le paiement des salaires ou indemnités de ruptures dus aux salariés au jour du jugement  (article L3253-8 du code du travail au 1°) puisque par hypothèse l'entreprise n'est pas en état de cessation des paiements et peut donc assumer les salaires (l'AGS intervient cependant le cas échéant pour avances les indemnités de rupture consécutives aux licenciements pour motif économique intervenue en période d'observation et dans le cadre d'un plan de sauvegarde). C'est sans doute le seul point "pénalisant" de la sauvegarde par rapport au redressement judiciaire (l'AGS est par contre susceptible d'intervenir pour la prise en charge des sommes dues aux salariés licenciés pendant la période d'observation - sauf pour les salaires de la période d'observation- et interviendra également pour payer les sommes dues aux salariés antérieurement au jugement de sauvegarde si par la suite un redressement judiciaire est prononcé en raison de l'état de cessation des paiements - Cass Soc 21.01.2014 p 12-18421):en effet le 2° du L3253-8 du code du travail ne distingue pas Cass Soc 28 février 2018 n°16-22108

Enfin et pour les procédures ouvertes à compter du 1er octobre 2021, en application de l'ordonnance du 15 septembre 2021,

- la durée de la période d'observation en sauvegarde est limitée à 12 mois, le renouvellement exceptionnel à la requête du ministère public étant supprimé (mais maintenu en redressement judiciaire)

- les annuités du plan à compter de la 6ème, doivent être de 10% pour les modalités imposées par le Tribunal aux créanciers qui ont refusé les propositions (L626-18)


Sauvegarde accélérée

Dispositif antérieur au 1er octobre 2021

En conséquence de l'ordonnance du 12 Mars 2014 il a été procédé à l'adjonction à la sauvegarde financière accélérée d’une procédure de sauvegarde accélérée qui pourra être organisée avec d’autres créanciers que les établissements financiers (L628-6 du code de commerce)
Cette procédure est applicable en cours de conciliation, ce qui permet donc, par différence avec la sauvegarde « de droit commun », l’ouverture d’une sauvegarde accélérée en cas de cessation des paiements avéré depuis moins de 45 jours (L628-1)
La durée de la procédure est limitée à 3 mois.

La déroulement de la procédure, qui ne peut être demandée que par le débiteur, est voulu comme très rapide, l'essentiel de sa solution ayant été préparée "en amont" par le conciliateur, lequel devient en principe administrateur judiciaire. La procédure est d'ailleurs ouverte "sur le rapport" du conciliateur.

Comme pour la sauvegarde financière accélérée, la procédure est réservée aux entreprises de taille importante (seuils fixés par décret de 20 salariés, 3 millions d'euros de chiffre d'affaires et 1.5 million d'euros de total du bilan) disposant de comptes certifiés par un commissaire aux comptes ou établis par un expert comptable.

Le débiteur doit disposer d'un projet de plan déjà avancé et susceptible d'être rapidement accepté par une proportion significative de créanciers. Les créanciers récalcitrants se verront imposer le plan sur lequel le tribunal aura statué (article L628-8 du code de commerce).

Le processus de déclaration de créance est "préparé" par la remise par le débiteur d'une liste de ses créanciers, certifiée par le commissaire aux comptes ou visée par l'expert comptable de l'entreprise: les créanciers disposent d'un délai de 2 mois à compter de l'insertion au BODACC pour déclarer leur créance.

Le plan doit être arrêté, dans les formes organisant le fonctionnement des comités de créanciers, dans les 3 mois de l'ouverture de la procédure. Ce délai est impératif, et ne peut être prorogé ni dépassé.

Dispositif à compter du 1er octobre 2021 : fusion de la sauvegarde accélérée et de la sauvegarde financière accélérée. Articles L628-1 et suivants du code de commerce

Cette nouvelle procédure a été instaurée pour satisfaire à la directive européenne du 20 juin 2019.

Cette procédure est ouverte aux entreprises dont les comptes sont établis par un expert comptable ou certifiés par un commissaire aux comptes.

Le débiteur en conciliation pourra solliciter l'ouverture de cette procédure pour bénéficier d'un plan de sauvegarde nécessaire adopté par des classes de parties affectées, y compris s'il est en état de cessation de paiement depuis moins de 45 jours (L628-1)

Seuls les créanciers ayant participé à la conciliation ont vocation à déclarer créance, et le plan devra être arrêté dans un délai de 2 mois renouvelable une fois (L628-8) à défaut de quoi il est mis fin à la procédure.

Pour résumer :

Comme précédemment, la procédure de sauvegarde accélérée est soumise aux règles de la sauvegarde sauf texte spécial (L628-1)

Cependant les dispositions du III et du IV de l’article L622-13 du code de commerce (résiliation d’un contrat en cours) et des sections 3 et 4 du chapitre IV (revendications) sont inapplicables. 

La procédure est ouverte sur demande d’un débiteur en procédure de conciliation qui :

- Est éventuellement en état de cessation des paiements, mais l’était depuis moins de 45 jours lors de la demande d’ouverture de la conciliation (L628-1), été sous le contrôle du Parquet (L628-5)

- a conçu un plan susceptible d’assurer la pérennité de l’entreprise et susceptible d’être adopté, dans les délais de 2 mois (éventuellement prorogés à 4 mois cf L 628-8 du code de commerce).

- Dispose de comptes certifiés par un commissaire aux comptes ou établis par un expert-comptable (L. 628-1)

L’ouverture de la procédure est prononcée sur rapport du conciliateur (et éventuellement après que le Tribunal ait obtenu les informations sur le déroulement de la conciliation ou du mandat ad-hoc cf L628-2), et l’audience est tenue en présence du Parquet. Le tribunal désigne un ou plusieurs administrateurs judiciaires (outre un mandataire judiciaire comme en sauvegarde).

Le texte est cependant modifié pour préciser que l'adoption du plan relèvera des classes de parties affectées (L628-1) dont la réunion est donc obligatoire en sauvegarde accélérés, sans condition de seuil (L628-4), dans la ligne des dérogations qui découlaient des dispositions adoptées durant la crise sanitaire (ordonnance 2020-596 du 20 mai 2020).

A cette fin le débiteur établit la liste de chaque « partie affectée » qui a participé à la procédure de conciliation, laquelle doit être certifiée par son commissaire aux comptes ou visée par son expert-comptable (avec mention des accords de subordination).

Cette liste est déposée au greffe par le débiteur ce dernier, et permet au mandataire judiciaire d’informer les parties affectées du montant retenu, qui peut être actualisé (L628-7)

Sans changement par rapport aux textes antérieurs, le débiteur peut solliciter que les effets de la procédure se limitent aux créanciers bancaires (L628-1 et R. 628-2), ce qui fait dire à certains auteurs que la procédure peut être « semi collective ».

Le plan est arrêté par le tribunal dans les formes des plans de de sauvegarde soumis aux classes de parties affectées.


Sauvegarde financière accélérée

Dispositif fusionné avec la sauvegarde accélérée par ordonnance du 15 septembre, applicable à compter du 1er octobre 2021.

Dispositif antérieur au premier octobre 2021: ci dessous

La sauvegarde financière accélérée (on utilise souvent l'abréviation SFA) ne concerne que les grandes et très grandes entreprises.

La procédure fonctionne un peu comme une procédure de sauvegarde dans laquelle un plan serait proposé à un comité des établissements de crédit (voir le mot comité des créanciers) mais avec des délais racourcis, et une procédure considérablement allégée par le fait que pour l'essentiel, le plan a déjà été négocié avant l'ouverture de la procédure.

Elle n'a d'effet que sur les créanciers financiers (banques, établissements de crédit), et se déroule dans un laps de temps très bref (en principe 2 mois maximum ou plus exactement un mois renouvelable une fois). Elle a pour objectif de résoudre rapidement les difficultés.

On appelle parfois cette procédure "prépack à la Française" (anglicisme à proscrire) pour indiquer qu'il s'agit d'un accord préétabli avec les principaux partenaires financiers dans le cadre d'une procédure de conciliation, qu'il s'agira, par le recours à la SFA, d'imposer aux autres créanciers financiers qui l'avaient refusé.

Cette procédure de "passage en force" "prénégociée" avant sa phase judiciaire (d'où l'anglicisme prépack qui peut parfaitement être remplacé par des termes français) est inspirée du droit américain (le "prépackaged plan" du célèbre chapitre 11 (dit en anglais "chapter eleven") du code américain de la faillite ( dit "banckruptcy code")

La procédure n'est ouverte qu'à la demande du débiteur.

Situations concernées

La SFA s'adresse aux entreprises qui se trouvent fortement endettées auprès des banques et établissements financiers et qui, dans le cadre d'une procédure amiable de conciliation, ont déjà négocié des propositions de règlement ayant obtenu le soutien de la majorité de leurs créanciers financiers.

En pratique dans le cadre de la conciliation qui a précédé la SFA, le conciliateur a donc déjà négocié le plan avec les principaux partenaires financiers, mais n'a pas pu obtenir l'accord de tous, et cette absence d'accord ne permet pas de sortir des difficultés.

Le recours à la SFA aura pour effet de soumettre le plan envisagé au comité des établissements de crédit: le vote majoritaire des partenaires financiers qui s'étaient déjà engagés auprès du conciliateur va permettre d'imposer le plan aux créanciers récalcitrants: la SFA permet donc de contourner l'absence d'unanimité de ces créanciers financiers sur les propositions de règlement des dettes qui leur avait été faites durant la conciliation,

Conditions d'ouverture:

La SFA était initialement ouverte aux entreprises employant au moins 150 salariés, ou dont le total de bilan est supérieur à 25 millions d'euros, ou encore dont le total de bilan est supérieur à 10 millions d'euros, et qui contrôlent (c'est notamment le cas des holdings) une société présentant une des trois caractéristiques suivantes :  au moins 150 salariés ou réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 20 millions d'euros ou dont le total de bilan est supérieur à 25 millions d'euros.

L'ordonnance du 12 mars 2014 applicable à compter du 1er juillet 2014 est venu assouplir ces seuils et désormais les seuils sont identiques pour la SFA et la sauvegarde accélérée: 20 salariés, 3 millions d'euros de chiffre d'affaires et 1.5 million d'euros de total du bilan

La procédure de SFA peut être ouverte si l'entreprise :

  • est déjà engagée dans une procédure de conciliation et, sans être en cessation des paiements, connaît des difficultés qu'elle ne peut pas surmonter seule,

  • justifie de la certification de ses comptes par un commissaire aux comptes ou par un expert comptable,

  • a élaboré un projet de plan visant à assurer sa pérennité et susceptible de recueillir un soutien suffisamment large de la part des banques pour rendre vraisemblable son adoption dans un délai de 2 mois.

Déroulement de la procédure

Ouverture de la procédure:

Le tribunal de commerce statue sur l'ouverture de la procédure après rapport du conciliateur sur les perspectives d'adoption du projet de plan par les banques.

La procédure est avant tout une procédure de sauvegarde, et fonctionne donc comme cette procédure chaque fois que la loi n'y déroge pas.

En pratique, comme son nom l'indique, par rapport à la procédure de sauvegarde "de droit commun", toute la procédure est accélérée de telle manière que le plan soit rapidement adopté.

La désignation d'un administrateur judiciaire est obligatoire, et sauf motivation spéciale, c'est le conciliateur qui est désigné.

Les créanciers et le passif

Les créanciers qui ont déjà participé à la conciliation sont dispensés de déclaration de créance. Leurs créances  sont prises en considération suivant une liste établie par le débiteur lui même, certifiée par son commissaire aux comptes ou son expert comptable et déposée au greffe du tribunal concerné. Le créancier peut seulement le cas échéant actualiser sa créance.

Les créanciers concernés par la SFA (établissements financiers) qui n'avaient pas participé à la conciliation déclarent leur créance auprès du mandataire judiciaire.

les effets de la SFA sont limités aux créanciers financiers

Une fois ouverte, la SFA produit ses effets uniquement à l'égard des établissements financiers, et, le cas échéant, des créanciers obligataires (c'est-à-dire détenant des obligations de l'entreprise).

Les effets des procédures collectives (arrêt des paiements, du cours des intérêts et des poursuites, etc.) ne s'appliquent qu'à ces créanciers.

Pour le surplus l'entreprise continue à fonctionner normalement sans que la procédure ait la moindre interférence.

Les autres créanciers, et notamment les fournisseurs, ne sont pas concernés. Les sommes dues leur sont payées à leur échéance normale et des poursuites peuvent être engagées si elles ne sont pas réglées.

L'entreprise peut continuer à recevoir le paiement de ses clients.

Le plan et la décision des créanciers concernés

Comme c'est le cas en matière de plan proposé aux créanciers par l'intermédiaire des comités de créanciers (voir ce mot) le plan échappe aux règles de droit commun de délai maximum de 10 ans, au délai de carence d'un an maximum, et au "plancher" de 5% par an à compter de la troisième année: le plan est libre pour autant que ses modalités ne soient pas jugées contraires à l'ordre public par le tribunal.

L'accord sur le plan suppose la majorité des 2/3 en montant de créances détenues par les créanciers financiers ayant exprimé un vote, au sein du comité des créanciers constitué des seuls partenaires financiers, dans un délai qui peut être réduit jusqu'à 8 jours à compter de la présentation du plan (voir le mot comité des créanciers)

Fin de la procédure

Le tribunal arrête le plan dans le délai d'un mois à partir du jugement d'ouverture. Il peut prolonger ce délai d'un mois au maximum.

Si les établissements financiers n'adoptent pas le projet de plan et si le plan n'est pas arrêté dans le délai fixé, le tribunal met fin à la procédure


Sauvegarde passage en redressement ou liquidation judiciaires

Voir le mot sauvegarde


SCEA / SCEV

Société civile d'exploitation agricole/ Société civile d'exploitation viticole

Voir société civile


SCEA Société civile d'exploitation agricole

Société civile d’exploitation agricole

C’est une société civile particulière, également régie par les règles du code civil (articles 1845 et suivants).

L’objet de la SCEA est d’exploiter un domaine agricole

Les associés sont au minimum 2 (personnes physiques ou morales) .

La responsabilité des membres est indéfinie, au prorata des parts

Voir également sociétés civiles


Secret professionnel (et procédure collective)

La notion de secret professionnel

La loi définit dans certains cas le secret professionnel auquel sont astreints tel ou tel intervenant, dans des domaines très divers (médical, juridique, ….)

La violation du secret professionnel est définie par les articles 226-13 et suivants du code pénal

articles 226-13 "La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende."

article 226-15

Le fait, commis de mauvaise foi, d'ouvrir, de supprimer, de retarder ou de détourner des correspondances arrivées ou non à destination et adressées à des tiers, ou d'en prendre frauduleusement connaissance, est puni d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.

Est puni des mêmes peines le fait, commis de mauvaise foi, d'intercepter, de détourner, d'utiliser ou de divulguer des correspondances émises, transmises ou reçues par la voie électronique ou de procéder à l'installation d'appareils de nature à permettre la réalisation de telles interceptions.

article 226-14 qui organise la révélation

L'article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n'est pas applicable :

1° A celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ;

2° Au médecin ou à tout autre professionnel de santé qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République ou de la cellule de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l'être, mentionnée au deuxième alinéa de l'article L. 226-3 du code de l'action sociale et des familles, les sévices ou privations qu'il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychiques de toute nature ont été commises. Lorsque la victime est un mineur ou une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, son accord n'est pas nécessaire ;

3° Aux professionnels de la santé ou de l'action sociale qui informent le préfet et, à Paris, le préfet de police du caractère dangereux pour elles-mêmes ou pour autrui des personnes qui les consultent et dont ils savent qu'elles détiennent une arme ou qu'elles ont manifesté leur intention d'en acquérir une.

Le signalement aux autorités compétentes effectué dans les conditions prévues au présent article ne peut engager la responsabilité civile, pénale ou disciplinaire de son auteur, sauf s'il est établi qu'il n'a pas agi de bonne foi.

Le recel de violation du secret professionnel est également puni, en l'espèce par l'article 321-1 du code pénal  

Le recel est le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire office d'intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d'un crime ou d'un délit.

Constitue également un recel le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit d'un crime ou d'un délit.

Le recel est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende.

Le secret professionnel à l'épreuve des procédures collectives

L'article L622-6 du code de commerce dispose:

"L'administrateur ou, s'il n'en a pas été nommé, le mandataire judiciaire peut, nonobstant toute disposition législative ou réglementaire contraire, obtenir communication par les administrations et organismes publics, les organismes de prévoyance et de sécurité sociale, les établissements de crédit, les sociétés de financement, les établissements de monnaie électronique, les établissements de paiement ainsi que les services chargés de centraliser les risques bancaires et les incidents de paiement, des renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la situation patrimoniale du débiteur."

Cet article est rendu applicable à la liquidation judiciaire par l'article L641-4.

Ainsi les mandataires de justice peuvent accéder à une information complète sur la situation du débiteur.

De la même manière, et dès lors que le liquidateur représente le débiteur, un notaire n'est pas fondé à lui opposer le secret professionnel dans le cadre d'une succession dans laquelle le débiteur est héritier Cass com 23 Octobre 2019 n°18-15280

Enfin le juge commissaire peut à tout moment, et surtout peut être informé directement par le Parquet (articles L621-8 et L641-11 al 2) et par les personnes et organismes tenus normalement au secret professionnel – commissaire aux comptes, expert comptable, administrations, banques qui ne peuvent lui opposer ce secret professionnel (articles L623-2 L631-18 L641-11). En suite de ces dispositions les textes disposent que le  juge commissaire transmet aux mandataires les informations utiles au déroulement de leur mission (articles L623-3 L631-18-1 L641-11 AL3).

Il ne semble donc pas qu'on puisse reprocher au juge commissaire de communiquer aux mandataires de justice des informations auxquelles ils n'avaient pas directement accès, ni à ces dernier des les utiliser dès lors que ces informations leurs sont précisément transmises pour l'exercice de leur mission.

Le secret professionnel liant les intervenants dans les procédures collectives

Le membres du tribunal de commerce 

Le recueil des obligations déontologiques du juge du tribunal de commerce détermine le secret des délibérations et la confidentialité (page 19)

Les mandataires et administrateurs judiciaires

article 212-1 à 212-3 des règles professionnelles

 Section 2 Le secret professionnel

212.1 Dans le cadre des missions et mandats qui leur sont confiés, et sous réserve des dispositions légales et réglementaires propres à l’exercice de leur activité, l’administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire sont tenus au secret professionnel dans les conditions prévues par les articles 226-13 et 226-14 du code pénal. Ce secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance de l’administrateur judiciaire ou du mandataire judiciaire dans l’exercice de son activité.

212.2 L’administrateur judiciaire ou le mandataire judiciaire doit n’accepter de témoigner de ce qu’il peut savoir au titre des mandats et missions qui lui sont ou lui ont été confiés que dans les cas expressément prévus par la loi et le règlement tels qu’ils sont interprétés par la jurisprudence.

212.3 Lorsque l’administrateur judiciaire ou le mandataire judiciaire exerce en groupe ou participe à une structure de mise en commun de moyens ou encore au sein d’une société pluri-professionnelle, le secret s’étend à tous les professionnels qui exercent avec lui.

Les greffiers

Les règles professionnelles établies par le Conseil National des Greffiers des Tribunaux de Commerce (approuvées par le Garde des sceaux) organise le secret.

Chapitre 2. DEVOIR DE DISCRETION ET SECRET PROFESSIONNEL

2.1 Les principes Dans le cadre de ses activités, le greffier de tribunal de commerce est soumis à un devoir général de réserve et de discrétion ; le devoir de réserve s’étend à tout mode de communication, en ce compris les réseaux sociaux ; il est strictement soumis au secret professionnel dans les conditions prévues par la loi.

2.2 La structure professionnelle, respect du devoir de discrétion et du secret professionnel Le greffier doit faire respecter le devoir de réserve et de discrétion ainsi que le secret professionnel par les collaborateurs du greffe. Il répond des violations du secret qui seraient ainsi commises. Lorsque le greffier fait partie d’une société, le secret professionnel s’étend à l’ensemble des membres de celle-ci.

2.3 La sanction du non-respect La violation du secret professionnel ou du devoir de réserve par le greffier constitue une faute disciplinaire.


Sécurité sociale (privilège)

Voir privilège de sécurité sociale


SELARL ou forme individuelle ?

Une société d’exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) est une SARL adaptée au fonctionnement de ceux des professionnels indépendants pour lesquels cette forme sociale est autorisée par les textes.

La société peut n’avoir qu’un associé et présenter alors une alternative par rapport à l’exercice individuel.

Il s’agit avant tout d’une société, avec les contraintes que cela suppose : statuts, assemblées, approbation des comptes, affectation des résultats ..

Comptablement à la différence d’un professionnel indépendant, qui tient une comptabilité de trésorerie, c’est-à-dire en recettes/ dépenses, la société doit tenir une comptabilité dite d’engagement, c’est-à-dire en débit/ crédit : ce n’est plus la recette ou la dépense qui génère l’opération mais l’émission ou la réception de la facture, sans égard pour son paiement.

(évidemment le passage d’un régime à l’autre a un coût fiscal, puisque les créances acquises sont taxées immédiatement, sans attendre leur encaissement, mais sous déduction des factures non encore payées)

Mais cela peut aussi présenter de sérieux avantages financiers.

La société, si elle est unipersonnelle, peut choisir de rester soumise à l’impôt sur le revenu.

Mais elle peut aussi, de manière irrévocable, opter pour l’impôt sur les sociétés (15% pour les 38.120 premiers euros et 33,33 % au-delà).

En outre le professionnel peut bénéficier de deux sources de rémunération : une rémunération de dirigeant et des dividendes (qui sont évidemment toutes deux soumises à l’impôt sur le revenu).

Socialement, seule la rémunération est soumise au même statut que le travailleur non salarié, mais à la différence du professionnel indépendant pour lequel l’assiette est le bénéfice, les dividendes, c’est-à-dire la part allouée au professionnel hors rémunération échappe à ce statut.

La rémunération (évidemment une charge de la société) est imposable dans la catégorie des traitements et salaires, ce qui ouvre droit à une déduction forfaitaire de 10% au titre des frais professionnels plafonnée (environ 13.000 €) alors que le régime des travailleurs non salariés ne le permet pas.

Les dividendes, imposables au régime des revenus de capitaux mobiliers font l’objet d’un abattement de 40% avant d’être imposables à l’impôt sur le revenu et à la CSG et CRDS (15.5 %). Les cotisations sociales sont appliquées après déduction d’une franchise égale à 10% de la participation en capital et 10% des sommes figurant au crédit du compte courant d’associé.

Ainsi spécialement dans le cas où le professionnel peut se permettre de laisser un compte courant important (et dans ce cas il peut donner lieu à intérêt), cette franchise peut avoir une incidence importante.

Les comptes courants des associés peuvent être rémunérés. Les intérêts sont fiscalement déductibles dans certaines limites et sous certaines conditions.

Pour résumer : le professionnel indépendant est soumis aux charges sociales (plus de 40%) et à l’impôt sur le revenu sur son bénéfice, alors qu’en SELARL :

- sa rémunération de gérance est soumise aux mêmes charges sociales, à l’impôt sur le revenu mais sous déduction d’un abattement de 10%.

- le bénéfice est soumis à l’IS au taux de 15 % jusqu’à 38.120 € et 33,33% au-delà, mais s’il n’est pas distribué il n’est évidemment pas soumis aux charges sociales et à l’impôt sur le revenu. Le bénéfice distribué sous forme de dividendes est soumis à charges et impôt avec des abattements.


Séparation de corps

La décision qui prononce la séparation de corps des époux par consentement mutuel et homologue leur convention de règlement des effets de cette séparation est régie par l'article 1104 du Code de procédure civile et peut faire l'objet d'une tierce opposition du liquidateur de l'un des époux (Cass civ 1ère, 13 janvier 2016 n°14-29631)

Voir également divorce


Séparation des biens (régime matrimonial)

voir également les mots "divorce", "communauté", "conjoint" et "indivision"

Généralités

Le mariage peut être consenti "sans contrat" et dans ce cas la loi prévoit un régime matrimonial, c'est à dire un ensemble de règles qui vont régir l'aspect patrimonial du mariage. Ce régime légal est un régime dit de communauté réduite aux acquêts, que la loi a retenu car il est susceptible de convenir à la grande majorité: les biens acquis pendant le mariage (qu'on appelle les acquêts) sont dits communs, c'est à dire appartiennent aux deux époux ensemble, et les biens dont les époux étaient propriétaires avant le mariage ou eux qu'ils reçoivent par succession ou donation sont des "propres" c'est à dire leur appartiennent en propre.

L'inconvénient de cette souplesse est que les créanciers de l'un des conjoint peuvent saisir les biens de ce conjoint et dans certains cas les biens communs (par exemple en liquidation judiciaire le liquidateur va vendre les biens communs)

Il est possible, soit par contrat passé devant notaire avant le mariage, soit en changeant de régime matrimonial, d'adopter un autre régime matrimonial.

Le régime matrimonial le plus souvent retenu par les personnes passibles de procédure collective est le régime dit de la séparations des biens: dans ce cas il n'y a pas de biens commun. Les biens sont en principe propres à l'un ou l'autre des époux, et les créanciers de l'un des époux, ou le liquidateur en cas de liquidation judiciaire, ne peuvent saisir que les biens de l'époux débiteur.

Le régime de séparation des biens en pratique

En pratique cet avantage d'absence de communauté est largement déprécié si on constate que bien souvent les époux achètent ensemble les biens nécessaires à leur vie de famille, et notamment leur logement. Ce bien est alors indivis entre eux (voir le mot indivision) et chacun est réputé en posséder 50% (sauf clé de partage différent expliqué par un financement déséquilibré entre les époux).

Les créanciers de l'un des époux peuvent saisir les biens de cet époux et imposer le partage des biens indivis, ce qui, si ces biens ne sont pas partageables (par exemple un appartement unique) conduira à sa saisie. En cas de liquidation judiciaire le liquidateur fera de même. Ainsi dès lors qu'il existe des biens indivis, le régime de séparation des biens ne permet pas toujours d'éviter la saisie de ces biens, mais a l'avantage que le conjoint qui n'est pas concerné par la liquidation va récupérer sa part, soit a priori 50%, alors qu'en régime de communauté la totalité du prix sera affecté aux créanciers du conjoint

Le changement précipité de régime matrimonial n'est pas une solution

On comprend que le passage du régime communautaire au régime séparatiste est une tentation lorsqu'un des époux est en difficulté financière et risque de se trouver en liquidation. Voir à ce sujet le mot "divorce et changement de régime matrimonial".

En effet sur un bien commun, par exemple un appartement, le liquidateur appréhende tout le prix, alors que si le même appartement est indivis il n'en perçoit que 50%.

La loi ne permet pas que ce changement de régime matrimonial puisse diminuer les droits des créanciers: les créanciers qui pouvaient saisir le bien avant le changement de régime matrimonial continuent à pouvoir le saisir malgré ce changement.


Sequestre

Voir aussi comptes avec affecation spéciale

Au visa de l'article R622-19 du code de commerce les procédures de distribution qui n'ont pas produit d'effet attributif au profit des créanciers avant le jugement d'ouverture de la procédure collective sont interrompues, "les fonds sont remis au mandataire judiciaire, le cas échéant par le séquestre qui par cette remise est libéré à l'égard des parties."

Ce texte de la procédure de sauvegarde est applicable au redressement judiciaire (article R631-20) et à la liquidation judiciaire (article R641-24)

La situation doit être expliquée: il s'agit de règler le sort d'une vente en cours au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective du vendeur : sauf effet attributif aux créanciers avant le jugement, le prix est remis au liquidateur du vendeur, qui l'affectera aux créanciers suivant les règles de la procédure collective.

Par exemple Cass com 17 septembre 2013 n°12-15281

Cette solution est l'inverse de celle qui était antérieurement retenue, au terme de la quelle la mission du séquestre, de détenir et répartir le prix pour le compte de l'acheteur, n'était pas altérée par la procédure collective du vendeur, le liquidateur n'ayant vocation qu'à recevoir le solde après paiement par le séquestre des créanciers inscrits Cass com 7 janvier 2003 n°00-11820  Cass com 25 février 2004 n°00-16070 Cass com 3 mai 2006 n°04-18662

A l'inverse si c'est l'acheteur qui fait l'objet d'une procédure collective, c'est le paiement du prix qui va déterminer son sort: si le prix est payé mais pas encore libéré (par exemple sur un compte affecté ou entre les mains d'un tiers convenu) il devra être libéré entre les mains du vendeur nonobstant la procédure collective de l'acheteur. Si par contre l'acheteur ne s'est pas encore libéré du prix, le vendeur a simplement une créance à faire valoir

Par exemple les sommes versées sur le compte d'un séquestre pour garantie l'obligation du débiteur par la suite faisant l'objet d'une procédure collective doivent être libérées au profit du créancier malgré la procédure collective du débiteur, dès lors que les conditions de fixation du montant sont réunies (par exemple séquestre en CARPA) Cass com 12 juillet 2017 n°16-10897 "la consignation des sommes ordonnée judiciairement à titre de garantie emportait affectation spéciale et droit de préférence en application de l'article 2350 du code civil"


Seuils en procédure collective

Mode de calcul des seuils

Lorsque les textes du code de commerce ne précisent pas le mode de calcul des seuils s'effectif, ces seuils sont calculés en application des règles sociales et plus 1 particulièrement de l'article R 130-1 du code de la sécurité sociale

Voir décret 2020-100 et 2020-101 du 7 février 2020

Tribunal de commerce spécialisé et double désignation des mandataires de justice

(double désignation article L621-4-1 du code de commerce) 

      Tribunal de commerce spécialisé Double désignation Cumul TCS et double désignation
  Critère 1 Effectif ≥ 250    
  Chiffre d'affaires ≥ 20 M€    
           
  Critère 2 Chiffre d'affaires ≥ 40 M€    
           
La société qui détient les autres relève du TCS (et, après renvoi, les sociétés détenues par elle même hors critère si leur procédure collective est antérieurement  ouverte par le Tribunal de commerce) Critère 3 Nombre de sociétés liées (pas nécessairement en procédure collective) ≥ 2   ≥ 3 mais en procédure collective
Effectif total ≥ 250   ≥ 250
Chiffre d'affaires total ≥ 20 M€   ≥ 20 M€
         
Critère 4 Nombre de sociétés liées (pas nécessairement en procédure collective) ≥ 2    
Chiffre d'affaires total ≥ 40 M€    
           
Toutes les sociétés concernées  Critère 5 Nombre de sociétés liées en procédure collective   ≥ 3 ≥ 3
Chiffre d'affaires de l'une   > 20 M€ ≥ 40 M€
           
  Critère 6 Nombre d'établissements   ≥ 3 ≥ 3
  Chiffre d'affaires   > 20 M€ ≥ 40 M€

Avis de l'AGS sur la désignation des mandataires judiciaires

Au delà de 50 salariés

Constitution des comités de créanciers

Entreprises dont la comptabilité est certifiée par un commissaire aux comptes ou établie par un expert comptable, et qui dépassent l'un des seuils suivants: 150 salariés (à la date de la demande d'ouverture de la procédure) ou chiffre d'affaires supérieur à 20 millions d'euros HT (apprécié à la date de clôture du dernier exercice) (détermination suivant les règles de l'article R621-11) .

Désignation d'un administrateur judiciaire à l'ouverture et en en cas de poursuite d'activité autorisée en liquidation judiciaire

Au delà de 20 salariés et de 3.000.000 € de chiffre d'affaires (L621-4)

Ouverture d'un compte spécifique à la Caisse des Dépôts

Le débiteur rempli l'un des deux critères

- soit 250 salariés employés par le débiteur à la date de la demande d'ouverture de la procédure ; 

- soit 20 millions d'euros de chiffre d'affaires, défini conformément aux dispositions du cinquième alinéa de l'article D. 123-200 du code de commerce, apprécié à la date de clôture du dernier exercice comptable)

Liquidation judiciaire simplifiée (article D641-10 L641-2 et L644-5)

Seuil d'ouverture de la liquidation judiciaire simplifiée ou de passage à cette procédure :

Pour les procédures ouvertes à compter de 23 novembre 2019 (article 2 du décret) la liquidation judiciaire simplifiée est applicable aux entreprises qui n'ont pas d'actif immobilier, dont le chiffre d'affaires hors taxes est inférieur ou égal à 750 000 € et dont le nombre de salariés est inférieur ou égal à 5.

Clôture de la liquidation judiciaire simplifiée

"le tribunal prononce la clôture de la liquidation judiciaire au plus tard dans le délai de six mois à compter de la décision ayant ordonné ou décidé l'application de la procédure simplifiée, le débiteur entendu ou dûment appelé. Ce délai est porté à un an lorsque le nombre des salariés du débiteur ainsi que son chiffre d'affaires hors taxes sont supérieurs à des seuils fixés par décret." (l644-5) et le seuil en question est fixé par l'article D641-10 Les seuils prévus par l'article L. 644-5 sont fixés pour le chiffre d'affaires hors taxes à 300 000 € et pour le nombre de salariés à 1. »


SFA

Abréviation de Sauvegarde financière accélérée: voir ce mot


Siège social

Quelques points de la définition

Généralités

Siège social et procédures collectives

Le siège social détermine la compétence territoriale, mais avec des conséquences en cas de déplacement du siège social dans les 6 mois qui précèdent

L'adresse à laquelle les actes doivent être notifiés et les difficultés qui en résultent

Généralités

C'est l"adresse" de la personne morale.

Sauf exception, c'est le siège social qui va déterminer la compétence territoriale du Tribunal (voir le mot "compétence du Tribunal").

C'est également à cette adresse que les actes de procédure destinés à la personne morale doivent être délivrés ( par exemple Cass Civ 2ème 19.02.2015 n°13-28140)

Siège social et procédures collectives:

Le siège social détermine la compétence du tribunal de la procédure collective, mais à certaines conditions: un délai de 6 mois et sous réserve de renvoi décidé par le président du tribunal saisi

Pour éviter qu'une entreprise soit tentée de déplacer son siège social pour "choisir" le tribunal qui connaîtra de sa procédure collective, la loi prévoit que le déplacement du siège social n'est pris en considération qu'au bout d'un délai de 6 mois : pendant les 6 premiers mois suivant le déplacement, c'est le tribunal de l'ancien siège social qui reste compétent (article R600-1 du code de commerce, d'ailleurs également applicable à "l'adresse" de "l'entreprise" -notion assez mal définie - d'un débiteur personne physique). Le texte précise que le délai court à compter de la publicité du déplacement du siège social.

A titre exceptionnel et si "les intérets en présence" le justifient, l'affaire peut être renvoyée devant une autre juridiction. Les articles L662-2 et  R662-7 du code de commerce organise ce renvoi, avec intervention du président de la juridiction saisie, lequel transmet le dossier par ordonnance motivée au premier Président de la Cour d'appel si la juridiction de renvoi est dans le ressort de la Cour ou au Premier président de la Cour de Cassation s'il est dans le ressort d'une autre Cour d'appel

L'adresse du siège social reste celle à laquelle les actes doivent être délivrés: solutions évolutives suivant les textes applicables.

Jusqu'à l'ordonnance de 2014, le prononcé du jugement de liquidation judiciaire avait pour effet que la société était en dissolution au sens du droit des sociétés, mais pour autant, jusqu'à l'ordonnance de 2010, et tant que le siège social n'était pas déplacé et faute d'assemblée générale restait donc situé à une adresse à laquelle la société n'était par hypothèse plus. Pour autant c'est à cette adresse que les actes de procédure devaient être délivrés.

L'ordonnance de 2010  est venue prendre en considération le fait qu'en liquidation judiciaire, l'adresse correspondant au siège social est en principe abandonnée en suite de la résiliation du bail, alors que les associés ne sont pas en mesure de financer le déplacement du siège social au domicile de l'un d'eux, l'article L641-9 II alinéa 2 du code de commerce a donc été modifié pour disposer qu'à compter de la liquidation judiciaire, le siège social est réputé fixé au domicile du dirigeant: ainsi le texte a mis au terme aux errements précédents par lesquels les actes de procédure, pour être délivrés valablement, devaient être délivrés à l'adresse du siège social, à laquelle il était notoire que la personne morale n'était plus.

Mais malheureusement l'ordonnance de 2014 qui a modifié les règles d'application de l'article 1844-7-7 du code civil (dissolution désormais à compter de la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif uniquement), a supprimé dans l'article L641-9 du code de commerce la disposition qui prévoyait que « le siège social est réputé fixé au domicile du représentant légal de l'entreprise ou du mandataire désigné ». On pouvait craindre qu'à nouveau les actes de procédures, que ce soit ceux des mandataires de justice ou du tribunal soient valablement adressés à une adresse notoirement obsolète.

Heureusement la suite réglementaire de l'ordonnance de 2014, à savoir le décret du 30.06.2014 a rectifié cette trop rapide suppression, et l'article R662-1 du code de commerce qui en découle dispose: "4° Les notifications et lettres adressées au débiteur, personne morale de droit privé, peuvent l'être au domicile de son représentant légal ou du mandataire ad hoc désigné conformément au II de l'article L641-9." . Ce texte n'est pas "efficace" que le précédent, puisqu'il pose une faculté et pas une obligation, ce qui laisse la place à des conduites non codifiées, au coup par coup.


Signature électronique

La signature électronique est notamment réglementée par le décret 2017-1416 du 28 Septembre 2017 pris en application de l'article 1367 du code civil qui en donne la définition.


Signification

Généralités

C'est l'acte d'huissier par lequel un acte de procédure (assignation, décision de justice) est portée à la connaissance d'une partie.

Fait courir les délais, notamment de recours ((voir aussi le mot notification notamment pour les mentions obligatoires)

En pratique l'huissier délivre un exemplaire à la partie destinataire et en retourne un au demandeur. En cas de discordance entre les deux exemplaires, le destinataire de la signification est en droit de se prévaloir de son exemplaire Cass civ 2ème  6 Décembre 2018 n°17-26852

Dans le cas où le destinataire de la notification, les accords internationaux prévoient une signification dite à Parquet étranger, c'est à dire que l'huissier transmet l'acte à l'autorité compétente dans le pays du destinataire, qui se charge de le signifier. C'est, dans ce cas, la remise au destinataire, et pas la remis à l'autorité compétente, qui fait courir le délai (ce qui est une évidence) Cass civ 2ème 1er octobre 2020 n°19-14746

En principe un jugement doit être notifié dans le délai de deux ans à défaut de quoi une partie qui a comparu n'est plus recevable à exercer des recours (article 528-1 du CPC). Les jugements par défaut ou réputés contradictoires au seul motif qu'ils sont susceptibles d'appel doivent être signifiés dans les 6 mois à défaut de quoi ils sont non avenus (article 478 du CPC).

Signification et procédures collectives, détail des mentions voir voies de recours

Le principe est la notification par le greffe, par des exceptions existent : en matière de faillite personnelle et interdiction de gérer où le jugement est signifié (R663-3) et évidemment si la notification échoue.

Il y a débat sur l'action en comblement, certains auteurs considérant que le jugement doit être signifié, ce qui ne semble pas reposer sur un texte (et la notification pourrait donc être valide)

Voir également Signification mentions obligatoires et conséquences et siège social

Voir également le mot notification pour l'adresse à laquelle les actes doivent être signifiés

 


Signification et notification mentions obligatoires et conséquences

Voir notification mentions obligatoires


SNC

Généralités

Dans la plupart des cas, la société est un écran étanche entre les créanciers de la société et les associés. Cependant, le sort des associés dépend de la forme sociale:

Dans les SNC (sociétés en nom collectif) les associés sont solidairement et indéfiniment responsables du passif social et peuvent donc être actionnés en paiement par les créanciers de la société. Une simple mise en demeure préalable adressée à la société suffit à la recevabilité de l'action (L221-1 du code de commerce)

SNC et procédures collectives

La procédure collective de la société ne concerne évidemment pas les associés directement, et ils ne sont pas eux mêmes en procédure collective.

La loi de 1985 avait prévu un effet automatique de la procédure collective de la SNC, et les associés faisait automatiquement l'objet eux mêmes d'une procédure collective, qui devrait être prononcée par la juridiction en charge de la procédure collective de la SNC (par exemple Cass com 8 septembre 2021 n°20-10588)

Cet effet automatique a maintenant disparu du droit positif,

Les associés des SNC étant commerçants, ils sont passibles de la procédure collective (alors même que la loi a modifié les critères d'elligibilité aux procédures collectives et qu'il s'agit maintenant de "personnes exerçant une activité commerciale" et non plus de "commerçant", et que les associés des SNC n'exerçent pas, littéralement, d'activité commerciale. C'est en tout état ce qui a été jugé par la Cour de Cassation - Civ 2ème 5 décembre 2013 n°11-28092), mais encore faut-il qu'ils soient en état de cessation des paiements

La jurisprudence ne reconnait pas qualité pour agir au liquidateur de la société, qui représente pourtant les créanciers, ni en paiement du passif de la SNC, ni en ouverture d'une procédure collective, ni pour déclarer au passif de l'associé en procédure collective le montant de celui de la SNC. Chaque créancier de la SNC est donc libre d'agir individuellement s'il le veut. Concrètement les créanciers de la société peuvent, s'ils le souhaitent, assigner les associés en paiement de leur créance.

Paiement par les associés du passif social

La créance que l'associé qui a payé le passif social peut faire valoir au passif de la liquidation judiciaire de la société découle de son engagement social et pas de la date du paiement : c'est donc une créance antérieure au jugement d'ouverture de la procédure de liquidation de la société Cass com 20 mars 2019 n°15-26171


Société (et procédure collective)

Généralités et assujettissement des sociétés aux procédures collectives

Les sociétés (sociétés commerciales comme par exemple les SA, SARL, EURL .. et les sociétés civiles comme par exemple les SCI) , et plus généralement les personnes morales de droit privé, c'est à dire ne relevant pas du droit public, sont passibles le cas échéant de procédure collective ( voir ce mot, et voir également "compétence")

Sort et responsabilité des associés

Voir le mot associés responsabilité

Sort de la personne morale en procédure collective

Pour l’application de l’article 1844-7-7 du code civil c’est la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation qui emporte dissolution de la société et plus la liquidation judiciaire (article 100 de l’ordonnance du 12 mars 2014), ce qui a mis un terme à bien des difficultés de représentation de la société pendant la durée de la liquidation et de caractère irréversible de la dissolution dans les cas où la liquidationn pouvait finalement être clôturée pour extinction du passif.

Voir également les mots "dissolution" et "liquidation amiable" qui expliquent de manière plus détaillée les conséquences de la liquidation judiciaire pour la société.

Différentes sociétés

Société civile immobilière Voir SCI

Société en nom collectif Voir SNC


Société cotée en bourse en procédure collective

La procédure collective en elle même, d'une société cotée en bourse, n'a pas de particularité majeure.

Cependant :

- EURONEXT (principale place boursière de la zone Euro) peut déplacer le titre de la société concernée par la procédure collective dans un "compartiment" spécifique aux procédures collectives, avec ou sans suspension de la négociation du titre (la suspension peut être demandée par l'émetteur). Ce classement dure jusqu'à la sortie de la procédure collective.

- toute personne qui, dans le cadre de la procédure collective, accède à des informations sensibles, devient ipso facto, initié. C'est le cas des mandataires de justice, et a minima des contrôleurs. La question peut se poser pour le juge commissaire et les représentants des salariés, les candidats qui auront accès à des informations sensibles, et à notre avis par prudence il convient de les considérer également comme des initiés et de les adjoindre à la liste tenue à cet effet.


Société radiée (et procédure collective)

Voir débiteur ayant cessé son activité


Sociétés civiles (SCI SCEA ..)

La procédure collective de la société ne concerne évidemment pas les associés directement (L'associé d'une SCI n'est pas passible des procédures collectives Cass civ 2ème 16 décembre 2021 n°20-16485) et ils ne sont pas eux mêmes en procédure collective.

Dans la plupart des cas, la société est un écran étanche entre les créanciers de la société et les associés. Cependant, le sort des associés dépend de la forme sociale:

Dans les sociétés civiles (SCI, SCEA) les associés sont responsables du passif social au prorata de leurs parts (article 1857 du code civil)

Ils peuvent être actionnés en paiement par les créanciers s'ils peuvent justifier avoir tenté vainement de poursuivre la société (ce qu'on appelle "vaines poursuites") .article 1858 du code civil

La jurisprudence assimile en principe les vaines poursuites à la liquidation judiciaire de la société: dans ce cas les créanciers de la société peuvent poursuivre le paiement de leur créance en assignant les associés de la société.

La prescription de l'action est de 5 ans (1859 du code civil), ce délai courrait à compter de la connaissance de la liquidation judiciaire Cass com 20 mars 2019 n°17-18924 à l'époque où c'était la liquidation judiciaire qui entraînait la dissolution de la SCI, et il court maintenant à compter de la clôture de la liquidation, puisque l'article 1844-7-7 du code civil a été modifié pour repousser à la clôture la dissolution.

Toutefois les vaines poursuites sont impossibles et donc inutiles si la société est dissoute et radiée du registre du commerce Cass com 21 mars 2018 n°16-18362

La Cour de Cassation admet également une action du liquidateur de la société sur la base de l'article 1832 du code civil (obligation de contribuer aux pertes sociales) voir le mot associés responsabilité

Enfin il est assez fréquent que les statuts d'une SCI ou d'une SCEA prévoient qu'en cas de procédure collective d'un associé, la société se poursuit avec les autres associés, soit à charge pour eux de se porter acquéreur des parts de l'associé exclu soit à charge pour la société de procéder à une réduction de capital (au choix des associés) , le tout sur évaluation d'expert à défaut d'accord. La perte de la qualité d'associé résulte dans ce cas non pas du jugement d'ouverture de la procédure collective mais du paiement des parts (et à minima une proposition de paiement fait courir le délai de prescription de l'action en paiement des parts) Cass com 27 juin 2018 n°16-18687


Solidarité (et clauses de solidarité)

Quelques points de la définition

En droit commun

La solidarité fiscale du dirigeant

La solidarité fiscale en cas de cession du fonds de commerce ou d'une entreprise non commerciale

Cession d'un fonds de commerce

Cession d'une entreprise non commerciale

Mode de calcul de la créance au titre de la solidarité

Délais et procédure

Solidarité et procédures collectives

Traitement des engagements de solidarité avec le débiteur 

Les clauses de solidarité

Clause par laquelle le cédant est solidaire du cessionnaire

Clause par laquelle le cessionnaire est solidaire du cédant

Solidarité fiscale

En droit commun

Des débiteurs "solidaires" d'un même créancier peuvent chacun être actionnés en paiement pour la totalité de la somme : concrètement le créancier dispose de plusieurs débiteurs pour la même dette et peut actionner celui de son choix.

Celui qui a payé pour le tout peut se retourner contre les autres pour leur part (articles 1213 et 1214 du code civil)

La solidarité peut découler d'un contrat, d'une décision de justice ou d'une disposition légale: par exemple en cas de cession de fonds de commerce la loi aménage une solidarité fiscale entre cédant et cessionnaire, de telle manière que l'administration fiscale ne perde pas son gage à l'occasion de la vente. En cas de location gérance de fonds de commerce les exploitants successifs sont solidaires de certaines dettes, pour les mêmes raisons.

La loi de finance 2016-1918 du 29 décembre 2016 a aménagé ces solidarités légales (articles 25 et 26) en en réduisant le délai à 30 jours de la cession si le cédant du fonds de commerce a effectué ses déclarations fiscales (révision de l'article 1684 du code général des impôts)

La solidarité fiscale du dirigeant

L'article L267 du livre des procédures fiscales organise la responsabilité solidaire du dirigeant avec le débiteur principal (l'entreprise) et est d'ailleurs applicable au dirigeant de fait Cass com 6 juillet 2022 n°20-14168

Voir responsabilité des dirigeants

Il s'agit de la solidarité fiscale du chef d'entreprise en cas de manquements graves et répétés dans les obligations fiscales de l'entreprise rendant impossible le recouvrement de l'impôt: cette solidarité n'est pas spécifique aux procédures collectives, qui n'y dérogent pas, et pour cause: c'est fréquemment en situation de difficulté que l'entreprise ne respecte pas ses obligations comptables et sociales: le dirigeant peut être tenu solidairement des dettes fiscales de l'entreprise (article L267 du livre des procédures fiscales), notamment en matière de TVA collectée et non reversée.

"Lorsqu'un dirigeant d'une société, d'une personne morale ou de tout autre groupement, est responsable des manoeuvres frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales qui ont rendu impossible le recouvrement des impositions et des pénalités dues par la société, la personne morale ou le groupement, ce dirigeant peut, s'il n'est pas déjà tenu au paiement des dettes sociales en application d'une autre disposition, être déclaré solidairement responsable du paiement de ces impositions et pénalités par le président du tribunal de grande instance. A cette fin, le comptable public compétent assigne le dirigeant devant le président du tribunal de grande instance du lieu du siège social. Cette disposition est applicable à toute personne exerçant en droit ou en fait, directement ou indirectement, la direction effective de la société, de la personne morale ou du groupement.

Les voies de recours qui peuvent être exercées contre la décision du président du tribunal de grande instance ne font pas obstacle à ce que le comptable prenne à leur encontre des mesures conservatoires en vue de préserver le recouvrement de la créance du Trésor."

Pour un exemple voir Cass com 14 octobre 2020 n°18-19154

Le manquement grave et répété des obligations fiscales ne nécessite pas la démonstration de la mauvaise foi ou des agissements intentionnels du dirigeant Cass com 5 juillet 2019 n°17-15598

La juridiction saisie (Tribunal judiciaire ex TGI) de l'action du Trésor Public tendant à voir le dirigeant déclaré solidaire du débiteur principal n'est pas compétente pour apprécier la validité de la déclaration de créance, qui relève de la juridiction de la procédure collective. Elle n'a pas non plus le pouvoir de moduler la condamnation et la solidarité joue pour la totalité de la créance fiscale Cass com 11 janvier 2005 n°02-16597 Cass com 11 juillet 2018 n°18-40022 Cass com 24 janvier 2019 n°18-19152. Pour la procédure voir Cass com 5 juin 2019 n°17-25809

L'engagement de l'action par le comptable public est enfermée dans un "délai satisfaisant" Cass com 4 avril 2024 n°22-21268 qui s'apprécie au regard de l'information de l'impossibilité de payer la créance fiscale, qui peut découler du jugement de liquidation (Cass com 18 décembre 2019 n°18-22132).

La mise en jeu de la responsabilité du dirigeant suppose l'impossibilité définitive de recouvrer l'impôt du par la société et n'est donc pas caractérisée si le liquidateur mène des actions susceptibles de procurer des fonds à la liquidation judiciaire Cass com 19 janvier 2022 n°19-18560 ou s'il est susceptible de verser une partie de sa créance à l'administration fiscale Cass com 6 juillet 2022 n°20-14532 

Si l'échéance de la dette fiscale se situe au jour du jugement de redressement judiciaire, date qui emporte interdiction de paiement des créances antérieures, la solidarité ne peut jouer Cass com 24 novembre 2021 n°18-25864

Enfin la solidarité peut être mise en oeuvre après la clôture de la liquidation judiciaire Cass com 19 janvier 2022 n°19-25888 mais évidemment dans la limite de la prescription de l'action en recouvrement contre la société Cass com 6 juillet 2022 n°20-14532 

La solidarité fiscale en cas de cession du fonds de commerce ou d'une entreprise non commerciale

Le mécanisme est décrit au Bulletin Officiel de l'administration fiscale BOI REC 20-30-20120912

Les dispositions du code général des impôts prévoient deux cas de responsabilité solidaire pour le paiement des impôts directs.

Il n'est pas dérogé à l'application des textes fiscaux en matière de procédure collective, et ces textes sont donc applicables aux cessions de fonds de commerce et de fonds professionnels, que ce soit dans le cadre d'une cession d'entreprise ou d'une cession de biens du débiteur en liquidation.

Dans les deux cas, le successeur du contribuable peut être rendu responsable solidairement avec son prédécesseur du paiement de l'impôt sur le revenu afférent aux bénéfices réalisés par ce dernier pendant l'année de la cession jusqu'au jour de celle-ci ainsi qu'aux bénéfices de l'année précédente lorsque, la cession étant intervenue pendant le délai normal de déclaration, ces bénéfices n'ont pas été déclarés avant la date de la cession.

-en cas de cession d’un fonds de commerce, à la charge du cessionnaire d'un fonds de commerce,

Le 1 de l'article 1684 du CGI vise les cas de cessions d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou minière,

Il résulte des dispositions du 1 de l'article 1684 du CGI que le cessionnaire d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou minière, peut être rendu responsable avec le cédant du paiement de certains impôts directs, à concurrence de la valeur du fonds et pendant un temps déterminé.

Cette responsabilité contraint, en pratique, le cessionnaire ou acquéreur à ne pas verser immédiatement au cédant ou vendeur le prix de vente du fonds de commerce afin de réserver ce paiement au Trésor si le comptable des finances publiques lui en fait la demande.

Ce régime de solidarité s'applique dans tous les cas de cession, qu'il s'agisse d'une vente forcée ou volontaire, qu'elle ait lieu à titre onéreux ou à titre gratuit. Le cessionnaire responsable peut donc être le donataire.

- en cas de cession d’un entreprise non commerciale à la charge du cessionnaire

Le 2 de l'article 1684 du code général des impôts, vise les cas de cession à titre onéreux soit d'une charge ou d'un office, soit d'une entreprise libérale ou du droit d'exercer une profession non commerciale.

Aux termes de l'alinéa 2 de l'article 1684 du CGI, en cas de cession à titre onéreux soit d'une charge ou d'un office, soit d'une entreprise ou du droit d'exercer une profession non commerciale, le successeur du contribuable peut être rendu responsable solidairement avec son prédécesseur du paiement de l'impôt sur le revenu afférent aux bénéfices réalisés par ce dernier pendant l'année de la cession jusqu'au jour de celle-ci ainsi qu'aux bénéfices de l'année précédente lorsque, la cession

Les impôts auxquels s'étend la responsabilité des cessionnaires

La solidarité établie par le 1er alinéa de l'art. 1684 CGI s'applique exclusivement aux impôts directs visés par ce texte : outre les cotisations d'impôt sur le revenu du cédant, le cessionnaire est responsable de l'impôt sur les sociétés et de la taxe d'apprentissage, restant dus par le cédant, conformément au troisième alinéa de cet article, qui étend la solidarité " dans les mêmes conditions en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés et la taxe d'apprentissage ".

L'alinéa 4 de l'article 1684 CGI prévoit quant à lui que les tiers visés aux alinéas 1 à 3 (cessionnaire, successeur ou exploitant) sont également tenus solidairement avec le contribuable cédant d'effectuer en l'acquit des impositions dont il est responsable, les versements d'acomptes provisionnels d'impôt sur le revenu, à concurrence de la fraction de ces versements calculés sur les cotisations correspondantes de l'année précédente.

Dans le cas de cession d'entreprises non commerciales (alinéa 2 de l'article 1684 du CGI), ce régime de responsabilité s'applique dans les mêmes conditions en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés.

La quotité servant de base à la responsabilité pour le paiement de l'impôt sur le revenu est déterminée forfaitairement par l'article 383 ter de l'annexe III au CGI (cf n° 210).

La période au titre de laquelle est fixé l'impôt sur le revenu dû solidairement varie en fonction du dépôt de la déclaration de l'année précédant la cession.

En effet, le cessionnaire est solidairement responsable avec le cédant du paiement de l'impôt sur le revenu établi au titre de deux périodes consécutives :

- dans tous les cas, celui afférent aux bénéfices réalisés entre le début de l'année ou de l'exercice de la cession et le jour de celle-ci ;

- il s'y ajoute éventuellement l'impôt sur le revenu de l'année précédente ou de l'exercice précédent, lorsque, la cession étant intervenue pendant le délai normal de déclaration, ces bénéfices n'ont pas été déclarés avant la date de la cession.

Autrement dit, la responsabilité s'étend aux bénéfices réalisés pendant cette période s'ils n'ont pas été déclarés par le cédant avant la date de la cession.

Le calcul servant de base à l'application de la responsabilité

Le 1er alinéa de l'article 383 bis de l'annexe III au CGI prévoit que le cessionnaire est solidairement responsable avec le cédant, dans les conditions et limites fixées par les 1, 2 et 4 de l'article 1684 du CGI du paiement de l'impôt sur le revenu afférent aux bénéfices ou revenus réalisés par celui-ci.

Dans le cas de cession soit d'une entreprise industrielle commerciale artisanale ou minière soit d'une charge ou d'un office d'une entreprise ou du droit d'exercer une profession non commerciale le cessionnaire est solidairement responsable avec le cédant, dans les conditions et limites fixées par les 1, 2 et 4 de l'article 1684 du CGI, du paiement de l'impôt sur le revenu afférent aux bénéfices ou revenus réalisés par ce dernier redevable.

En application de l'article 383 ter de l'annexe III au CGI, le montant de l'impôt dont le paiement peut être réclamé au cessionnaire est déterminé forfaitairement en appliquant à la cotisation assignée au cédant le rapport existant entre le montant des bénéfices ou revenus visés audit article et le montant du revenu global ayant servi de base à la cotisation considérée augmenté le cas échéant des charges déduites de ce revenu en application de l'article 156 du CGI.

Il est rappelé que le cessionnaire n'est responsable que jusqu'à concurrence du prix du fonds de commerce, si la cession a été faite à titre onéreux, ou de la valeur retenue pour la liquidation du droit de mutation entre vifs, si elle a lieu à titre gratuit (article 1684, alinéa 1, du CGI).

Ces dispositions sont applicables dans les mêmes conditions en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés et la taxe d'apprentissage.

Par ailleurs, lorsque le cessionnaire a déjà versé au comptable de la DGFIP une partie du prix en l'acquit d'autres impôts directs ou de taxes sur le chiffre d'affaires, il ne peut lui être réclamé, pour le paiement des impôts visés à l'article 1684, que le reliquat du prix.

En revanche, les versements faits, avant l'expiration du délai de trois mois au cédant ou aux autres créanciers de celui-ci n'ont pas pour effet de le décharger de sa responsabilité.

Le cessionnaire n'est responsable que jusqu'à concurrence du prix de cession et durant un certain délai. Les modalités d'application de l'une et l'autre responsabilité sont identiques. Il ne s'agit pas d'une solidarité parfaite.

Délais et procédure

Pour les cessions ou ventes de fonds de commerce réalisées à compter du 1er janvier 2017, le délai de solidarité fiscale est ramené à 30 jours à compter du dépôt de la déclaration fiscale, dès lors que celui-ci est bien intervenu au plus tard 60 jours après la publication de la vente, et que le cédant a respecté au dernier jour du mois qui a précédé la vente, ou la cession, ses obligations déclaratives et de paiement en matière fiscale. Cette situation est de nature à permettre au vendeur de disposer de ses fonds dans des délais plus courts. Le vendeur pourra, le cas échéant, réinvestir rapidement dans un autre projet d’entreprise.

La solidarité ne peut donc être mise en cause que pendant un délai de trois mois qui commence à courir du jour de la déclaration prévue au 1 de l'article 201 du CGI si elle est faite dans le délai imparti par ledit article, ou du dernier jour de ce délai, à défaut de déclaration.

Plus précisément:

- l'article 1684 du CGI dispose:

"En cas de cession d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou minière, qu'elle ait lieu à titre onéreux ou à titre gratuit, qu'il s'agisse d'une vente forcée ou volontaire, le cessionnaire peut être rendu responsable solidairement avec le cédant du paiement de l'impôt sur le revenu afférent aux bénéfices réalisés par ce dernier pendant l'année ou l'exercice de la cession jusqu'au jour de celle-ci, ainsi qu'aux bénéfices de l'année ou de l'exercice précédent lorsque, la cession étant intervenue dans le délai normal de déclaration, ces bénéfices n'ont pas été déclarés par le cédant avant la date de la cession.

Toutefois, le cessionnaire n'est responsable que jusqu'à concurrence du prix du fonds de commerce, si la cession a été faite à titre onéreux, ou de la valeur retenue pour la liquidation du droit de mutation entre vifs, si elle a eu lieu à titre gratuit, et il ne peut être mis en cause que pendant un délai de quatre-vingt-dix jours qui commence à courir du jour de la déclaration prévue au 1 de l'article 201 si elle est faite dans le délai imparti par ledit paragraphe, ou du dernier jour de ce délai, à défaut de déclaration.

Lorsqu'il s'agit de la vente ou de la cession de fonds de commerce, le délai mentionné au deuxième alinéa commence à courir le jour du dépôt de la déclaration mentionnée aux 3 et 3 bis de l'article 201. Ce délai est ramené à trente jours lorsque les conditions suivantes sont réunies :

a) L'obligation mentionnée au deuxième alinéa du 1 de l'article 201 a été respectée ;

b) Le cédant a déposé la déclaration mentionnée aux 3 et 3 bis de l'article 201 dans le délai prévu au même article 201 ;

c) Le cédant respecte, au dernier jour du mois qui précède la vente ou la cession du fonds, ses obligations déclaratives et de paiement en matière fiscales.

A défaut, le délai est fixé à quatre-vingt-dix jours et commence à courir à compter de l'expiration du délai imparti pour déposer la déclaration de résultat."

C'est l'article 201 qui fixe le délai imparti pour déposer la déclaration, qui viendra donc s'ajouter au délai de 90 jours en cas de défaut de déclaration (comme c'est souvent le cas en liquidation judiciaire faute de documentation comptable à jour et de possibilité de rémunérer un comptable)

- l'article 201 du CGI dispose à ce sujet:

au 1: Les contribuables doivent, dans un délai de quarante-cinq jours déterminé comme il est indiqué ci-après, aviser l'administration de la cession ou de la cessation et lui faire connaître la date à laquelle elle a été ou sera effective, ainsi que, s'il y a lieu, les nom, prénoms, et adresse du cessionnaire.

Le délai de quarante-cinq jours commence à courir :

-lorsqu'il s'agit de la vente ou de la cession d'un fonds de commerce, du jour où la vente ou la cession a été publiée dans un journal d'annonces légales, conformément aux prescriptions de l'article L. 141-12 du code de commerce ;

-lorsqu'il s'agit de la vente ou de la cession d'autres entreprises, du jour où l'acquéreur ou le cessionnaire a pris effectivement la direction des exploitations ;

-lorsqu'il s'agit de la cessation d'entreprises, du jour de la fermeture définitive des établissements.

au 3 Les contribuables assujettis à un régime réel d'imposition sont tenus de faire parvenir à l'administration, dans un délai de soixante jours déterminé comme indiqué au 1, la déclaration de leur bénéfice réel accompagnée d'un résumé de leur compte de résultat.

Si les déclarations ne sont pas faites, ce qui est fréquent en liquidation judiciaire, le délai de solidarité est donc de 90 jours + 60 jours (contribuable au régime du réel) ou 90 jours + 45 jours (autres contribuables), mais ce délai court à compter de l'insertion prévue à l'article L141-12 du code de commerce, ce texte précisant qu'il n'y a pas lieu à insertion en cas de cession d'entreprise (mais il y a bien lieu en cas de cession des biens du débiteur). Le seul moyen de résoudre cette mauvaise coordination entre le droit fiscal et le droit des procédures collectives, en cas de cession d'entreprise, est manifestement de procéder à une insertion qui précisera que s'agissant d'une cession d'entreprise il n'y a pas lieu à opposition ni surenchère.

Le risque de solidarité peut, si les parties en conviennent, conduire à ne pas libérer le prix immédiatement entre les mains du vendeur, tant que les délais ne sont pas expirés, ce qui l'incitera d'ailleurs à établir au plus vite les déclarations nécessaires

Il semble possible et sous la responsabilité du rédacteur de l’acte, s'il souhaite éviter un séquestre, de remettre le prix de cession au liquidateur du vendeur, nonobstant toute opposition, y compris celle du Trésor ou toute voie d’exécution de quelque créancier  que ce soit. (l'article R662-14 du code de commerce permet, si le prix est consigné à la Caisse des Dépôts, qu'il soit transféré au liquidateur qui assume alors les mêmes obligations que l'éventuel séquestre puisque les droits sur le prix sont transférés avec celui-ci: bien souvent les liquidateurs préfèrent attendre que les délais soient écoulés).

Dans ce cas le liquidateur doit accepter expressément de conserver le prix durant le délai, à charge pour lui d'assumer les conséquences de la solidarité fiscale. A défaut l'acquéreur n'est pas déchargé de la solidarité et le liquidateur peut disposer des sommes.

En tout état ces clauses (séquestre ou conservation du prix) sont évidemment dans l'intérêt de l'acquéreur, lequel à défaut est débiteur sans délai du prix de cession, tout en étant exposé au risque de solidarité fiscale. 

En droit commun, s'il advient que la solidarité fiscale est actionnée, l'acquéreur sera fondé à invoquer la compensation avec sa dette au titre du prix de cession.

En procédure collective, il n'existe pas de dérogation et la solidarité fiscale s'applique, même si en réalité d'une part elle est peu cohérente car il est probable que le débiteur cédant puisse assumer l'impôt, et d'autre part elle n'est pas pratiquée par l'administration fiscale.

Pour autant le texte a vocation à s'appliquer  (JO Assemblée Nationale 30 Juillet 1990 n°28435 page 3628)

Dans les procédures collectives, certains considèrent que le séquestre est inefficace car en tout état l'acquéreur est débiteur du prix et ne pourra invoquer la compensation avec la créance qu'il tient sur le vendeur du chef de l'invocation de la solidarité fiscale, faute de connexité.

Ceci étant, conventionnellement le séquestre sécurise l'acquéreur, et on voit mal un liquidateur actionner en paiement du prix un acquéreur qui aura payé une somme équivalente au titre de la solidarité fiscale, en paiement d'une dette a priori postérieure. En tout état le liquidateur peut parfaitement accepter une désignation de séquestre, surtout si l'ordonnance du juge commissaire l'envisage.

En droit des procédures collectives

Il n'est pas dérogé au droit commun en matière de solidarité fiscale (voir ci dessus)

Deux aspects peuvent exister:

le traitement dans le passif des engagements des débiteurs solidaires avec le débiteur en procédure collective: il est identique à celui des cautions (voir ce mot)

Les clauses de solidarité cédant / cessionnaire

Deux types de clause : le cédant reste solidaire du cessionnaire / le cessionnaire est solidaire du cédant

le sort des clauses contractuelles ou obligations par lesquelles en cas de cession de contrat le cédant est solidaire du cessionnaire : fréquent dans le bail Clause inapplicable

Il est par exemple fréquent que dans un bail soit insérée une clause par laquelle en cas de cession du bail le cédant reste solidaire du cessionnaire dans le règlement de l'intégralité des sommes dues au bailleur. Le but est, en droit commun, que le bailleur soit sécurisé dans la fait que malgré la cession du bail ses loyers seront payés par l'un ou l'autre des preneurs (ancien ou nouveau), ce qui en outre impose peut-être au cédant de bien choisir son cessionnaire. 

Ces clauses présentent un inconvénient majeur dans le cas de cession d'un contrat dont le preneur est en procédure collective, puisque cela expose concrètement le cédant c'est à dire la procédure collective à payer au bailleur l'intégralité des loyers dus par son successeur s’il est défaillant: ainsi en liquidation judiciaire le liquidateur ne pourrait pas répartir les fonds dont il dispose, et devrait conserver les sommes nécessaires à assumer ses obligations.

Pour ces raisons les textes écartent, dans les baux, l 'application de ces clauses de solidarité par lesquelles le cédant est garant des obligations du cessionnaire (articles L622-15 pour la sauvegarde, L631-14 pour le redressement judiciaire et L641-12 pour la liquidation judiciaire). L'inapplicabilité de la clause bénéficie au cessionnaire retenu dans le cadre de la procédure collective, mais n'est pas reportée sur le "sous cessionnaire" si par la suite le bail est à nouveau cédé (Cass com 15 novembre 2017 n°16-19131)

le sort des clauses contractuelles par lesquelles le cessionnaire est solidaire du cédant (dite clause de solidarité inversée): clauses applicables en procédure collective dans tous les processus de cession mais évincées pour les cessions d'entreprises à compter du 23 mai 2019

Il s'agit ici très exactement de la clause inverse de la précédente, assez rare et la lettre des textes cités ci dessus ne l'écartait  pas jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 22 mai 2019

Par le jeu de cette clause, le cessionnaire s'expose à assumer ses propres obligations, mais dès lors que le contrat lui est cédé à ses clauses et conditions, il est également tenu des obligations non exécutées par son cédant: ainsi par exemple le cessionnaire d'un fonds de commerce assume les loyers inhérents à sa période d'occupation, mais également les loyers antérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective du cédant, ou de la période d'observation, qui font pourtant l'objet d'un arrêt des poursuites du chef du cédant et qui sont dans le passif.

Cette obligation, en sus du prix "facial" permet au bailleur de bénéficier d'un paiement préférentiel, avec des fonds qui concrètement devraient être affectés à l'ensemble des créanciers - puisqu''en pratique le prix de cession "facial" est diminué d'autant dans l'offre de cession.

Ce type de clause est admis en liquidation en cas de cession d'actif du débiteur (Cass com 27 septembre 2011 n°10-23539) même si elle n'est pas reproduite dans l'ordonnance du juge commissaire autorisant la cession. Elle l'était semble-t-il également en cession d'entreprise (Versailles 12 mars 2015 n°14-02599 publiée au Dalloz 30.07.2015 n°1620).

Les candidats à la reprise d'un actif qui comprend un bail ont donc un intérêt tout particulier à être très vigilants sur le contenu du bail, car ils peuvent se trouver tenus d'obligations non prévues expressément dans leur offre.

La loi du 22 mai 2019 est venue modifier l'article L642-7 du code de commerce applicable aux cessions d'entreprise (et pour les procédures ouvertes postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi, soit le 23 mai 2019) et pour l'avenir dans ce type de cession ces clauses sont écartées

La solidarité fiscale.

Il n'est pas dérogé au droit commun et la solidarité fiscale relève du juge compétent au regard du dirigeant Cass com 13 janvier 2021 n°19-14749

La solidarité fiscale n'est pas un obstacle à ce que le dirigeant soit également poursuivi en comblement de passif pour un montant qui inclue la créance fiscale (et d'ailleurs le produit de l'action en comblement est réparti au marc le franc) Cass com 5 septembre 2018 n°17-13626 Cass com 13 juin 2018 n°17-13165 cass com 9 décembre 1997 n°96-12292

Il en découle que le dirigeant peut à la fois être condamné au titre de l'insuffisance d'actif pour un montant qui comprend le passif fiscal (mais la somme étant répartie au marc le franc ne sera pas intégralement affectée aux créances fiscales) et au titre de la solidarité fiscale pour le même montant. Il y a donc un intérêt pour le dirigeant à entrer en négociation avec l'administration fiscale si les deux actions sont engagées, pour transiger sur le paiement d'une somme avant que l'action en responsabilité aboutisse, et obtenir une renonciation partielle à la créance déclarée. 

On peut d'ailleurs relever que la condamnation du dirigeant par la juridiction pénale n'est pas dépendant de la déclaration de créance du Trésor Cass crim 6 novembre 1997 n°96-85304


Solidarité fiscale

Voir solidarité


Sortie de la procédure par paiement du passif ( et notamment sauvegarde ou redressement judiciaire) en période d'observation

Les différents processus de sortie de la procédure par règlement du passif

La clôture pour extinction du passif de la liquidation judiciaire

Si la liquidation judiciaire peut conduire au règlement intégral du passif, cela n'est pas pour autant la situation majoritaire, et la plupart des liquidation sont clôturées pour insuffisance d'actif. 

Le processus de clôture de la liquidation par extinction du passif est évidemment prévu par les textes.

Le règlement du passif par l'exécution du plan

Le sort des créances non déclarées est différent de celui qui leur est réservé dans la clôture pour extinction du passif de la liquidation judiciaire: en cas de respect des engagements du débiteur dans le cadre d'un plan de sauvegarde ou de redressement (mais il ne s'agit pas ici stricto sensu de clôture pour extinction de passif) la loi prévoit que la créance non déclarée reste inopposable au débiteur même après l'exécution du plan (L622-26 alinéa 2 pour la sauvegarde et L631-14 pour le redressement judiciaire).

La "sortie de procédure" en cours de période d'observation

Voir la fin des difficultés en période d'observation de sauvegarde et la clôture du redressement judiciaire par extinction du passif


Sous-traitance

Voir Cass civ 3ème 18 mai 2017 n°16-10719 pour l'emprise de l'action du sous traitant et la subrogation de la caution


Soutien abusif et responsabilité dans l'octroi de crêdit

Quelques points de la définition

Généralité

Action en soutien abusif et procédures collectives

Les règles de compétence

La répartition du produit de l'action

L'article L650-1 du code de commerce ne protège pas le banquier de l'action de la caution

Généralité

Situation dans laquelle un tiers quel qu'il soit (c'est généralement une banque, un établissement financier ou un partenaire privilégié) a accordé des soutiens, par des prêts ou tout autre facilité (par exemple le fait de ne pas recouvrer des sommes dues) dans des conditions telles que si ils n'avaient pas existé, l'état de cessation des paiements du bénéficiaire aurait été révélée.

Ces soutiens sont dits abusifs, en raison du fait qu'ils n'auraient pas du être accordés sur leur dispensateur avait été prudent (par exemple Cass com 27 mars 2012 n°10-20077), et peuvent être sanctionnés s'ils ont causé un préjudice aux créanciers : en effet si les soutiens n'avaient pas été accordés, les créanciers, ou au moins certains d'entre eux, n'aurait pas contracté avec l'entreprise qui aurait par hypothèse cessé son activité. Ils ne se trouveraient donc pas créanciers.

Action en soutien abusif et procédures collectives

L'ouverture d'une procédure collective révèle l'état de cessation des paiements, et le caractère abusif de ces soutiens (qui doit être démontré au regard de l'attitude d'un préteur normalement diligent Cass com 29 juin 2022 n°21-10715)

Les dispensateurs de soutiens abusifs peuvent être ainsi jugés responsables du préjudice qu'ils ont causé aux créanciers dont la créance est apparue postérieurement au moment où, sans ces soutiens, l'état de cessation des paiements aurait été révélé. Leur responsabilité est à hauteur de l' "augmentation de l'insuffisance d'actif" c'est à dire l'aggravation de la situation depuis les soutiens (voir par exemple Cass com 22 Janvier 2020 n°18-20362 )

Les actions menées par les mandataires de justice dans l'intérêt des créanciers, notamment contre les banques, ont parfois donné lieu à des condamnations massives.

Pour cette raison, tout au moins c'est notre explication, le loobing bancaire a obtenu en 2008 le vote d'un texte qui est devenu l'article L650-1 du code de commerce, qui rend extrêmement difficile les actions en responsabilité pour soutien abusif à la fois à l'initiative du liquidateur (ou du mandataire judiciaire, représentant les créanciers) mais également de tiers victimes directes des agissements de la banque, comme par exemple le co-emprunteur ou la caution (Cass com 17 septembre 2013 n°12-21871) puisque le texte ne distingue pas.

Le texte dispose en effet, de manière très restrictive : "les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci."

Il sera précisé que si la juridiction soulève d'office l'application du texte, elle doit inviter les parties à s'en expliquer Cass com 9 septembre 2020 n°18-11246

(sur la notion d'immixtion voir Cass com 21 novembre 2018 n°17-21025 et sur la notion de fraude (écartée en l'espèce) Cass com 8 janvier 2020 n°18-21452

Le texte est donc relativement protecteur du dispensateur de crédit, y compris pour le crédit d'acquisition de l'entreprise, c'est à dire le crédit initial qui a été le support de la création de l'entreprise (Cass com 3 novembre 2015 n°14-10274) et 14-18433 ) ou pour un crédit de restructuration censé ne pas augmenter l'endettement et ne pas tromper les tiers ... alors précisément qu'il s'agit d'un refinancement causé par les difficultés (Cass com 9 mai 2018 n°17-10965)

Voir également sur la notion de fraude, non retenue malgré d'évidentes manoeuvres de la banque Cass com 17 janvier 2024 n°22-18090. qui a jugé "Constitue un acte frauduleux, au sens de ce texte, celui réalisé en utilisant des moyens déloyaux destinés à surprendre un consentement, à obtenir un avantage matériel ou moral indu, ou réalisé avec l'intention d'échapper à l'application d'une loi impérative ou prohibitive".

Le texte (article L650-1 du code de commerce) comporte cependant une faille qui ne nous semble pas avoir été totalement exploitée. A priori en effet, à la lettre du texte, ne peuvent être poursuivis, sauf dans des cas extrêmes d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur, de fraude ou de prise de garantie disproportionnée, que les créanciers.

La question peut donc se poser de savoir si un partenaire qui a accordé un soutien, mais qui n'est pas créancier, par exemple parce qu'il a été intégralement remboursé avant le jugement d'ouverture (le prêt ou le crédit bail mobilier ou immobilier est arrivé à échéance et intégralement payé), peut ou pas être poursuivi.

La tendance ultra protectrice pour les établissements financiers devait l'emporter, même si la lettre du texte ne l'induit absolument pas : la Cour de Cassation a donc pris le parti d'indiquer "l'article L. 650-1 du code de commerce limitant la mise en oeuvre de la responsabilité du créancier à raison des concours qu'il a consentis, sans distinguer selon que ce créancier a déclaré ou non une créance au passif du débiteur mis en procédure collective, c'est exactement que la cour d'appel a retenu que la généralité des termes de ce texte ne permettait pas d'exclure du bénéfice de son application un créancier qui ne le serait plus au jour de l'ouverture de la procédure collective du bénéficiaire des concours " Cass com 19 septembre 2018 n°17-12596

Autrement dit une banque qui n'est pas créancière ne peut pas plus être poursuivie qu'une qui l'est, au prétendu motif que le texte ne distingue pas, alors que le texte indique expressément "le créancier" !!

La notion de concours s'entend restrictivement, et notamment une garantie financière n'est pas un concours Cass com 24 mai 2018 n°17-10005 et Cass com 24 mai 2018 n°16-26387 . Enfin c'est l'octroi du soutien qui peut engager la responsabilité et pas son interruption Cass com 23 septembre 2020 n° 19-12542  et Cass com 23 septembre 2020 n°18-23221 sa diminution ou le retard à l'allouer Cass com 6 mars 2024 n°22-23647

En tout état, si l'action est menée, elle n'est pas une action sur laquelle la procédure collective exerce un influence, de telle manière que ce n'est pas le tribunal de la procédure collective qui est compétent, mais celui qui aurait été compétent, en l'absence de procédure collective, dans le cadre d'une action en responsabilité de droit commun (Cass com 12 juillet 2016 n°14-29429)

Enfin il a été jugé que le texte n'est pas applicable à l'action menée par la caution qui reproche à la banque de ne pas avoir respecté ses obligations d'information et de mise en garde (et pour l'appréciation desquelles d'ailleurs le caractère abusif ou pas du prêt est indifférent) Cass com 12 juillet 2017 n°16-10793

De même une banque qui modifie les conditions d'un prêt de consolidation même au mépris d'un accord de conciliation ne commet pas de fraude Cass com 13 décembre 2017 n°16-21498

A l'inverse un fournisseur qui accorde des facilités de paiement qui relèvent du prêt, dans des conditions qui dépassent les possibilités de remboursement du débiteur, est coupable de soutien abusif Cass com 10 janvier 2018 n°16-10824

Enfin il convient de préciser que les aides publiques ne sont pas régies par l'article L650-1 du code de commerce, et peuvent engager la responsabilité de l'Etat  "si cette aide, qui n'est pas régie par les dispositions de l'article L 650-1 du code du commerce relative à la responsabilité des créanciers soumis aux règles commerciales, a été accordée en méconnaissance des textes applicables ou qu'il est manifeste, qu'à la date de son octroi, cette aide était insusceptible de permettre la réalisation d'un objectif d'intérêt général ou que son montant était sans rapport avec la poursuite de cet objectif. Saisi d'une demande indemnitaire sur le fondement d'une aide illégale accordée à une entreprise, il appartient au juge d'apprécier si le préjudice allégué présente un caractère certain et s'il existe un lien de causalité direct entre la faute de l'administration et le préjudice allégué par les requérants." CE 27 novembre 2020 n°417165

Règles de compétence

Voir le mot compétence

Répartition du produit de l'action

A la différence de l'action en comblement de passif pour laquelle, le produit de l'action en comblement est affecté à tous les créanciers égalitairement ( L651-2 du code de commerce qui évoque tous les créanciers et pas seulement les créanciers après paiement des créances privilégiées) sans égard pour les créances privilégiées et est la véritable répartition au marc le franc, le produit de l'action en soutien abusif est réparti comme les autres sommes figurant à l'actif de la liquidation judiciaire, suivant la règle posée par l'article L643-8 du code de commerce : c'est donc une répartition au marc le franc après paiement des créances privilégiées.

C'est une autre différence avec l'action en comblement : le banquier condamné pour soutien abusif, certes ne pourra pas compenser sa condamnation avec sa créance, mais participera aux répartitions effectuées avec les sommes qu'il a lui même versées, alors que le dirigeant condamné en comblement de passif, s'il est par ailleurs créancier, ne participe pas aux répartitions (L651-2).

En effet la répartition prévue pour l'action en comblement est expressément dérogatoire avec la répartition "de droit commun" prévue en liquidation, qui consiste à répartir au marc le franc aux créanciers chirographaires après paiement des frais de justice et des créanciers privilégiés : c'est la répartition "de droit commun, c'est à dire dans le respect des privilèges, qui s'applique aux dommages et intérêts versés par une banque dans le cadre d'une action en soutien abusif (ou d'une responsabilité pour banqueroute Cass com 11 juin 2014 n°13-12658)

Voir Cass Com 6 décembre 2011 n°10.26739 qui l'admet implicitement pour une action en soutien abusif

La relative immunité accordée au banquier vis à vis de la procédure collective ne le protège pas d'une action en responsabilité d'un caution

Cass com 20 juin 2018 n°16-27693


Stock

Voir le mot "actif corporel". Voir également "la liquidation judiciaire".

Le stock est la production de produits finis ou les produits prêts à vendre ou à poser figurant dans l'entreprise. La nature du stock dépend donc de l'activité :par exemple stock de fenêtres pour un menuisier, stock d'appartements pour un promoteur.

Comptablement le stock fait partie de l'actif circulant, et figure donc à l'actif du bilan en "bas de bilan".

En liquidation judiciaire le stock a vocation à être réalisé (vendu) dans les formes de la vente des actifs mobiliers, c'est à dire soit de gré à gré si des propositions se présentent, soit aux enchères publiques organisées par un commissaire priseur à défaut d'offre.


Subrogation

C'est le fait de venir à la place.

Subrogation dans les droits sur une créance:

Voir la caution

La subrogation suppose le paiement par un tiers, qui bénéficie des droits qu'avait le créancier antérieurement au paiement Cass com 23 mars 2022 n°20-18317 . Dans la chronologie la caution ne bénéficie pas du titre obtenu par le créancier après la subrogation Cass civ 1ère 13 avril 2023 n°22-16060

Le cas particulier de la subrogation dans les créances salariales

Il arrive que pour permettre le maintien de l'activité alors que l'entreprise est déjà en difficulté, le chef d'entreprise assume personnellement le paiement des salaires, que l'entreprise ne peut effectuer.

Il n'y a pas débat sur le fait que, une fois que la procédure collective est ouverte, il ne bénéficiera pas de l'AGS, qui est strictement réservé aux salariés.

Pour autant, celui qui a payé une créance salariale est subrogé dans les droits du salarié, et bénéficie des privilèges attachés à la créance, que ce soit le privilège ou éventuellement le superprivilège (par exemple Cass com 6 juil 1993 n°91-14269)  

Subrogation dans une saisie immobilière

C'est le fait de poursuivre une saisie commencée par un autre.

La saisie immobilière qui était en cours au jour du jugement de redressement judiciaire est interrompue par le seul effet du jugement.

La loi permet au liquidateur d'être subrogé dans les droits du créanciers poursuivant pour mener à bien la saisie et profiter ainsi les actes déjà effectués. (le terme de subrogation est ici impropre puisque le liquidateur n'a pas "payé" le créancier). Voir le mot SAISIE IMMOBILIERE.

La subrogation dans la clause de réserve de propriété

Voir Clause de réserve de propriété


Subsides et rémunération du débiteur

Le débiteur ou le dirigeant n'est évidemment pas traité comme un salarié de l'entreprise.

Pour autant il est évidemment nécessaire de mettre en place des modalités financières lui permettant d'assurer un train de vie décent durant la procédure collective.

En sauvegarde

En sauvegarde, le texte n'organise pas de modalité particulière de fixation de la rémunération du dirigeant, ce qui est une faveur faite au dirigeant par rapport au redressement judiciaire

En redressement judiciaire

En redressement judiciaire, la poursuite de l'activité rend nécessaire le maintien en fonction du dirigeant ou du chef d'entreprise, et bien entendu il doit recevoir une rémunération pour maintenir une vie personnelle et familiale décente.

Jusqu'au 23 mai 2019 (date d'entée en vigueur de la loi du 22 mai 2019) le juge commissaire pouvait fixer cette rémunération, qui prendra en considération d'une part les besoins du bénéficiaire et d'autre part les nécessaires efforts qu'il doit consentir (ce qui est d'autant plus légitime qu'il en demande aux créanciers).

C'est l'article L631-11 du code de commerce qui organisait ce processus, ainsi que la possibilité pour le juge commissaire, en l'absence de rémunération, d'allouer des subsides au débiteur ou à sa famille. La procédure était organisée par l'article R631-15 (audience du juge commissaire et décision spécialement motivée)

En conséquence de la loi du 22 mai 2019, le texte est modifié ( applicable aux procédures en cours) et désormais par principe la rémunération du dirigeant ou débiteur est maintenue, sauf décision contraire du juge commissaire saisi par l'administrateur judiciaire, le mandataire judiciaire ou le ministère public. 

En liquidation judiciaire

En liquidation judiciaire, a priori l'activité n'est pas maintenue.

Pour autant humainement il n'est pas toujours possible de laisser du jour au lendemain le dirigeant ou le débiteur sans possibilité financière d'organiser sa vie personnelle.

Pour cette raison, dans certaines conditions le juge commissaire peut allouer des subsides au débiteur ou à sa famille, par prélèvement sur les sommes dont dispose le liquidateur (L641-11 du code de commerce qui renvoi à l'article L631-11). Ces subsides permettent au débiteur, durant la procédure de liquidation judiciaire, de financer les actes qui échappent au dessaisissement (voir ce mot) et en particulier sa vie personnelle (loyer, alimentation, entretien et éducation des enfants ...).

La question de savoir si les subsides sont nécessairement matérialisés par une somme d'argent est discutée. Le texte prévoit que les subsides sont prélevés sur les "actifs" de la liquidation et pas uniquement sur les fonds disponibles, de sorte qu'il ne devrait pas être impossible d'attribuer à titre de subsides un véhicule ou un actif nécessaire au débiteur pour sa vie personnelle et familiale. Cette solution est en tout état approuvée par certains auteurs (mais écartée par d'autres sans arguments de fond), et retenue par certaines juridictions. La Cour de Cassation ne semble pas s'être prononcée, et il s'agit en tout état d'actifs et/ou de sommes modestes qui ne justifient généralement pas des contentieux.

En pratique ces subsides sont parfois alloués en contrepartie d'une aide particulière du bénéficiaire pour mener à bien les opérations de liquidation (recouvrement ...) , ce qui n'est absolument pas une condition.

Les subsides sont imposables à l'impôt sur le revenu (CE 18 mars 2005 n°260353) mais ayant un caractère alimentaire sont insaisissables.

La loi du 22 mai 2019 est venue modifier l'article L641-11 pour permettre au juge commissaire de fixer la rémunération du débiteur ou du dirigeant

Le texte (et notamment R641-36) ne précise pas la procédure de saisine du juge commissaire, qui est, à l'évidence une requête. Là encore, faute de précisions, il faut admettre que le juge commissaire peut être saisi par le liquidateur, et, nonobstant le dessaisissement, par le débiteur lui même dès lors qu'il s'agit à notre avis d'un droit propre qui échappe au dessaisissement.


Subsidiarité

Voir principe de subsidiarité


Substitution de garantie

La substitution de garantie en période d'observation ou en phase d'exécution du plan

Généralités

Les textes organisent la substitution des garanties qui pourraient compliquer le déroulement de la procédure, en grevant les actifs du débiteur ou leur prix (ce qui permet de penser que les garanties personnelles comme les cautions ne sont pas concernées par la substitution, l'objectif étant alors différent)

Le gage, l'hypothèque ou le nantissement peut porter sur un actif stratégique ou qu'il est nécessaire de réaliser : par exemple un gage qui porte sur un produit périssable. En tout état la trésorerie de l'entreprise peut nécessiter de recueuillir le produit de la vente du bien, ce qui évidemment ne peut se faire s'il a vocation à être affecté au créancier gagiste ou bénéficiaire de la garantie.

La possibilité de substitution et la procédure

Pour cette raison l'article L622-8  (texte de la sauvegarde, article L631-14 pour le redressement judiciaire) en période d'observation prévoit que "Le débiteur peut proposer aux créanciers, la substitution aux garanties qu'ils détiennent de garanties équivalentes. En l'absence d'accord, le juge-commissaire peut ordonner cette substitution. Le recours contre cette ordonnance est porté devant la cour d'appel" et l'article R622-8 organise la procédure correspondante: requête au juge commissaire, audience avec convocation du débiteur et des mandataires de justice, radiation et nouvelle inscription des sûretés sur injonction du juge commissaire, frais à la charge du débiteur. Les auteurs s'accordent sur le fait que cette substitution n'a de raison d'exister qu'en cas de vente du bien initialement gagé. La décision peut faire l'objet d'un recours et n'est pas exécutoire de plein droit (R661-1)

Le créancier bénéficiaire de la garantie, qui n'a pas vocation (sauf provision) à recevoir le prix immédiatement, n'est finalement pas lésé sur l'instant (voir la vente de bien grevé en période d'observation)

L'équivalence des garantie s'apprécie à la date de la décision Cass com 20 octobre 2021 n°20-20810

En phase d'exécution du plan l'article L626-22 pose des règles identiques à la substitution de garantie en période d'observation et c'est l'article R626-35 qui organise la procédure (qui relève du Tribunal puisque le juge commissaire n'est par hypothèse plus en fonction, à charge d'appel du débiteur en cas de refus et du créancier en cas d'accord, sans manifestement d'effet suspensif, la décision étant exécutoire sans doute par oubli du législateur, à la différence de la décision similaire rendue par le juge commissaire en période d'observation, cette exécution provisoire étant très problématique compte tenu de ses effet - radiation de la garantie substituée et inscription de la nouvelle)

Le domaine de la substitution

Le texte évoque "un privilège spécial, un gage, un nantissement ou une hypothèque" mais plus précisément le domaine de la substitution de garantie ne peut raisonnablement pas inclure un bien faisant l'objet d'un droit de rétention: le droit de rétention fait obstacle à la possibilité de substitution de garantie Cass com 4 juillet 2000 n°98-11803 et d'ailleurs l'article L642-12 du code de commerce indique expressément que "Les dispositions du présent article n'affectent pas le droit de rétention acquis par un créancier sur des biens compris dans la cession" : autrement dit la cession du bien gagé ne peut priver le créancier de son droit.

La disposition d'un bien faisant l'objet d'un droit de rétention peut donc de régler avec le mécanisme du retrait contre paiement (voir droit de rétention)

Il existe dans cette matière, comme en matière de vente d'un bien grevé de sûreté ou de retrait contre paiement, une alternative: ou le bien est soumis à un droit de rétention (qui ne découle pas du seul article 2286 du code civil) et il ne peut faire l'objet que d'un retrait contre paiement, ou il est soumis à un droit de rétention fictif et/ou qui découle d'un texte spécifique et il relève du régime de la vente des biens grevés et le cas échéant de la possibilité de substitution de garantie.


Successions (et liquidation judiciaire)

Les successions dans lesquelles vient le débiteur durant sa procédure collective

Jusqu'à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 12 mars 2014, les successions n'étaient pas traitées de manière particulière dans le cadre d'une procédure collective, et particulièrement d'une liquidation judiciaire de l'héritier.

Ainsi, si la succession était reçue durant la liquidation judiciaire, elle faisait partie du patrimoine appréhendé par le liquidateur, et si au contraire la succession était reçue après la clôture de la procédure elle ne pouvait  ni justifier une reprise de la liquidation judiciaire - qui ne peut être causée que par la présence de biens oubliés - ni faire l'objet de poursuites des créanciers de l'époque de la liquidation judiciaire.

Simplement, la jurisprudence avait réglé les modalités de décision  d'accepter ou pas la succession en cours de liquidation: l'option successorale appartient au débiteur seul nonobstant le dessaisissement, mais le liquidateur peut, pour le compte des créanciers, contester cette option, notamment pour éviter que l'héritier préfère refuser la succession pour que les créanciers n'en bénéficient pas.

Il en est de même de l'action en réduction de donation partage qui échappe au dessaisissement Cass com 2 mars 2022 n°20-20173

L’ordonnance du 12 mars 2014 applicable aux procédures ouvertes à compter du 1er juillet 2014 a modifié les textes applicables : les biens reçus et les droits acquis par le débiteur dans le cadre d'une succession (ce qui a priori exclue les assurances vie qui par nature sont exclues des successions cf L132-12 du code des assurances ) ouverte postérieurement à l’ouverture de la liquidation judiciaire ne sont pas réalisés par le liquidateur sauf accord du débiteur (et le partage d’indivision ne peut pas être provoqué) et il ne peut,, par voie de conséquence, provoquer le partage de l'indivision qui résulterait d'une telle succession. 

Cette disposition, initialement hébergée au sein de l'article L641-9 IV du code de commerce et été déplacée au sein de l'article L642-22 du code de commerce à l'occasion de la loi 2022-172 du 14 février 2022.

"Le liquidateur ne peut, sauf accord du débiteur, réaliser les biens ou droits acquis au titre d'une succession ouverte après l'ouverture ou le prononcé de la liquidation judiciaire, ni provoquer le partage de l'indivision pouvant en résulter".

Etant précisé que les modalités d'accord du débiteur ne sont pas précisées et que si le liquidateur est autorisé à vendre un bien reçu par succession "La contrepartie de la valeur de ces biens ou droits s'y substitue dans le patrimoine dont ils sont issus" (L642-22), ce qui fait dire à certains auteurs que le prix ne constitue pas un actif de la liquidation. Nous pensons plutôt qu'en cas d'entrepreneur individuel il s'agit de cibler celui des patrimoines qui recevra le prix. 

En tout état en conséquence de cette impossibilité de principe pour le liquidateur de réaliser les biens reçus par succession, les actions portant sur ces biens sont possibles post clôture (L643-11), le texte décrivant ainsi l’exception à l’absence de reprise des poursuites des créanciers :« 1° Pour les actions portant sur des biens acquis au titre d'une succession ouverte pendant la procédure de liquidation judiciaire »

Cette disposition d’opportunité, introduite par l'ordonnance de 2014, a semble‐t‐il été conçue pour accélérer les clôtures des liquidations judiciaires au motif que le traitement des successions donne généralement lieu à des contentieux et des processus relativement longs. C’est pourtant marginal, même s’il est exact que la jurisprudence considère généralement que l’option successorale échappe au dessaisissement et relève du débiteur seul, mais peut être contestée par le liquidateur …, le débiteur pouvant préférer refuser la succession pour qu’elle échappe à la liquidation.

Cette nouvelle disposition est juridiquement singulière au moins pour trois raisons :

‐ Postérieurement à la clôture de la procédure les créanciers du débiteur pourront agir sur les biens issus de la succession, sans organisation collective et on voit mal l’avantage qu’y trouvera le débiteur par rapport aux effets de la liquidation. A la réflexion il est même probable que le débiteur préfère donner son accord pour que le liquidateur appréhende les biens, sauf évidemment s’il espère que les créanciers ne reprendront pas les poursuites, tant il est vrai que l’acceptation d’une succession n’est pas un acte public, sauf si elle comporte des immeubles.

Mais surtout, au‐delà de l’inutilité probable du dispositif :

‐ La disposition a pour effet de scinder le patrimoine du débiteur, en contradiction avec toutes les règles d’unité du patrimoine : le patrimoine dans son ensemble est sous l’emprise de la liquidation judiciaire, à l’exception des biens successoraux.

‐ Sans que le texte le précise il peut également y avoir cantonnement du dessaisissement.

Concrètement le liquidateur ès qualité ne peut réaliser les biens successoraux, mais on ignore s’il en perçoit les fruits (loyers par exemple), ni s’il en a la responsabilité et les risques (assurance), ni encore s’il en a la charge (impôts fonciers pour un immeuble par exemple) ni même d’ailleurs si les créances postérieures sur ces biens bénéficieront du statut de dettes postérieures utiles à la procédure.

A priori la logique serait que les biens successoraux, que le liquidateur ne peut réaliser, échappent au dessaisissement. En effet il serait quand même paradoxal que le liquidateur en ait la charge alors que les créanciers n'en bénéficient pas ... mais dans ce cas il faudrait pour assumer cette charge que le débiteur dispose de subsides prélevés, avec l’accord du juge commissaire, sur les fonds de la liquidation pour les assumer, ce qui n’est pas dans l’esprit des subsides.

Pour autant le texte n'en dit rien et n'exclue des prérogatives du liquidateur que la réalisation : ces biens pourraient donc être néanmoins sous la responsabilité du liquidateur (mais qui en percevrait les fruits), avec le reproche potentiel des créanciers qui critiqueront l’utilisation des fonds disponibles pour leur entretien … mais à défaut le reproche inverse de ne pas avoir préservé leur gage saisissable post clôture.

Le patrimoine serait alors scindé à l’actif, mais le passif ne le serait pas.

Ainsi non seulement le texte n’amène pas de solution à ces questions, mais on peut même considérer à la réflexion qu’il amène bien des complexités, sans bénéfice réel et peut‐être même avec un coût supplémentaire : la réalisation des biens sera différée après la clôture, et les biens devront d’une manière ou d’une autre être préservés durant la procédure, avec les frais que cela impliquer sans autre utilité que l’écoulement du temps pour satisfaire au texte.

Pire encore : le texte ouvre peut‐être une possibilité pour le débiteur de réaliser les biens pendant la procédure, peut‐être sans le moindre contrôle (on voit mal sur quel fondement le juge commissaire serait saisi), et on ignore dans ce cas ce qu’il advient du prix, qui pourrait parfaitement par subrogation échapper totalement aux créanciers durant la procédure et avoir été dilapidé après sans critique possible.

Il est vrai que des questions identiques peuvent se poser pour l’immeuble insaisissable, et que les textes sont également muet, sauf pour le remploi qui, dans ce cas, y est évoqué.

Enfin le nouveau dispositif pourrait entraîner de nouveaux débats en jurisprudence : jusqu’à l’entrée en vigueur du texte, l’option successorale relevait du débiteur seul et échappait au dessaisissement, mais le liquidateur pouvait la contester (Cass Com 3 mai 2006 n° 04.10‐115 article 788 du code civil devenu 779). On peut se demander si désormais le liquidateur aura ce pouvoir puisqu’il ne peut agir sur les biens correspondants … mais d’un autre côté dès lors que les droits « directs » des créanciers sont différés jusqu’à la clôture, on peut penser que le liquidateur a qualité pour les préserver.

Ainsi la nouvelle mesure est d’une utilité marginale, et apporte de nouvelles complications.

On peut en outre relever que l'imprécision du texte et de la formulation "Pour les actions portant sur des biens acquis au titre d'une succession ouverte pendant la procédure de liquidation judiciaire »  prévue à l'article L643-11 pour la reprise des actions après clôture de la liquidation est elle même très imprécise et peut avoir plusieurs interprétations (voir le mot clôture) avec des conséquences très différentes

Pour plus détail sur cette mesure, qui n'a en réalité pas que des avantages pour le débiteur, voir le PDF de commentaire de l'ordonnance du 12 mars 2014 en page d'accueil

La liquidation judiciaire créancière d'une succession

Le droit commun (article 792 du code civil) prévoit:" Les créanciers de la succession déclarent leurs créances en notifiant leur titre au domicile élu de la succession. Ils sont payés dans les conditions prévues à l'article 796. Les créances dont le montant n'est pas encore définitivement fixé sont déclarées à titre provisionnel sur la base d'une évaluation.

Faute de déclaration dans un délai de quinze mois à compter de la publicité prévue à l'article 788, les créances non assorties de sûretés sur les biens de la succession sont éteintes à l'égard de celle-ci. Cette disposition bénéficie également aux cautions et coobligés, ainsi qu'aux personnes ayant consenti une garantie autonome portant sur la créance ainsi éteinte."

L'obligation de déclarer créance s'impose au liquidateur de la société en liquidation judiciaire, créancière d'un débiteur entretemps décédé Cass civ 1ère 22 Mars 2017 n°15-25545

Le dessaisissement et l'option successorale

Voir le mot dessaisissement

L'exemple des succession démontre à quel point la question de la portée du dessaisissement est complexe, et réglée au coup par coup: la Cour de Cassation considère que le débiteur peut opter seul sur une succession ... mais que le liquidateur peut contester ce choix ( surtout s'il s'agit de refuser la succession) notamment par l'action paulienne en cas de renonciation frauduleuse, ce qui a pour effet de rendre la renonciation inopposable à la liquidation Cass Civ 1ère 22 janvier 2020 n°19-12492

Par contre c'est le liquidateur qui intervient à l'acte de partage (Cass com 13 janvier 2015 n°13-12590)

La cour de cassation a en outre précisé (Cass com 21 novembre 2018 n°17-12761 et 17-17559) que si au jour du jugement d'ouverture de la procédure une instance est en cours relativement aux opérations de comptes, liquidation et partage d'une succession dans laquelle le débiteur a des droits:

- le débiteur dispose d'un droit propre de défendre seul

- cette instance n'est pas une instance en cours au sens du droit des procédures collectives

- l'éventuelle soulte due par le débiteur n'a pas à être déclarée au passif

- le liquidateur doit cependant être mis en cause dès lors que l'instance a une incidence patrimoniale et que le jugement obtenu le cas échéant sans son intervention peut être régularisé s'il devient partie en cause d'appel


Suicide

Numéro vert APESA 34 

0805 65 50 50

Nous avons suivi une formation dispensée par l'association APESA, qui nous permet d'être sentinelle et le cas échéant de détecter la souffrance du chef d'entreprise.


Suite

Voir "droit de suite"


Supension de l'exécution provisoire

Voir exécution provisoire


Superprivilège (des salaires)

Littéralement privilège qui vient avant les autres

Le superprivilège garantit les créances salariales de tout premier rang, pour la période des 60 derniers jours de salaires, les congés payés (Cass soc 10 mars 2010 n°09-41170), les préavis et a été institué pour protéger les salariés. (l143-10 du code du travail  remplacé par L3253-2 précisé à L3253-3 et L3253-4 et L7313-8 pour les représentants.

Le superprivilège est plafonné (sans pouvoir être inférieur à deux fois le plafond retenu pour le calcul des cotisations de sécurité sociale cf L143-10 remplacé par L3253-2)

Ce privilège n'existe pas en droit commun et n'existe qu'en procédure collective.

L’AGS, une fois qu’elle a payé les salariés, devient créanciers « superprivilégié » à la place des salariés.

Le superprivilège est un des rares privilège général qui porte sur l'ensemble du patrimoine du débiteur, qu'il soit mobilier ou immobilier, la plupart des privilèges généraux étant des privilèges mobiliers : dans tous les cas ce privilège passe en tout premier rang ( il existe des exceptions fondées selon la règle selon laquelle un privilège utile à l'autre le prime).

En cas de plan de sauvegarde ou de redressement, les créances superprivilégiées ne peuvent faire l'objet de remise ou délai comme c'est le cas des autres créances dans le plan (voir la touche INFORMATIONS JURIDIQUES rubrique TOUT CE QUE VOUS VOULEZ SAVOIR à la ligne LE PLAN DE REMBOURSEMENT DES CREANCIERS). En conséquence l'AGS, subrogée dans les droits des salariés doit être remboursée dès l'adoption du plan.


Super privilège de la copropriété (et privilège)

En droit commun

Lors de la vente d'un actif immobilier, la copropriété est amenée à faire valoir ses droits pour le paiement des charges de copropriété non encore payées par le vendeur.

C'est l'article 2374 du code civil qui règle le rang de ces créances, en concrétisation de 19-1 de la loi 65-557 du 10 juillet 1965

La copropriété dispose d'un privilège immobilier portant sur les charges dues, provisions du budget prévisionnel ou hors budget prévisionnel de l’année en cours ou des années précédentes, et les provisions pour travaux d’amélioration à venir (travaux futurs déjà votés dont l'appel de fonds est échu), les dommages intérêts, les frais de justice, le fonds de travaux, les travaux de restauration de l'article L313-4-2 du code de l'urbanisme.

Les sommes dues doivent être ventilées:

- l'année en cours et les deux années précédentes (par rapport à la vente de l'immeuble) sont payées avant toute autre créance, y compris privilège du prêteur ou hypothécaire, et c'est la raison pour laquelle on évoque parfois le "super privilège" de la copropriété  (voir le mot privilège), ce qui reste assez relatif puisque ce privilège passe après le superprivilège des salaires et le privilège des salaires.

- jusqu'à la cinquième année (en réalité deux années de plus que le "super privilège"), la copropriété bénéficie d'un privilège de rang inférieur, en concours avec les créanciers inscrits au titre du privilège du prêteur ou du vendeur.

Concrètement ces sommes sont donc payées avant le créancier hypothécaire.

- au delà la copropriété bénéficie du privilège du bailleur (article 19 de la loi 65-557 du 10 juillet 1965)

Le privilège de la copropriété est le seul privilège immobilier "occulte" c'est à dire qui n'est pas inscrit au fichier immobilier, ce qui est logique puisqu'il n'existe que pour autant que l'immeuble soit vendu, et ne peut donc, par hypothèse, être invoqué avant.

La préservation du privilège suppose que, dans les 15 jours de l'avis de mutation qui lui est faite, le syndic fasse opposition par acte extrajudiciaire (article 20 de la loi 65-557 du 10 juillet 1965).

L'opposition contient élection de domicile, et à peine de nullité le montant et les causes de la créance, c'est à dire sa ventilation.

L'opposition doit être faite à celui qui a qualité pour répartir les fonds Cass civ 3ème 28 février 2001 n°99-15330

L'article 5-1 du décret 67.223 du 17 mars 1967 (par renvoi de l'article 4 c'est à dire ventilation des charges, travaux ... ) et à défaut de ventilation, au besoin dans les annexes de l'opposition, la créance est chirographaire cass civ 3ème 25 octobre 2006 n°05-16835

En cas de vente de plusieurs lots il doit y avoir une opposition par lot ou à tout le moins une ventilation par lot Cass civ 3ème 22 juin 2017 n°16-15195

"l'opposition devait comporter, non seulement la répartition des charges et des travaux selon le privilège ou le " super privilège " que le syndicat invoquait mais aussi le détail des sommes réclamées selon leur nature, et le lot auquel elles étaient afférentes " Cass civ 3 3 novembre 2011 n°10-20182 et "l'absence de distinction entre les quatre types de créances du syndicat prévue à l'article 5-1 du décret du 17 mars 1967, qui constitue un manquement à une condition de forme, a pour seul effet de faire perdre aux créances bénéficiant de l'article 2374 1° bis du code civil leur caractère de créances privilégiées et superprivilégiées, celles-ci ne pouvant alors valoir que comme créances hypothécaires ou chirographaires" Cass civ 3 27 novembre 2013 n°12-25824 et 12-27385

Voir également sur le fait que l'opposition doit comporter une ventilation des différents postes de créance ( Charges et travaux année en cours et deux années suivantes / charges et travaux deux années suivantes / autres créances)  Cass civ 3ème 22 juin 2017 n°16-15195

En procédure collective

Le principe

Le principe reste le même en cas de procédure collective.

Cependant l'imbrication du droit des procédures collectives avec le droit civil est assez mal combinée.

Comme déjà indiqué c'est la vente de l'immeuble qui permet au syndicat de copropriétaire de revendiquer le "super privilège" et le privilège dont il bénéficie.

Ainsi, en théorie, à partir de la date de la vente de l'immeuble, il convient de remonter dans le temps : année en cours et deux années qui précèdent sont garanties par le "super privilège", les deux années suivantes par le privilège, et les autres années sont chirographaires.

Cependant il se peut que la vente de l'immeuble intervienne très tardivement par rapport au jugement d'ouverture de la procédure collective : la question se pose alors de savoir si les créances du syndicat des copropriétaires, pour leur partie postérieure au jugement d'ouverture, bénéficient du traitement préférentiel des créances postérieures (très défavorable en l'espèce puisqu'en matière immobilière les créances postérieures passent après les créances hypothécaires) ou du super-privilège (et dans ce cas elles priment l'hypothèque.

Un avis de la Cour de Cassation (Cass 21 janvier 2002 n°01-00009) (qui n'a pas suivi l'avis du conseiller rapporteur), indique, à la question "Quel est le texte qui s'applique pour colloquer un syndicat de copropriétaires dans le cadre de la liquidation judiciaire de son débiteur :

Est-ce l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, qui intéresse les procédures collectives ? (texte de l'époque régissant les créances postérieures)

Est-ce l'article 2103.1o bis, alinéa 2, du Code civil issu de la loi du 21 juillet 1994 ? "

La réponse est la suivante :

Il résulte de la volonté du législateur qu'en cas de liquidation judiciaire seules les créances antérieures au jugement d'ouverture, garanties par des sûretés immobilières ou mobilières spéciales assorties d'un droit de rétention, sont comprises dans l'exception prévue par l'article 40, alinéa 2, de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-32.II du Code de commerce et que le paiement de celles nées postérieurement doit être effectué conformément aux dispositions de l'article L. 621-32 III.5° du Code de commerce "

Autrement dit les créances postérieures du syndicat de copropriétaires sont traitées en rang de créances postérieures (de dernier rang), et donc passent après l'hypothèque, et seules les créances antérieures peuvent prétendre passer avant. On en arrive au paradoxe que les créances antérieures sont mieux traitées que les créances postérieures.

Pour schématiser, plus la date de la vente est éloignée du jugement d'ouverture plus l'emprise du "super privilège" et du privilège se réduit, jusqu'à parfois être totalement inexistante.

En effet l'application cumulée du code civil et du droit des procédures collectives a pour conséquence qu'à partir de la date de la vente, on doit effectuer un calcul à l'envers : les créances postérieures au jugement sont à traiter en dernier rang des créances postérieures "utiles" (voir cependant ci dessous) 

Si la vente a eu lieu plus d'une année en cours et deux années après le jugement d'ouverture, le "super-privilège" ne peut être revendiqué, si la vente a eu lieu plus de l'année en cours et 4 années après le jugement d'ouverture, le privilège du syndicat ne peut être invoqué.

Si la vente a lieu à l'intérieur de l'un ou l'autre de ces deux délais, le prorata correspondant bénéficie du "super-privilège" ou du privilège du syndicat des copropriétaires.

Mais encore convient-il de préciser que ces privilèges ne sont préservés que si le syndicat des copropriétaires

- déclare créance dans le délai légal. Mais la particularité, comme déjà indiqué, est que le privilège ne se "concrétise" qu'en cas de vente Cass civ 3ème 15 février 2006  n°04-19095 de sorte qu'avant la vente, la créance est privilégiée au seul titre du privilège du bailleur (qui en pratique n'est pas revendiqué dans les déclarations de créance, seule une créance chirographaire étant généralement invoquée dans la déclaration de créance) .

Ainsi au stade de l'admission de la créance, dans le cas où la vente n'est pas réalisée, il n'est pas possible d'admettre la créance au titre du privilège de la copropriété et la créance sera donc admise à titre chirographaire (Cass civ 3ème 15 février 2006 n°04-19095)

La déclaration de créance sera valablement effectuée "au titre du super-privilège ou à défaut du privilège ou encore à titre du privilège du bailleur en fonction de la date de la vente à intervenir", mais il n'y a pas de difficulté à ce qu'elle ne soit que chirographaire, puisque c'est la vente, ou plus exactement l'opposition qui sera faite en cas de vente qui "rétablira" le caractère privilégié de la créance (voir ci après)

- forme opposition par acte d'huissier dans les 15 jours de l'avis de mutation (adressé par le notaire en cas de vente de gré à gré et par l'avocat du poursuivant en cas de vente sur saisie immobilière), dans les conditions de l'article 5-1 du décret du 17 mars 1967.

Le débat sur le caractère utile de la créance postérieure

La Cour de Cassation a jugé que la créance de la copropriété n'était pas une créance postérieure "inhérente à la liquidation judiciaire qui serait née pour assurer son bon déroulement" et n'avait donc pas à être payée en rang de créance postérieure. Cass com 14 novembre 2019 n°18-17812. Si cette jurisprudence était confirmée, les créances postérieures du syndicat des copropriétaires ne seraient plus payées en rang de créance postérieure dans le cas où l'immeuble n'est pas habité par le débiteur.

Par contre si l'immeuble est la résidence du débiteur, Il s'agit des "créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période" (article L622-17 du code de commerce) texte de la sauvegarde rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L631-14, et l'article L641-13 pour la liquidation


Surenchère

Généralités

La surenchère consiste à proposer un prix supérieur à celui qui a été arrêté dans l'opération qui en est l'objet.

Cette faculté n'est évidemment pas ouverte en toute circonstance, et évidemment a priori les parties sont libres de fixer le prix qu'elles souhaitent, même si par ailleurs un autre acheteur est susceptible d'offrir un prix supérieur.

Ainsi la faculté de proposer un prix plus élevé que celui convenu, et donc de remettre en cause la précédente opération n'est ouverte que dans deux circonstances:

- le bien a été vendu aux enchères, et un enchérisseur, c'est à dire quelqu'un qui a participé aux premières enchères, se ravise en souhaite proposer plus. Il ne s'agit que de ventes dans les formes de la saisie immobilière

- le bien vendu, qu'il s'agisse d'un immeuble ou d'un fonds de commerce, est vendu dans des conditions qui ne permettent pas de payer tous les créanciers inscrits sur ce bien: pour préserver les droits de ces créanciers et éviter une vente à un prix de complaisance ou en tout état insuffisant, il existe une faculté de surenchère.

Concrètement la surenchère se matérialise par le fait que le bien objet de la surenchère est vendu aux enchères (même si la première vente n'était pas une vente aux enchères), et que faute de meilleure enchère le surenchérisseur est adjudicataire du bien dont la vente était sur le point d'être réalisée, pour le prix envisagé majoré de la surenchère, dont le pourcentage est fixé par la loi. Contrairement à ce que le terme laisse penser, la vente initiale n'est pas toujours aux enchères, mais la vente sur surenchère l'est toujours.

Surenchère en cas de saisie immobilière: du 10ème du prix, par un enchérisseur, dans les 10 jours de l'adjudication

Dans le cadre d'une saisie immobilière, une fois les enchères terminées, un enchérisseur peut, dans un délai fixé par la loi (10 jours de l'adjudication) et par ministère d'avocat, provoquer une seconde adjudication en surenchérissant d'un dizième, c'est à dire en proposant un prix majoré de 10% par rapport au résultat de la première enchère. L'audience sur surenchères est fixée dans un délai entre 2 et 4 mois de la déclaration de surenchère. A la suite de la nouvelle adjudication, il ne peut y avoir une nouvelle surenchère.

La Cour de cassation n'exclue pas la possibilité de surenchère après réïtération de la vente (Cass civ 2ème 7 janvier 2016 n°14-26887)

La procédure de surenchère est régie par les articles R322-50 et suivants du code des procédures civiles d'exécution.

La surenchère n'est pas écartée par les textes relatifs à la liquidation judiciaire, et en cas de vente dans les formes de la saisie immobilière d'un immeuble sous l'emprise d'une liquidation judiciaire, la surenchère peut être exercée dans les conditions de droit commun.

Surenchère en cas de vente de gré à gré d'un immeuble: du 10ème du prix (et des charges), par un créancier inscrit, dans les 40 jours de la notification

Dans le cadre de la vente de gré à gré d'un immeuble, si le prix couvre le montant des inscriptions prises sur cet immeuble (hypothèques notamment), il n'y aura pas de difficulté: le prix sera affecté par le notaire au paiement des créanciers, qui donneront main levée de leurs inscriptions, de telle manière que l'acheteur dispoe d'un immeuble libre de toute inscription.

Si par contre le prix est insuffisant pour payer les créanciers inscrits (par exemple en liquidation judiciaire) , le créancier hypothécaire inscrit sur l'immeuble dspose du droit de suite attaché à son inscription, c'est à dire que tant qu'il ne sera pas intégralement payé, il pourra poursuivre le paiement de sa créance sur l'immeuble, même s'il est passé, par la vente, entre les mains d'un tiers qui n'est pas son débiteur.

Pour éviter ce droit de suite, il convient de procéder à une procédure dénommée purge (article 2480 du code civil)

Cela consiste à notifier a vente aux créanciers inscrits, qui disposent d'un délai de 40 jours à compter de la notification qui leur est faite, pour faire surenchères du dixième (en réalité du prix et des charges attachées) et demander la vente aux enchères du bien (les créanciers peuvent accorder amiablement une dispense de purge qui évite les notifications, ce qu'on appelle purge amiable)

Soit le créancier ne réagit pas, et le droit de suite est "purgé" c'est à dire que l'acheteur de l'immeuble ne sera plus inquiété dès lors qu'il aura payé le prix indiqué dans la notification, soit le créancier fait surenchère et s'expose alors à être adjudicataire pour 10% de plus que le prix qu''il a refusé (et des frais dans les conditions de droit commun applicables aux saisies immobilières)

Ce mécanisme permet d'une part d'éviter que les créanciers soient victimes d'une vente à bas prix, et d'autre part également d'éviter des demandes de ventes aux enchère fantaisistes ou malveillantes.

Surenchère en cas de vente d'un fonds de commerce: du 10ème du prix et charges, hors matériel et stock, par un créancier inscrit sur le fonds, dans les 15 jours de la notification

Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 6 aout 2015 dite loi Macron un créancier titulaire d'un nantissement sur un fonds de commerce pouvait, en cas de vente de ce fonds de commerce, former surenchère du sixième et du dixième, dans certaines conditions (la surenchère du sixième était également valable pour le créancier qui avait fait opposition)

En liquidation judiciaire cette faculté est écartée en cas de "cession d'entreprise" mais pas en cas de vente de gré à gré des biens du débiteur (voir INFORMATIONS JURIDIQUES, sous menu la cession)

La loi du 6 aout 2015 a modifié l'article L141-19 du code de commerce et supprimé la surenchère du sixième mais n'a pas touché celle du dixième découlant de l'article L143-13 du code de commerce (qui porte sur le prix du fonds non compris le matériel et le stock).

Ainsi, en cas de vente d'un fonds de commerce, le cessionnaire qui veut procéder à la purge pour ne pas s'exposer au droit de suite des créanciers inscrits, procède par voie de notification à ces créanciers, qui peuvent faire surenchère et provoquer ainsi la vente aux enchères du fonds. Ils s'exposent à être adjudicataires pour le prix initial majoré du dixième, s'il n'y a pas meilleur enchérisseur. Le délai de surenchère est de 15 jours à compter de la notification (L143-13). (les créanciers peuvent accorder amiablement une dispense de purge qui évite les notifications, ce qu'on appelle purge amiable)

Les textes précisent que le surenchérisseur doit donner une caution pour le paiement des prix et charges ou de justifier d'une solvabilité suffisante pour couvrir le prix majoré et les frais (C. com., art. L. 143-13, al. 1er). Sa demande de mise aux enchères, dénommée réquisition, doit être, à peine de déchéance, signifiée à l'acquéreur et au débiteur précédent propriétaire dans les conditions de l'article L. 143-13 du Code de commerce.

Lorsque le fonds est adjugé à une autre acheteur que le cessionnaire initial, l'adjudicataire doit rembourser à l'acheteur initial évincé les frais et "loyaux" coûts de son acte de vente, ceux des notifications, ceux d'inscription et de publicité. Cela englobe les dépenses liées à la négociation et à la rédaction de l'acte de cession initial et les dépenses de conservation de la chose au sens de l'article 1352-5 du code civil, dont certainement les loyers Cass com 25 février 2003 n°00-17601


Surendettement des particuliers (et des entrepreneurs individuels pour leur patrimoine personnel, dans certains cas)

Quelques points de la définition

Généralités

Interférence du statut de l'entrepreneur individuel

Descriptif complet par circulaire ministérielle

Débiteurs relevant du dispositif de surendettement des particuliers

Conditions tenant à l'activité du débiteur jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 15 Mai 2022: débiteur ne relevant pas des procédures collectives

Le traitement de l'entrepreneur individuel à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 15 mai 2022

Conditions tenant aux dettes:

Texte initial appréciation au stade de l'ouverture de la procédure: dettes non professionnelles

Généralités sur les dettes

Les dettes non professionnelles

Les engagements de caution d'une entreprise

Une fois la procédure ouverte, pas de distinction sur la provenance des dettes, y compris professionnelles

Texte applicable à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 14 février 2022 : toutes les dettes

Dispositif a compter du 15 mai 2022

Conditions tenant à la personnalité du débiteur: la bonne foi

Synthèse de l'éligibilité

Actes interdits

La suspension des voies d'exécution

Le passif

Le plan conventionnel de redressement

En l'absence de plan, demande de bénéfice des mesures imposées ou recommandées

Mesures imposées

Mesures recommandées

Information des parties et recours

application des mesures

durée des mesures

Rétablissement personnel en l'absence de plan ou d'échec du plan

Les différents aspects du surendettement pour le conjoint

L'incidence du caractère professionnel ou pas de la dette

Le caractère professionnelle est attaché au conjoint lui même

Généralités

La loi organise une procédure dite de surendettement des particuliers, qui est le pendant de la procédure collective de traitement des difficultés des entreprises, transposée au particulier surendetté.

Les textes applicables sont situés dans le code de la consommation et les textes visés ci dessous sont d'une part les textes en vigueur avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance 2016-301 du 14 mars 2016 (soit le 1er juillet 2016) et ceux en vigueur, après cette ordonnance qui re-numérote ou scinde divers articles

Interférence des dispositions relatives à l'entrepreneur individuel

Au visa de l'article L681.2 du code de commerce, si le Tribunal de la procédure collective ouvre une procédure pour le seul patrimoine professionnel, et si une procédure de surendettement est prononcé pour le patrimoine personnel, c'est le Tribunal de la procédure ou le juge commissaire qui fait office de juge du contentieux de la protection.

Descriptif complet circulaire ministérielle

Pour un descriptif complet du processus voir la circulaire ECOT2105604C du premier avril 2021 du ministère de l'économie

Débiteurs relevant du dispositif de surendettement des particuliers

Les conditions étaient initialement posées par l'article L711-1 du code de la consommation :Le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi.
La situation de surendettement est caractérisée par l'impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir. Le seul fait d'être propriétaire de sa résidence principale dont la valeur estimée à la date du dépôt du dossier de surendettement est égale ou supérieure au montant de l'ensemble des dettes non-professionnelles exigibles et à échoir ne fait pas obstacle à la caractérisation de la situation de surendettement.
L'impossibilité de faire face à un engagement de cautionner ou d'acquitter solidairement la dette d'un entrepreneur individuel ou d'une société caractérise également une situation de surendettement
.

Ce texte a évolué en application de la loi du 14 février 2020 (loi 2022-172) et dispose désormais (L711-1)

"Le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi.

La situation de surendettement est caractérisée par l'impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble de ses dettes, professionnelles et non professionnelles, exigibles et à échoir. Le seul fait d'être propriétaire de sa résidence principale dont la valeur estimée à la date du dépôt du dossier de surendettement est égale ou supérieure au montant de l'ensemble des dettes professionnelles et non professionnelles exigibles et à échoir ne fait pas obstacle à la caractérisation de la situation de surendettement.

L'impossibilité de faire face à un engagement de cautionner ou d'acquitter solidairement la dette d'un entrepreneur individuel ou d'une société caractérise également une situation de surendettement."

Conditions tenant à l'activité du débiteur jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 15 mai 2022: débiteur ne relevant pas des procédures collectives

L711-3 Les dispositions du présent livre ne s'appliquent pas lorsque le débiteur relève des procédures instituées par le livre VI du code de commerce.
Ces mêmes dispositions ne font pas obstacle à l'application de l'article L. 670-1 du même code.

Typiquement les débiteurs concernés sont des particuliers (salariés, retraités, sans activité) qui ont contractés trop des crédits ou de dettes dites non professionnelles par rapport à leurs facultés de remboursement (crédit à la consommation notamment) ou dont les facultés de remboursement ont évolué à la baisse (fréquemment à la suite d'un licenciement, d'un départ à la retraite, d'un divorce ...).

Il ne peut s'agir d'un débiteur qui relève par ailleurs de la procédure collective de traitement des difficultés des entreprises (pour plus de précisions voir le mot "débiteur"), c'est à dire qui exerce une activité commerciale, artisanale ou libérale.

Par exemple l'avocat peut se trouver en procédure collective (et d'ailleurs pour cette raison n'est pas éligible au surendettement Cass com 17 juin 2020 n°19-10464 ). A l'inverse le conjoint d'un commerçant en liquidation judiciaire ne pourrait être exclu du surendettement que s'il était lui même passible de la procédure collective Cass civ 2ème 4 juin 2020 n°19-14428

Dans ce cas il n'existe pas de choix: c'est la loi sur les difficultés des entreprises qui s'applique, même si les dettes sont majoritairement des dettes non professionnelles (article L333-3 du code de la consommation devenu L711-3). Il en est de même pour le dirigeant inscrit comme travailleur indépendant, qui relève des procédures collectives (Cass com 20 septembre 2017 n°15.24644 pris a contrario, l'inscription ne suffisant pas à justifier l'exercice d'une activité individuelle.

Il peut par contre s'agir du dirigeant d'un entreprise Cass civ 2ème 18 octobre 2018 n°17-26459   Cass civ 2ème 1er juillet 2021 n°20-13306 pour un gérant de SARL (qui n'est pas lui même commerçant Cass civ 2ème 13 octobre 2016 n°15-24301 Cass civ 2ème 24 mars 2022 n°20-17503 ou agriculteur Cass com 15 novembre 2016 n°14-29043) pour autant qu'il remplisse par ailleurs les autres conditions légales, exposées ci dessous (tenant aux dettes et à la bonne foi) . 

Enfin en cas d'EIRL, le fait que le patrimoine affecté relève des procédures collectives est sans influence sur le fait que le patrimoine non affecté relève du surendettement Cass civ 2ème 27 septembre 2018 n°17-22013

Le traitement de l'entrepreneur individuel à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 15 mai 2022

Voir le mot entrepreneur individuel

Schématiquement le texte instaure un éclatement du patrimoine de l'entrepreneur individuel. D'une part le patrimoine professionnel potentiellement soumis à la procédure collective, et le patrimoine personnel, lui aussi potentiellement soumis à la procédure collective.

Dans certains cas toutefois (cloisonnement absolu entre les patrimoines et difficultés inhérentes au seul patrimoine personnel, le Tribunal compétent pour statuer sur la procédure collective renvoie à la commission de surendettement, qui ne peut être saisie directement.  

Cas 1 Seul le patrimoine personnel est en difficulté : 

Le Tribunal de la procédure collective, avec l'accord du débiteur, renvoie l'affaire devant la commission de surendettement, après avoir constaté qu'il n'y a pas lieu à ouverture d'une procédure collective. L681-3

C'est évidemment une évolution par rapport au dispositif antérieur qui ne permettait pas la saisine de la commission dès lors que le débiteur relevait des procédures collectives L711-3 

L'ancien entrepreneur reste pour sa part soumis à la procédure collective dès lors que figure dans son passif une dette professionnelle L640-3 et L631-3, tenant le fait que la séparation des patrimoines prend fin par l'arrêt de l'activité.

Cas 2 Les deux patrimoines sont en difficultés mais totalement cloisonnés dans les faits 

L681-2 IV. - Par dérogation au III, lorsque la distinction des patrimoines professionnel et personnel a été strictement respectée et que le droit de gage des créanciers dont les droits sont nés à l'occasion de l'activité professionnelle de l'entrepreneur individuel ne porte pas sur le patrimoine personnel de ce dernier, le tribunal qui ouvre la procédure saisit, avec l'accord du débiteur, la commission de surendettement aux fins de traitement des dettes dont l'entrepreneur individuel est redevable sur son patrimoine personnel. Le livre VII du code de la consommation ainsi que le sixième alinéa de l'article L. 526-22 du présent code sont alors applicables. Le tribunal exerce les fonctions du juge des contentieux de la protection, qu'il peut déléguer en tout ou partie au juge-commissaire.

Le tribunal et la commission de surendettement s'informent réciproquement de l'évolution de chacune des procédures ouvertes.

Ce cas est assez obscur et devra être précisé. Certains auteurs considèrent que ce cas sera exceptionnel qui exclue évidemment la renonciation au bénéfice de séparation au profit d'un créancier, ou des imbrications importantes entre les deux patrimoines (peut être bancaire, mais cela mériterait d'être précisé).

Ce régime est également applicable si seul le patrimoine personnel est en difficulté.

Ce qui est certain est que l'accord du débiteur est nécessaire, et ce dernier peut soit demander dès le dépôt de déclaration de cessation des paiements qu'une procédure de surendettement soit également ouverte, soit exprimer son accord lors de l'audience d'ouverture de la procédure collective (R681-2) 

Enfin si seules les conditions du surendettement, le Tribunal compétent en matière de procédure collective, seul compétent pour examiner la situation, rejettera la demande de procédure collective et renverra l'affaire devant la commission de surendettement L681-3

Conditions tenant aux dettes:

Initialement : appréciation au stade des conditions d'ouverture de la procédure des dettes non professionnelles ne pouvant être remboursées, mais appréciation sans distinction au stade du traitement du passif

Généralités et notion d'impossibilité de faire face aux dettes (notion proche de l'état de cessation des paiements)

Au stade de l'appréciation des conditions d'ouverture de la procédure de surendettement, c'est le seul examen des dettes relevant de l'article L711-1 du code de la consommation qui déterminera si le débiteur est ou pas éligible au dispositif

Concrètement les dettes à prendre en considération sont les dettes non professionnelles et les engagements de caution ou les engagements d'acquitter solidairement la dette d'une entreprise ou d'une société.

Autrement dit un débiteur qui n'a que des dettes professionnelles ou que des dettes personnelles et familiales modestes ne peut bénéficier de la procédure (voir par exemple Cass civ 2ème 6 janvier 2005 n°03-04160)

Le texte précise que le fait pour le débiteur d'être propriétaire d'une résidence principale dont la valeur excède le montant des dettes ne fait pas obstacle à l'ouverture de la procédure. La notion est identique à celle de l'état de cessation des paiements, et par exemple un débiteur propriétaire de son appartement peut se trouver en situation de ne pas pouvoir payer ses dettes, l'appartement n'étant pas par hypothèse un bien dont le prix est immédiatement disponible ( un actif disponible au sens de la notion de cessation des paiements) : Cass civ 2, 19 février 2015 n°13-28236 et L711-1

Première catégorie de dettes à prendre en considération pour l'ouverture de la procédure : les dettes non professionnelles

.Le critère dette professionnelle / dette non professionnelle s'apprécie ainsi "les dettes professionnelles s'entendent des dettes nées pour les besoins ou au titre d'une activité professionnelle" Cass civ 2ème 8 avril 2004 n°03-04013 Cass civ 2ème 2 juillet 2020 n°19-15959 pour une dette de RSI

L'impôt sur le revenu n'est pas une dette professionnelle, quelle que soit la provenance des revenus Cass civ 2ème 4 novembre 2021 n°20-15008

Ces différentes constatations permettent d'ailleurs de relever qu'il existe manifestement un vide juridique dans le dispositif : les personnes non éligibles à la procédure collective, qui n'ont pas de dette "non professionnelle"  mais qui ont des dettes qualifiées de "professionnelles", exemple que des dettes de RSI ou de cotisations URSSAF, qui sont considérées comme "professionnelles" puisqu'il s'agit de la protection sociale du dirigeant d'entreprise, ne sont pas non plus éligibles à la procédure de surendettement : sauf interprétation souple de la notion de dette "non professionnelle", ce que les juridictions ne font généralement pas, ces personnes ne sont protégées par aucun dispositif tant qu'elles n'auront pas de dette "non professionnelle". (voir notamment avis Cour de Cassation 8 juillet 2016 n°16-70005). Il en est de même de la dette de condamnation du dirigeant à combler le passif : il s'agit d'une dette professionnelle Cass civ 2ème 29 septembre 2022 n°21-10989

Seconde catégorie de dettes à prendre en considération pour l'ouverture de la procédure: les engagements de caution d'une entreprise

De manière salutaire, le traitement des engagements de caution a évolué et depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 14 mars 2016 un engagement de caution est prix en considération dans les dettes éligibles au surendettement: le texte (L711-1 du code de la consommation, dernier alinéa) dispose en effet: "L'impossibilité de faire face à un engagement de cautionner ou d'acquitter solidairement la dette d'un entrepreneur individuel ou d'une société caractérise également une situation de surendettement."

Antérieurement le dirigeant qui avait donné des cautions aux créanciers de l'entreprise dont il était dirigeant, et ne relevait pas lui même du dispositif applicable aux entreprises, ou le chef d'entreprise qui ne peut payer les cotisations RSI, mais pour autant qu'il ait par ailleurs des dettes "non professionnelles" qui seules peuvent caractériser le surendettement. Cass civ 2ème 20 avril 2017 n°16-15143 pour le dirigeant caution

Désormais même si la majeure partie des dettes sont issues de cautions d'entreprises dont le débiteur est caution, il est éligible au surendettement Cass civ 2ème 6 juin 2019 n°18-16228 Cass civ 2ème 6 juin 2019 n°18-16228 Cass civ 2ème 4 juin 2020 n°19-13734

En outre, l'article L742-22 alinéa 2 (ex L332-9) du code de la consommation est venu améliorer la situation de la caution en disposant (à compter de 2014): "La clôture entraîne aussi l'effacement de la dette résultant de l'engagement que le débiteur a donné de cautionner ou d'acquitter solidairement la dette d'un entrepreneur individuel ou d'une société." Sous réserve de l'appréciation de la jurisprudence, il semble maintenant que la clôture entraîne effacement des dettes qui découlent d'une caution, même dans le cas où elle peut avoir un statut de dette "professionnelle".

Dettes à prendre en considération une fois que la procédure est ouverte: la totalité

Cependant, et tenant l'unité du patrimoine en droit français, une fois la procédure ouverte, les dettes professionnelles sont attraites au passif et font l'objet des mêmes mesures que les dettes non professionnelles. On dit souvent que les dettes professionnelles sont "réintroduites" dans la procédure (par exemple Cass Civ 2ème 15 novembre 2007 n°05-15094, Cass civ 2ème 23 octobre 2003 n°02-04113) ... mais elles ne sont pas effacées à la fin de la procédure.

La condamnation du dirigeant en comblement de passif est une dette professionnelle, qui ne peut être retenue pour l'éligibilité à la procédure, mais qui peut, une fois la procédure ouverte, être prise en considération dans les mesures prescrites (Cass civ 2ème 12 avril 2012 n°11-10228)

Voir également ci dessous dans la partie relative au conjoint.

A compter de l'entrée en vigueur de la loi du 14 février 2022

Le texte ne distingue plus les dettes, et dès lors que le débiteur remplit les conditions d'ouverture, c'est à dire ne relève pas des procédures collectives, toutes ses dettes sont concernées par la procédure

Voir les articles

L711-1 du code de la consommation 

Le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi.

La situation de surendettement est caractérisée par l'impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble de ses dettes, professionnelles et non professionnelles, exigibles et à échoir. Le seul fait d'être propriétaire de sa résidence principale dont la valeur estimée à la date du dépôt du dossier de surendettement est égale ou supérieure au montant de l'ensemble des dettes professionnelles et non professionnelles exigibles et à échoir ne fait pas obstacle à la caractérisation de la situation de surendettement.

L'impossibilité de faire face à un engagement de cautionner ou d'acquitter solidairement la dette d'un entrepreneur individuel ou d'une société caractérise également une situation de surendettement.

L711-2 Les dispositions du présent livre s'appliquent également aux débiteurs de nationalité française en situation de surendettement domiciliés hors de France et qui ont contracté des dettes professionnelles et non professionnelles auprès de créanciers établis en France.

A compter du 15 mai 2022

Voir le dispositif concernant les entrepreneurs individuels

Condition tenant à la bonne foi du débiteur:

Les particuliers surendettés, pour bénéficier de la procédure, doivent être de bonne foi

La procédure de surendettement est en effet une solution favorable pour désengager le débiteur en ménageant sa situation personnelle, et il n'est pas question qu'elle profite à un débiteur de mauvaise foi (condition qui n'existe pas en procédure collective).

La bonne foi est une notion qui s'apprécie évidemment au cas par cas, mais il ne peut s'agir d'une personne qui a massivement recouru au crédit en sachant parfaitement qu'elle ne pourrait pas rembourser. Il ne peut non plus s'agit d'un débiteur qui avait obtenu des moratoires en contrepartie de l'engagement de s'inscrire comme demandeur d'emploi et de rechercher du travail, ni d'un débiteur qui prétend avoir subi des frais importantes de déménagement alors que l'adresse qu'il indique lui même est la même que celle qu'il avait précédemment indiqué (Cass civ 2ème 7 Janvier 2016 n°15-10633) Cass civ 2ème 27 juin 2019 n°18-12681

Cass civ 2ème 12 avril 2018 n°17-10193 pour un débiteur qui a sollicité un surendettement alors qu'il en avait déjà obtenu un par le passé et n'ignorait donc pas que le recours massif au crédit à la consommation dans des conditions dépassant ses facultés le conduirait au surendettement.

Cass civ 2ème 31 janvier 2019 n°17-28440 pour un débiteur qui ne payait pas ses loyers dans l'attente du surendettement, Cass civ 2ème n°18-11229 pour un débiteur qui dissimule son patrimoine et, pour un débiteur qui multiplie les crédits sans la moindre intention de les rembourser et Cass civ 2ème 21 février 2019 n°18-11476

A priori la découverte en cours de procédure de la mauvaise foi du débiteur permet de prononcer la déchéance du bénéfice de la procédure L712-3

Synthèse de l'éligibilité à la procédure:

Les personnes éligibles peuvent saisir la commission de surendettement des particuliers dès lors qu'ils ne peuvent faire face à l'ensemble de leurs dettes non professionnelles, exigibles et à échoir (les dettes dites professionnelles ne sont pas prises en compte dans l'appréciation de ce critère, même si une fois la procédure ouverte elles seront incluses dans le passif à payer) ou  leurs engagements de caution.

La saisine de la commission de surendettement donnera lieu, en fonction de l'importance des dettes, de la composition du patrimoine et des revenus du débiteur, à orientation du dossier vers l'une des différentes solutions proposées par la loi : plan conventionnel de redressement, mesures imposées ou recommandées par la commission, rétablissement personnel avec ou sans liquidation judiciaire.

Actes interdits au débiteur

A compter de la décision d'éligibilité au dispositif de surendettement le débiteur ne peut :

- accomplir aucun acte de nature à aggraver sa situation et notamment son endettement

- souscrire de nouveaux emprunts sans l'accord du juge (juge du contentieux de la protection)

- payer une dette antérieure L722-5 sauf autorisation du juge 

- faire un acte de disposition L722-5 sauf autorisation du juge

La suspension des voies d'exécution

Dès la demande de surendettement et jusqu'à la décision, la suspension des poursuites peut être ordonnée par le juge d'instance ( devenu juge du contentieux de la protection (L721-4 du code de la consommation) ce qui a pour effet d'interrompre les délais (721-5) Le report d'une saisie immobilière en cours peut également être ordonné (L721-7)  (cependant si l'audience d'orientation seul le juge en charge de la saisie peut reporter l'audience s'il est saisi par la commission de surendettement à cette fin Cass civ 2ème 5 septembre 2019 n°18-15547)

En cas de recevabilité de la demande de surendettement, l'ouverture de la procédure a pour effet de suspendre les actions en cours et d'en interdire de nouvelles (L722-2) jusqu'à la décision finale sur le devenir de la procédure (L722-3)

Article L722-2 La recevabilité de la demande emporte suspension et interdiction des procédures d'exécution diligentées à l'encontre des biens du débiteur ainsi que des cessions de rémunération consenties par celui-ci et portant sur les dettes autres qu'alimentaires

Article L722-3 Les procédures et les cessions de rémunération sont suspendues ou interdites, selon les cas, jusqu'à l'approbation du plan conventionnel de redressement prévu à l'article L. 732-1, jusqu'à la décision imposant les mesures prévues aux articles L. 733-1, L. 733-4, L. 733-7 et L. 741-1, jusqu'au jugement prononçant un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ou jusqu'au jugement d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire.

Cette suspension et cette interdiction ne peuvent excéder deux ans.

Le sort des voies d'exécution suspendues dépendra des suites de la procédure: en cas de plan (dans ce cas si le plan est respecté la dette est échelonnée dans le temps, ce qui la prive du caractère exigible),  de clôture de la liquidation éventuellement ordonnée, le juge d'instance ordonnera (mais pas d'office, encore faut-il le saisir) main levée des voies d'exécution, sauf si les dettes qui en étaient le support permettent la reprise des poursuites dans le cadre de l'article L711-4 du code de la consommation.

Cependant la suspension et l'interdiction des procédures d'exécution ne concerne pas les mesures d'expulsion initiées par le bailleur contre son locataire, mais la commission de surendettement peut saisir le juge d'instance pour qu'il statue sur la suspension (L722-6)

Le passif

Le chiffrage du passif repose sur une étape déclarative par le débiteur, suivie d'une information des créanciers par les soins de la commission.

Il appartient alors aux créanciers de faire connaître leur éventuel désaccord, à défaut de quoi il seront admis pour le montant déclaré par le débiteur

La commission peut faire un "appel aux créanciers" qui permet le cas échéant aux créanciers non signalés par le débiteur de déclarer leur créance. Les textes sont assez flous et n'impartissent pas de délai précis pour déclarer créance ni n'organisent de véritable forclusion ou extinction de la dette.

De sorte que la créance non déclarée subsiste.  L'article L733-15 du code de la consommation prévoit que les mesures sont inopposables à ces créanciers, qui par ailleurs ne semblent pas subir l'interdiction des poursuites (L733-16). Ce passif non considéré dans la procédure n'est donc pas particulièrement favorable au créancier, qui a a minima tout intérêt à inviter la commission à faire un appel à déclarer créance dont il assumera les frais (R723-2)

A l'issue la commission dresse l'état du passif

Articles R723-1 et suivants

La vérification des créances est organisée par les articles R723-6 et suivants

Plan conventionnel de redressement

La commission recherchera les possibilités d'accord avec les créanciers sur un plan conventionnel de redressement reposant sur trois axes principaux:

- définition d'un "reste à vivre" qui sera alloué au débiteur pour sa vie de famille. Concrètement la commission va déterminer la somme qui devra rester acquise au débiteur, en fonction de ses charges de famille (nombre d'enfants ...), de ses ressources (salaires, retraite, allocations) et des ses charges financières (loyers, éducation des enfants, nourriture, abonnements et consommations EDF GDF eau, chauffage, dépenses de santé ..) pour lui permettre de vivre décemment.

- mesures patrimoniales : par exemple vente de certains biens en privilégiant la préservation du logement familial, réductions de dépenses, réduction des intérêts de certaines dettes

- règlement échelonné des créanciers.

La plan ne peux excéder 7 ans et suppose l'accord des créanciers (le délai initial de 8 ans a été ramené à 7 ans par l'article 43 de la loi 2014-344 du 17 MARS 2014 entré en vigueur le 1er Juillet 2016 - loi 2014-617 du 13 juin 2014 article 14) peut être dépassé s'il s'agit du remboursement d'un prêt d'acquisition du domicile familial dont la vente pourra ainsi être évitée.

Article L711-4 

Sauf accord du créancier, sont exclues de toute remise, de tout rééchelonnement ou effacement :

1° Les dettes alimentaires ;

2° Les réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d'une condamnation pénale ;

3° Les dettes ayant pour origine des manœuvres frauduleuses commises au préjudice des organismes de protection sociale énumérés à l'article L. 114-12 du code de la sécurité sociale ;

4° Les dettes fiscales dont les droits dus ont été sanctionnés par les majorations non rémissibles mentionnées au II de l'article 1756 du code général des impôts et les dettes dues en application de l'article 1745 du même code et de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales ;

L'origine frauduleuse de la dette est établie soit par une décision de justice, soit par une sanction prononcée par un organisme de sécurité sociale dans les conditions prévues aux articles L. 114-17 et L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale.

Les amendes prononcées dans le cadre d'une condamnation pénale sont exclues de toute remise et de tout rééchelonnement ou effacement.

Possibilité de demande de bénéfice de mesures imposées ou recommandées en cas d'absence de plan

Dans les 15 jours qui suivent la constatation de l'absence d'accord, le débiteur a une option (R733-1)

- il ne fait aucune demande: la procédure prend fin et les créanciers reprennent leurs poursuites.

- il demande à bénéficier de mesures imposées ou recommandées par la commission. La loi prévoit en effet deux types de mesures:

Mesures imposées

La commission peut imposer (articles 733-1 et suivants)

- le rééchelonnement des paiements des dettes (sur une période maximale de 7 ans),

- l'imputation des paiements en priorité sur le capital,

la réduction des taux d'intérêt,

la suspension des dettes autres qu'alimentaires (pendant 2 ans maximum).

À l'issue de ces 2 ans de suspension des dettes, la commission réexamine la situation du surendetté.

Mesures recommandées

La commission peut recommander des mesures qui doivent être validées par le juge d'instance.

Il s'agit de 2 types de mesures :

la réduction de la dette immobilière résiduelle après la vente du logement principal,

l'effacement partiel des créances, dans certaines conditions (ce qui régularise les incidents de paiement)

Processus d’information des parties et recours

Les mesures imposées comme les mesures recommandées sont notifiées par lettre recommandée avec accusé de réception aux parties (débiteur et créanciers)

Si le surendetté ou l'un des créanciers n'accepte pas ces mesures, elles peuvent être contestées devant le juge d’instance (devenu juge du contentieux de la protection), dans les 15 jours qui suivent leur notification.

Ce juge convoque le surendetté et les créanciers au moins 15 jours avant la date d'audience par lettre recommandée avec accusé de réception. Après avoir, s'il le souhaite, fait publier un appel à créanciers, vérifié la validité et le montant des dettes, le juge rend un jugement qui est susceptible d'appel.

Dans ce contexte le juge peut subordonner les mesures à la vente par le débiteur de son immeuble Cass civ 2ème 9 juin 2022 n°19-26230

Application des mesures

les mesures imposées s'appliquent immédiatement au surendetté et aux créanciers,

les mesures recommandées doivent être homologuées par le juge d'instance pour être applicables au surendetté,

la combinaison des mesures imposées et recommandées ( par exemple réduction du taux d'intéret et réduction de la dette) doit être validée par le juge.

Durée des mesures

La durée des mesures imposées ne doit excéder 7 ans.

Cependant, elle peut excéder ce délai lorsque ces mesures concernent le remboursement de prêts contractés pour l'achat de bien immobilier constituant la résidence principale et afin d'en éviter la cession.

Rétablissement personnel en cas d'absence de plan ou d'échec du plan

Voir le détail de cette procédure au mot rétablissement personnel

L'incidence du surendettement et du rétablissement personnel pour le conjoint

Les conséquences du caractère professionnel ou pas de la dette, notamment pour le conjoint caution ou co-emprunteur

La nature professionnelle ou pas d’une dette est déterminante, au moins pour deux raisons :

  • Avant 2022, une dette professionnelle ne justifiait pas l’ouverture d’un surendettement : ainsi un débiteur qui n’a que des dettes professionnelles n’est pas éligible à la procédure (mais comme indiqué ci dessus une fois la procédure ouverte, les dettes professionnelles y seront attraites)

  • Initialement la clôture du rétablissement personnel entraînait extinction des dettes (sauf exception) qui ne sont pas professionnelles : ainsi le statut professionnel ou pas d’une dette était déterminant pour l’avenir du débiteur qui sort du rétablissement personnel. Cette distinction était considérée comme critiquable, et certains appelaient de leurs vœux une intervention du législateur. En effet les dettes professionnelles du commerçant ne permettaient plus de poursuites après clôture de sa liquidation, et le traitement défavorable du particulier surendetté risquait de conduire à des inscriptions à des activités fantômes, pour bénéficier de la procédure collective plus favorable (et pour laquelle la bonne foi n'est pas un critère). La loi du 17 juin 2020 a modifié les textes, et désormais les dettes professionnelles et non professionnelles sont effacées à l'exception des dettes mentionnées aux articles L711-4 et L711-5 du code de la consommation ET DES DETTES PAYEES PAR LA CAUTION DANS UN RETABLISSEMENT SANS LIQUIDATION (article L741-2 et L742-22)

Ces questions sont particulièrement importantes pour la caution ou le coemprunteur d'un débiteur principal qui contracte un prêt pour les besoins de son activité: par exemple un conjoint commerçant emprunte pour les besoins de son commerce, et son conjoint est co-emprunteur.

Le surendettement du conjoint « in bonis » et le retour du critère non professionnel / professionnel

Après la clôture de la liquidation judiciaire du conjoint commerçant, les créanciers ne recouvrent pas leurs droits de poursuites (sauf exception) contre le débiteur, y compris sur les biens communs s’il est marié en communauté.

Pour autant, si le conjoint est caution ou co-emprunteur, il n’est donc pas à l’abri des poursuites des créanciers pendant la liquidation judiciaire (mais, comme déjà indiqué les biens communs ne peuvent être saisis de son chef), et ne l’est pas plus après la clôture de la liquidation judiciaire.

Il est donc fréquent que le conjoint qui n’était pas commerçant se trouve en situation de surendettement, en raison des cautions qu’il a données ou du fait qu’il est co-emprunteur pour des dettes professionnelles du commerçant.

La Cour de Cassation considère que la nature professionnelle ou pas d’une dette est attachée à la personne de son débiteur : ainsi en pareille situation, la dette est professionnelle pour le conjoint commerçant, et n’est pas professionnelle pour celui qui ne l’est pas et est simplement caution ou co-emprunteur (encore que l'évolution du texte permette en tout état de retenir la caution comme dette éligible au surendettement)

Pour que la dette soit professionnelle, il convient en effet qu’elle soit née pour les besoins de l’activité professionnelles du débiteur ( Cass Civ 1, 31.03.1992 n°91-04011, 91-04028 et 91-04032) et au titre de celle-ci (Cass Civ 2, 8 avril 2004 n°03-04013).

Ainsi une dette qui est professionnelle pour un des conjoints ne l’est pas nécessairement pour l’autre (Cass civ 1, 10 juillet 2002 n° 01-04136, Cass civ 2, 27 mai 2004 n°03-04064)


Sûreté

Quelques points de la définition

Généralités

Inscriptions des sûretés pour informer les tiers

Rang des sûretés entre elles

Sûretés et procédures collectives

Délais spécifiques de déclaration de créance

La mention de la sûreté dans la déclaration de créance

Le transfert de sûreté en cas de cession d'entreprise

Sort de la sureté si la créance n'est pas admise

Généralités

La sûreté est une garantie attachée à une créance, permettant de bénéficier, sur le prix  d'un bien déterminé, d'un paiement plus favorable que celui réservé aux autres créanciers.

On précise parfois le terme en employant l'expression "sûreté spéciale" pour distinguer cette catégorie de "privilège", qui sont dits "spéciaux" puisqu'ils portent sur un bien déterminé, des "privilèges généraux" qui portent sur tous les biens.

Par exemple une hypothèque est une sûreté portant sur un immeuble, permettant à son titulaire d'être payé sur le prix de vente dans de meilleures conditions que la plupart des autres créanciers ( et en tout cas que les créanciers chirographaires).

Par exemple encore un nantissement de fonds de commerce est une sûreté portant sur le fonds de commerce.

La sûreté est soit conventionnelle, c'est à dire convenue dans un contrat ( par exemple à l'occasion d'un prêt le prêteur obtient une hypothèque ou un nantissement) ou judiciaire c'est à dire qu'à l'occasion d'un contentieux, le créancier impayé obtient l'auorisation d'inscrire une hypothèque "judiciaire" ou un nantissement "judiciaire".

Inscription pour information des tiers

En principe les sûretés sont "inscrites", de telle manière qu'un tiers qui voudrait se renseigner sur la situation d'un bien ou la solvabilité réelle de son propriétaire puisse en être informé. Ce n'est pas en effet la même chose d'être propriétaire d'un immeuble lourdement hypothéqué ou d'un immeuble qui ne l'est pas.

Pour les immeubles les hypothèques sont inscrites à la conservation des hypothèques (devenu service de la publicité foncière), en marge de ce qu'on appelle la "fiche" de l'immeuble, qui mentionne notamment les références cadastrales, le propriétaire, les sûretés, et qui peut être "levée" (contre paiement) librement.

Pour les fonds de commerce, l'inscription est réalisée sur un registre spécial tenu au greffe du tribunal de commerce dont dépend le fonds.

Rang des sûretés spéciales entre elles

D'une manière générale les sûretés spéciales qui portent sur le même bien prennent rang à la date de leur inscription, c'est à dire qu'en cas de pluralité d'inscriptions, elles sont payées dans l'ordre inversement chronologique ( la plus ancienne en premier).

L'imbrication des sûretés spéciales avec les privilèges est extrêmement complexe, et dépendra de la provenance des fonds à répartir: sur le prix de vente d'un fonds de commerce par exemple certains privilèges fiscaux passeront avant la sûreté spéciale du nantissement de fonds de commerce, alors que sur le prix de vente d'un immeuble, l'hypothèque (sûreté spéciale) passe avant les privilèges fiscaux. 

Sûretés et procédures collectives

Délais de déclaration de créance aménagés

Les créanciers titulaires de sûretés spéciales, c'est à dire les créanciers inscrits, bénéficient de délais spécifique pour déclarer leur créance.

Voir également le mot "privilège" , les mots "purge", "radiation des inscriptions" et "main levée".

Déclaration de créance mentionnant la sûreté : à défaut créance chirographaire

L'article L622-25 du code de commerce impose au créancier de mentionner la sûreté dont il bénéficie, et cette indication doit intervenir à l'intérieur du délai de déclaration de créance Cass com 1er février 2000 n°97-17772 Cass com 20 juin 2000 n°97-16732 (cette limitation à l'intérieur du délai de déclaration de créance est peut-être à pondérer depuis que les textes ont été modifiés, dans le cas où le débiteur avait signalé l'existence de la créance, ce qui pourrait peut être permettre de régulariser jusqu'à ce que le juge statue, voir déclaration de créance)

(le régime est le même pour les privilèges)

Le fait que le privilège dont la créance est assortie soit de nature légale et pas conventionnelle (par exemple privilège du bailleur) ne dispense pas le créancier de le mentionner dans la déclaration de créance, et il n'appartient pas au mandataire judiciaire de déduire de la nature de la créance qu'elle bénéficie d'un privilège non revendiqué Cass com 7 décembre 2004 n°03-12921

La jurisprudence admet parfois la mention "à titre privilégié" dans la déclaration de créance, sans précision particulière de la nature du privilège invoqué ( Cass com 25 juin 2002 n°99-15020 Cass com 15 mars 2005 n°03-19050) ce qui ne facilite pas l'enregistrement et la vérification de la créance, mais en tout état l'admission de la créance, qui sera le support du droit à répartition du créancier doit mentionner expressément la sûreté concernée Cass com 8 janvier 2002 n°98-21745

A défaut de mention du privilège ou de la sûreté dans le délai de déclaration de créance, la créance est traitée en rang de créance chirographaire Cass com 4 février 1992 n°90-13962, Cass com 17 juin 1997 n°95-15945, Cass com 27 octobre 1998 n°96-14959, Cass com 6 juillet 1999 ,n°96-21684 Cass com 8 juin 1999 n°97-12233, Cass com 6 juillet 1999 n°96-21684Cass com 11 juin 2002 n°99-18616 Cass com 20 juin 2000 n°97-16732 Cass com 10 juillet 2001 n°98-18091 et la rectification ne peut s'opérer qu'à l'intérieur des délais de déclaration de créance Cass com 27 octobre 1998 n°96-14959, Cass com 23 janvier 2001 n°98-10974, Cass com 11 juin 2002 n°99-18616

Cependant la Cour de Cassation est traditionnellement assez souple pour prendre en considération l'intention du créancier et rectifier le cas échéant les maladresses de terminologie (pour un exemple Cass com 28 juin 2005 n°04-14578): en l'espèce le créancier qui mentionne une déclaration de créance chirographaire alors qu'il indique expressément dans son courrier la nature du privilège dont il bénéficie et joint des pièces qui en font état a véritablement l'intention de déclarer créance à titre privilégié et doit être admis à ce titre Cass com 19 novembre 2003 n°01-02920 et Cass com 22 septembre 2009 n°08-14621 pour un privilège de prêteur de denier non expressément mentionné, complément d'une hypothèque expressément mentionnée.

A priori le dispositif concerne les sûretés réelles sur les biens du débiteur et l'absence de mention d'une sûreté réelle ou personnelle consentie par un tiers par rapport au débiteur semble sans conséquence (Cass civ 3ème 24 juin 1998 n°97-17108 et Cass civ 1ère 1er Février 2000 n°97-14304 pour une caution)

Transfert de la charge des sûretés en cas de cession d'entreprise

Voir cession d'entreprise

Sort de la sûreté si la créance n'est pas admise au passif

Si dans le cadre de la vérification des créances le juge commissaire écarte la créance et la rejette, la sûreté est "par voie de conséquence" éteinte, et doit être radiée Cass com 4 mai 2017 n°15-24854. La solution est logique, mais en l'espèce l'arrêt est relatif non pas relatif à une créance écartée mais à une créance irrégulièrement déclarée


Sûreté pour dette antérieure

Voir notamment arrêt du cours des inscriptions


Sureté réelle consentie par le débiteur

La sureté réelle consentie par le débiteur consiste pour ce dernier à affecter un de ses biens en garantie d'une dette d'un tiers, dont il ne se porte pour autant pas caution. La définition est posée par l'article 2334 du code civil.

L'ordonnance du 15 septembre 2021 applicable aux procédures ouvertes à compter du 1er octobre 2021 a modifié deux aspects du droit positif

- arrêt des voies d'exécution

- déclaration de créance


Sureté réelle pour dette d'autrui

Consiste à donner un bien en garantie d'une dette d'un tiers.

A distinguer du cautionnement Cass com 5 avril 2023 n°21-14166 et Cass com 5 avril 2023 n°21-18531 car le propriétaire du bien donné en garantie ne contracte aucun engagement personnel.


Sursis à statuer

C'est le fait pour une juridiction de décider d'attendre un évènement pour prendre sa décision. Lorsque l'évènement surviendra, il appartiendra aux parties d'en informer le juge pour qu'il rende sa décision, et s'ils ne le font pas le délai de péremption d'instance, suspendu par la décision de sursis, recommance à courir.

La loi organise des cas de sursis dits obligatoires, qui s'imposent au juge, et d'autres de sursis dits facultatifs.

Le code de procédure civile évoque le sursis à statuer aux articles 378 et suivants.

Par exemple un sursis à statuer peut être ordonné sur une demande de restitution de stock le temps que l'inventaire soit effectué .

Par exemple encore l'article 110 du CPC dispose que le juge peut également suspendre l'instance lorsque l'une des parties invoque une décision, frappée de tierce opposition, de recours en révision ou de pourvoi en cassation.

Procéduralement la demande de sursis à statuer doit être formée dans les formes des exceptions de procédure (cf article 74 du CPC, et avis de la Cour de Cassation 29 septembre 2008 n°00800007P) et donc avant toute fin de non recevoir ou défense au fond, évidemment à partir du moment où les causes du sursis existent.

Il en résulte d'ailleurs que la décision qui statue sur une demande de sursis à statuer statue sur une exception de procédure, ce qui a une importance particulière en matière de voie de recours.

Par exemple si c'est le juge de la mise en état qui ordonne le sursis, un texte spécifique organise l'appel sur autorisation du premier président de la Cour d'appel, s'il est justifié d'un motif grave et légitime (article 380 du CPC), l'appel immédiat étant irrecevable sauf si la décision avant dire droit met fin à l'instance (articles 544 et 545 du CPC). La Cour de Cassation considère qu'en cas d'appel d'une décision ordonnant le sursis, la Cour peut évoquer (Cass com 15 novembre 2018 n°17-25955   , Cass civ 2ème 25 mars 1985 n°80-40788, ce qui ne correspond pas à la lettre de l'article 568 du CPC 

mais si ce même juge refuse le sursis, il a statué sur une exception de procédure, et c'est l'article 776 du CPC qui s'applique, lequel permet un appel immédiat (c'est à dire sans autorisation du premier Président) dans les 15 jours de la signification de la décision (Cass civ 2ème 25 juin 2015 n°14-18288 et dans le même sens Cour d'appel Versailles Chambre 12 1er Mars 2016 N° 15/07321


Suspension des poursuites

Voir arrêt des poursuites


Suspicion légitime

Voir dessaisissement de la juridiction


Suspicion légitime

voir le mot dessaisissement de la juridiction


Syndicat de copropriété

Voir super privilège de la copropriété


Syndic- Syndic administrateur judiciaire - syndic de faillite

Généralités

Le syndic est le représentant du syndicat. Le terme est employé par exemple pour un syndicat de copropriétaire.

En procédure collective

Dans d'anciennes législations le texte prévoyait que les créanciers étaient constitués en un syndicat, c'est à dire un groupement structuré. Le représentant était pour cette raison dénommé syndic.

Dans les premiers textes, notamment du code de commerce de 1807 promulgué par Napoléon 1er et qui faisait suite à de précédents textes inspirés du droit romain, le syndic était élu par les créanciers parmi eux (et était donc un créancier), et était bénévole.

Le système a été dévoyé, les petits créanciers ne pouvant matériellement assumer la mission qui finalement revenait systématiquement aux créanciers les plus importants, essentiellement les usuriers et les banquiers

Ces créanciers utilisaient parfois la fonction de syndic pour rechercher un bénéfice personnel à la liquidation du "failli" ou contraindre le débiteur à présenter des propositions de règlement plus favorables à certains créanciers qu'à d'autres -dénommés concordat - (on peut lire à ce sujet César Birotteau de Balzac)

Progressivement, devant la technicité de la mission et l'absence de candidats, un corps de professionnel est apparu.

Initialement des professionnels qui exerçaient des professions judiciaires (avocats) ou comptables (expert comptables) ont été désignés syndic, non plus en étant élu mais désignés par le tribunal qui ouvre la procédure. Ils exerçaient ainsi une activité secondaire de leur activité principale.

Ce n'est qu'en 1959 qu'une profession est née, dénommée syndic-administrateur judiciaire. La profession était exercée soit à titre d'accessoire d'une autre, soit à titre principal suivant les tribunaux, et les professionnels étaient rémunérés suivant un tarif fixé par décret.

En 1985 la profession unique de syndic-administrateur judiciaire a été éclatée en deux: les administrateurs judiciaires et les mandataires liquidateurs, devenus par la suite mandataires judiciaires (qui exercent les missions de mandataire judiciaire et de liquidateur puisque de manière assez trompeuse le terme de mandataire judiciaire recouvre à la fois le nom de la profession et celui d'une des missions de ces professionnels)

Les dénominations de "syndic", "syndic de faillite" ou "syndic administrateur judiciaire" sont les anciennes dénominations, parfois encore employés dans le language commun, pour les professions d'administrateurs judiciaires et de mandataires judiciaires.